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[Critique] EFFETS SECONDAIRES

Par Onrembobine @OnRembobinefr
[Critique] EFFETS SECONDAIRES

Titre original : Side Effects

Note:

★
★
★
★
☆

Origine : États-Unis
Réalisateur : Steven Soderbergh
Distribution : Rooney Mara, Jude Law, Catherine Zeta-Jones, Channing Tatum, Vinessa Shaw, Ann Dowd, James Martinez, Polly Draper, Michelle Vergara Moore, Vladimi Versailles…
Genre : Thriller/Drame
Date de sortie : 3 avril 2013

Le Pitch :
En prison depuis 4 ans, Martin, le mari d’Emily, vient enfin d’être libéré. Déterminé à repartir sur de bonnes bases, le couple doit néanmoins faire face à la dépression d’Emily, qui devient de plus en pesante. Devant l’ampleur de cette dépression, Emily finit par consulter Jon Banks, un psychiatre réputé. Ce dernier prescrit à la jeune femme un nouveau traitement qui, bien qu’efficace, provoque chez Emily des crises de somnambulisme. Et c’est justement à la suite de l’une de ses crises, qu’Emily se réveille, dans son appartement, son mari gisant à ses pieds…

La Critique :
Steven Soderbergh est dans une bonne passe. Après Magic Mike, qui n’était ni plus ni moins que l’une des meilleures surprises de 2012, le voici qui débarque avec Effets Secondaires. Un film à tiroirs, extrêmement malin, rondement mené, remarquablement joué et mis en scène par un type en pleine possession de ses moyens.

On peut reprocher à Soderbergh de ne pas savoir se faire désirer. En 10 ans, depuis 2002 et Full Frontal, le cinéaste a tout même livré pas moins de 13 longs-métrages. 13 films auxquels s’ajoutent le segment d’Eros, le documentaire And Everything Is Going Fine et le téléfilm Behind the Candelabra, sur la vie du chanteur Liberace, avec Michael Douglas et Matt Damon. Il faut croire que Soderbergh ne dort pas, n’a pas de vie privée, mange peu, et passe son temps entre les plateaux de tournage et les salles de montage. Forcement, dans le tas, on retrouve des œuvres mineures dont certaines dégagent un léger parfum d’inachevé (Contagion, Piégée…). Effets Secondaires n’en fait pas partie. À vrai dire, son dernier film est l’un de ses plus réussis et de ses plus aboutis. L’un des plus complexes aussi, tant Soderbergh offre ici un thriller redoutablement efficace, aux nombreux (et réussis) rebondissements, mais aussi une réflexion sur la surmédication d’une société dépendante.

Avant d’aller plus loin dans l’analyse, parlons un peu du casting. Car les acteurs, si ils sont certes servis par une mise en scène exigeante et un script surprenant, sont pour beaucoup dans la réussite de l’entreprise. Reposant sur un quatuor de comédiens au diapason, Effets Secondaires jouit d’une cohérence total dans son casting. Il y a tout d’abord Rooney Mara. Aussi rare, que manifestement exigeante dans ses choix, la jeune femme donne ici le meilleur. Non seulement superbe, Rooney Mara imprime le film de son charisme inouï et de son ambiguïté naturelle. Son double statut dans l’intrigue de victime/bourreau y est sans doute pour beaucoup, mais il faut louer la performance. Sans trop en faire, elle joue sur les regards, tour à tour fuyants et pénétrants, arrive à donner corps à un personnage ô combien complexe, et tire finalement tout le monde vers le haut. D’ailleurs, au delà de toutes les grandes qualités du métrage, c’est elle la meilleure raison pour payer sa place de cinéma.
Bien sûr, on retrouve à ses côtés des acteurs confirmés qui, pour la plupart, n’ont plus à faire leurs preuves, mais pour autant, c’est bien elle le pivot de l’histoire. Celle qui mène la danse, d’une façon ou d’une autre, au point d’habiter le métrage en permanence. Aussi perturbante, troublante qu’attirante, Rooney Mara incarne une perversité maligne, sans cesse sur le fil du rasoir, alors même qu’à l’écran, elle s’en prend plein la gueule, vu que c’est elle qui incarne l’allégorie de cette Amérique dépendante aux psychotropes. Non franchement, c’est du lourd, et si on un tel numéro de haute voltige nous fait regretter sa rareté à l’écran, force est de reconnaître que quand elle est là, elle ne fait pas semblant.
Après, il y a bien sûr Jude Law, complètement en phase avec son personnage, lui aussi habité par une ambiguïté qui garde ses zones d’ombre jusqu’au bout. Catherine Zeta-Jones opère un grand retour au premier plan, après une période de vaches maigres (du moins qualitativement parlant) et tout le monde semble se nourrir de la motivation des autres. Channing Tatum de son côté, après avoir cachetonné dans G.I. Joe, poursuit une carrière de plus en plus intéressante, relativement en retenu, totalement au service de son réalisateur et de ses collègues. Apparemment imperméable aux effets secondaires de l’image que certains médias lui battissent, Tatum trace sa route et maintient un cap qui pourrait le mener très loin.

Palpitant, car prenant par surprise à plusieurs reprises, Effets Secondaires cache donc aussi une réflexion pas piquée des vers sur la psychiatrie telle qu’elle trop souvent pratiquée chez L’Oncle Sam et sa propension à régler tous les problèmes avec une pilule magique. C’est comme ceci que débute le film d’ailleurs. Dans la dépression d’une jeune femme en détresse, imperméable aux traitements et aux psychothérapies. Soderbergh décrit l’escalade de l’industrie pharmaceutique, ses dérives et son désir de mener toujours plus loin des expérimentations visant à créer l’opium parfait pour un peuple en forte demande. Brillant dans son premier tiers, à ce niveau, le long-métrage bascule ensuite justement sur les effets secondaires de ces pilules et du même coup dans le thriller pur et dur. Sans abandonner leurs velléités de départ, Soderbergh et Scott Z. Burns, son scénariste arrivent à combiner deux genres qu’il est difficile de faire coïncider dans un tout de bonne tenue.

On peut reprocher à Soderbergh de nous sortir toujours le même attirail côté mise en scène. Les allergiques à son style en seront pour leurs frais. À plus forte raison dans le cas présent, vu que le réalisateur accentue un peu plus le côté clinique et froid de sa réalisation. On aime ou aime pas, mais vu le sujet et l’ambition du projet, la chose colle à merveille. Certes, le film est un peu long, mais il reste passionnant et intriguant jusqu’au bout, offrant toujours quelque chose d’intéressant. Soderbergh multiplie les pistes et s’y retrouve. Avec de sacrées bonnes cartes en main, il parvient à emballer un long-métrage à l’identité visuelle et narrative marquées. Un divertissement qui a de la gueule, mais qui sait aussi coller à son époque.
Évoquant Hitchcock (influence ici revendiquée), Effets Secondaires impressionne et déroute. Parfois il se perd un poil, mais finit par retomber sur ses pattes lors d’un final un peu poussé, mais suffisamment culotté, bien amené et bien construit, pour passer comme une lettre à la poste. Et puis ouais, ça fait plaisir. Soderbergh, fidèle à lui même, avec ses petites poses autherisantes, mais plus appliqué, livre un excellent thriller qui en a dans le ventre. Un film qui se détache de la masse, à voir et à revoir. Pour Ronney Mara donc, mais pas seulement, vous l’aurez compris…

@ Gilles Rolland

Effets-secondaires-Rooney-Mara
Crédits photos : ARP Sélection


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