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Ghostopolis (TenNapel)

Par Mo
TenNapel © Milady – 2012

TenNapel © Milady – 2012

Frank Gallows est un agent de la force d’intervention de l’immigration surnaturelle. Son boulot consiste à traquer les fantômes se dissimulant chez nous pour les renvoyer dans leur monde. Mais Gallows est un peu au bout du rouleau et a tendance à forcer sur la bouteille. Pas étonnant donc qu’au cours d’une intervention il envoie sans le faire exprès Garth, un gamin bien vivant, au royaume des morts. Viré manu-militari par son patron, Gallows décide néanmoins d’aller lui-même rechercher Garth à ses risques et périls. Pendant ce temps le jeune garçon découvre les joies de Ghostopolis, la ville des fantômes, où un mystérieux tyran fait régner la terreur…

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Lecture commune vous avez dit lecture commune ? Lorsque Jérôme m’a proposé de partager nos ressentis sur la lecture de cet album… j’ai eu envie d’une VRAIE lecture commune. Nous nous sommes fixés une date de publication assez proche et quitte à être dans le partage… autant parler ensemble de nos impressions !

C’est pourquoi, Mesdames et Messieurs,
nous vous proposons… deux avis en un !

Tout d’abord, j’ai vite plongé dans l’histoire. Découvrant progressivement Garth, puis Franck… puis Garth… ces deux personnages aussi différents que complémentaires ont de suite eu ma sympathie. La maladie incurable de Garth titille notre empathie, le côté looser paresseux de Franck nous fait comprendre que nous n’avons rien à craindre de ce gars-là.

Le rythme narratif est pourtant assez linéaire. Outre quelques passages qui orientent radicalement l’intrigue dans une nouvelle direction, l’action n’est pas (pour moi) le point fort de cet album. Il se situerait plutôt du côté de la construction des deux personnages principaux ; c’est à eux que les clés de compréhension de Ghostopolis sont données (un monde qui a ses codes, ses règles, son histoire… sa prophétie !). Doug TenNapel soigne donc leur présentation ainsi que celle des personnages secondaires que l’on prend le temps d’accueillir (qui est-il ? que fait-il ? que veut-il ?…). Le lecteur dispose donc en permanence de toutes les cartes pour se repérer dans cet univers fantastique. De même, l’auteur n’hésite pas à casser son rythme narratif lorsqu’il s’emballe, donnant ainsi l’opportunité à ses « créatures de papier » d’analyser la situation et d’inventer un plan d’action. Doug TenNapel jongle en permanence avec le comique de situation qui, outre le fait de faire rire, dédramatise la situation et ouvre cet album à un large lectorat. Loin d’être alambiqué, le scénario emmène donc le lecteur dans un monde qui lui semblera à la fois étranger (on y côtoie momies, squelettes, fées, loup-garou, gobelins…) et familier (ceux qui l’habitent reproduisent en partie les règles du monde des vivants). Quelques clins d’œil épicent la lecture, à l’instar de cette référence à la Genèse où il est dit que Dieu créa la Terre en six jours et il s’est reposé le septième… dans Ghostopolis, le grand architecte de ce monde imaginaire se nomme Joe, « il a posé chaque brique de Ghostopolis pour que les fantômes aient un endroit pour vivre. Certains disent qu’il lui a fallu six jours pour tout construire, d’autres parlent d’un milliard d’années… ». D’autres références sont à relever (peut-être) comme la présence des sept royaumes de Ghostopolis qui pourraient être une allusion aux sept rois de Rome, ou à l’Apocalypse (« Les sept étoiles sont les anges des sept Eglises et les sept candélabres sont les sept Eglises ») voire des Sept royaumes de Cinda Williams Chima voire… rien de tout cela, le chiffre sept n’est certainement que le fruit du hasard (bien que certains articles me fassent penser le contraire : ici, ici et de manière fréquente sur l’autre blog de l’auteur).

Pure fiction ? Simple coïncidence avec les textes du Nouveau testament ? Jérôme, comment as-tu perçu cette histoire et son intrigue ? Quels effets ont-elles eu sur toi ?

Jérôme :

J’avoue que j’ai eu un peu de mal à rentrer dans l’album. Les univers fantastiques, c’est pas vraiment mon truc. Après, j’ai aimé les différentes figures qui composent le royaume des ténèbres. Squelettes, momies, fantômes, gobelins, etc, c’est plutôt bien trouvé et c’est parlant pour le lectorat, quel que soit son âge. Contrairement à toi je n’ai pas vu les références au nouveau testament (mon inculture en matière de religion est affligeante !) mais j’ai apprécié  le fait que le grand architecte de ce monde imaginaire soit un géant noir. S’il avait été une géante noire, cela aurait été encore mieux de mon point de vue mais c’est déjà une trouvaille originale et qui sort des sentiers battus.

Après, l’intrigue en elle-même ne m’a pas passionné. Une mission d’exfiltration assez classique finalement, tout comme l’affrontement final entre Garth et Vaugner qui m’a rappelé certains combats de Godzilla. Le grand méchant de l’histoire manque par ailleurs singulièrement d’épaisseur. Pas assez retors à mon goût ce gros vilain ! Même le personnage de Garth m’a paru assez fade. Finalement, Frank Gallows est de loin celui que j’ai préféré : paresseux, aigri, alcoolique, de mauvaise foi, avec une bonne dose d’humour souvent grinçant, c’est tout ce que j’aime. L’autre personnage qui m’a bien plu est le roi des squelettes. Ses aspirations à fuir les mondanités dues à son rang, sa volonté de vivre l’aventure par lui-même et ses blagues souvent foireuses apportent beaucoup de fraîcheur. Donc pour moi les personnages secondaires sont plus intéressants que l’histoire en elle-même.

Et ce n’est pas la première fois que nos ressentis sont radicalement opposés !! Et côté dessins…

Mo’ :

Le graphisme quant à lui est on ne peut plus ludique même si effectivement, ce n’est pas ce qui se fait de plus beau en la matière. Une ambiance visuelle en noir et blanc aurait certainement mieux servi cet univers graphique (comme en témoignent les planches originales que l’on voit dans cette vidéo). Les couleurs sont parfois très appuyées, ce qui égaye l’univers et donne une touche récréative aux événements qui ont lieu. Là encore, j’imagine que la présence de la couleur a la même utilité que le comique de situation utilisé dans la narration : permettre à cet album de disposer d’un large lectorat. Je pense que petits et grands pourront parfaitement se saisir de cette aventure. Je ne pourrais lui reprocher que l’absence d’aplats qui impose un univers en 2D qui m’a parfois laissée sur ma faim, d’autant que les fonds de cases sont souvent négligés.

Cependant, j’imagine aisément que mon compagnon de lecture commune (Jérôme) n’a peut-être pas savouré cette déferlante de couleurs artificielles…. Jérôme ?

Jérôme :

Euh, il faut vraiment que l’on parle des couleurs ? Quand je regarde le générique  en première page et que je vois deux coloristes et huit assistants coloristes, je me dis qu’il faut s’attendre au pire ! Et en effet, c’est pas joli-joli. Des couleurs tellement froides, tellement « assistées par ordinateur » qu’elles perdent toute leur saveur. Si au moins elles avaient été utilisées à bon escient pour combler par endroit la pauvreté des décors, elles auraient servi à quelque chose mais ce n’est pas le cas. Parce que pour le coup il ne s’est pas foulé à ce niveau-là Mr TenNapel. Une profusion de gros plans pour cacher la misère et lors des scènes de combat ou de poursuites, rien d’autres que les protagonistes et quelques traits pour souligner le mouvement. La ville des fantômes aurait mérité plus de détails architecturaux, c’est incontestable.

Niveau dessin, l’encrage épais n’est pas pour me déplaire et j’ai souvent trouvé quelques comparaisons avec le travail de Frederik Peeters dans Koma (en moins bien quand même). Le découpage est quant à lui intelligent avec l’alternance entre des scènes « mouvementées » dans lesquelles TenNapel est très à l’aise et d’autres plus calmes, souvent teintées d’une jolie émotion.

Une lecture que nous partageons avec Mango

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N’hésitez pas à participer à l’échange qui se déroule également chez Jérôme en suivant ce lien.

PictoOK
Une découverte agréable et divertissante me concernant.

Ghostopolis est également le Livre voyageur de Valentyne ; il est déjà passé chez Hilde et poursuit sa route chez Lystig.

Une interview de l’auteur réalisée en juillet 2010 (au moment de la sortie U.S. de l’album).

Les chroniques : David, Choco, Joëlle.

Du côté des challenges :

Lieux imaginaires : Ghostopolis

Challenge Lieux imaginaires

Challenge Lieux imaginaires

Ghostopolis

One shot

Editeur : Milady

Collection : Milady Graphics

Dessinateur / Scénariste : Doug TENNAPEL (les forums de Doug TenNapel)

Dépôt légal : mars 2012

ISBN : 978-2-8112-0607-9

Bulles bulles bulles…

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Ghostopolis – Tennapel © Milady – 2012


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