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Ni « conservateur » ni « progressiste », le nouveau Pape sera… chrétien !

Publié le 28 février 2013 par Tchekfou @Vivien_hoch

Tribune libre de Vivien Hoch

L’élection d’un nouveau Pape – qui nécessite, pour la petite leçon, le vote au deux-tiers des électeurs, et qui ne permet donc par d’être élu avec moins de la majorité des votants, comme le Président français actuel – est l’objet de tous les fantasmes médiatiques qui voient dans cet événement l’occasion d’une « modernisation » de l’Eglise catholique romaine. Tout dépend d’une part de ce que l’on entend par « conservatisme » et « progressisme », et d’autre part par ce que l’on comprend du rôle de l’Eglise elle-même. Quelques éclaircissements.

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D’un certain point point de vue, l’Eglise de Jésus-Christ a toujours été ultra-progressiste. Parce que le mouvement de sécularisation précède et devance toujours la société, l’Eglise rappelle en permanence cette dernière à ses défis. Des défis qui traversent les époques et les rappellent chacune à leurs vrais progrès : l’épanouissement humain, le respect de la nature, l’élévation vers le Bien, le Beau, le Vrai.

 D’un autre point de vue, l’Eglise a toujours été ultra-conservatrice, et ceci en vertu des mêmes raisons et des mêmes missions qui lui sont confiées. Elle a toujours eu une fonction de mise en crise des catégories socio-politiques de la cité, en les rappelant à leur hétéronomie originaire, celle, sinon du rapport à Dieu, du moins d’un rapport respectueux de l’humanité de tout homme.

 Ultra-conservatisme et ultra-progressisme, selon les deux expressions chéries des médias, se retrouvent dans la fameuse phrase de saint Jean Chrysostome : « La gloire de Dieu c’est l’homme vivant, et la gloire de l’homme, c’est la vision de Dieu », harmonisant le défi progressiste : une vie pleinement humaine, et le défi conservateur : une vision de Dieu qui précède toute société parce qu’elle en est la raison d’être.

L’Eglise traverse donc l’esprit du siècle, sans s’y réduire. Elle vient toujours d’avant et va après. Elle est toujours conservatrice, parce qu’elle se sait dépassée par plus grand qu’elle, et toujours progressiste, parce qu’elle ne se réduit pas aux catégories du monde.

Ne se reposant ni sur des « valeurs » ni sur des « modes », elle est trans-valeurs et trans-modes. C’est pourquoi elle évite d’employer le terme (récent) de « valeur », en lui préférant celui de « transcendantaux » (Beau, Vrai, Bien). La « valeur » est cette production sociale, ce symbole mis entre moi, autrui et le monde, pour l’évaluer. Mais l’Eglise n’évalue pas le monde ; d’une part parce que c’est à Dieu de juger, d’autre part parce qu’elle exerce justement cette mise en perspectives des « valeurs » qui portent une quelconque société. L’Eglise est sans valeurs, elle ne « vaut » rien d’elle-même, pour elle-même ou pour le monde, parce qu’elle ne reçoit d’évaluation que du Jugement Dernier.

 Voilà pourquoi elle s’adresse à l’ensemble du monde, et pas seulement à nos pays qui se veulent plus « éclairés » que les autres. L’Europe n’est pas l’Eglise, et l’Eglise n’est pas l’Europe. Pour un catholique, Rome est la capitale du monde. Urbs caput orbis. Nul européanismo-centrisme. Jacques Maritain disait déjà que l’Eglise « n’apporte pas au monde les bienfaits de la civilisation, mais le Sang du Christ et la Béatitude surnaturelle » (Grandeur et misère de la métaphysique, 9). Autrement dit qu’elle n’a sur le monde qu’une influence spirituelle, et si cela n’échappe pas déjà au politique, c’est au moins déjà actif dans la sphère pré-politique qui détermine en grande partie les options prises consciemment dans l’activité sociale.

« L’Eglise est une réalité vivante, comme un être vivant qui se transforme au fil du temps et reste reste toujours lui même. » (Benoit XVI devant les cardinaux, le 28 février 2013)

© Vivien Hoch, pour Itinerarium
 


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