Magazine Europe

Déclarations homophobes et politique de recrutement sportif

Publié le 25 avril 2013 par Duncan

CJUE, 25 avril 2013, Accept, C-81/12.
Les déclarations homophobes d'une personne qui est considérée comme étant le dirigeant d'un club de football par le grand public peuvent-elles constituer "des faits qui permettent de présumer l'existence d'une discrimination" au sens de la directive 2000/78 dans le chef des employeurs du club?
C'est la question à laquelle devait répondre la CJUE dans cette affaire.

La difficulté dans cette affaire découlait du fait que si la personne qui a tenu ces propos est considérée (et se présente toujours) comme le dirigeant d'un club de football par le public, il n'a, strictement juridiquement parlant, pas d'influence sur la politique de recrutement du club. La Cour ne tient pas compte de cette difficulté et considère que "l’auteur des déclarations portant sur la politique d’embauche d’une entité déterminée [ne] doit [pas] nécessairement avoir la capacité juridique de définir directement cette politique ou encore de lier ou de représenter cette entité en matière d’embauche" (point 47).

En particulier (points 49 et s.): "un employeur défendeur ne saurait réfuter l’existence de faits permettant de présumer qu’il mène une politique d’embauche discriminatoire en se limitant à soutenir que les déclarations suggestives de l’existence d’une politique d’embauche homophobe émanent d’une personne qui, bien qu’elle affirme et semble jouer un rôle important dans la gestion de cet employeur, n’est pas juridiquement capable de le lier en matière d’embauche (...) Dans une situation telle que celle à l’origine du litige au principal, le fait qu’un tel employeur n’ait pas clairement pris ses distances avec les déclarations en cause constitue un élément dont l’instance saisie peut tenir compte dans le cadre d’une appréciation globale des faits".

La question suivante portait sur la manière dont l'employeur devait alors démontrer qu'il ne menait pas une politique d'embauche homophobe. En effet, selon l'article 10 de la directive, il incombe à la partie défenderesse de prouver qu'il n'y a pas eu violation du principe de l'égalité de traitement. L'employeur en cause soutenait que cette preuve était une preuve impossible à rapporter sans violer le droit à la vie privée des joueurs.

La Cour écarte cet argument.

Selon elle, l'employeur n'a pas compris la portée exacte de l'article 10 de la directive (points 57 et s.): il n’est pas nécessaire que l'employeur prouve que des personnes d’une orientation sexuelle déterminée ont été recrutées dans le passé, ce qui serait effectivement susceptible de porter atteinte au droit au respect de la vie privée mais de montrer "à partir d’un faisceau d’indices concordants" qu'une telle politique n'est pas menée. Ainsi, "parmi de tels indices pourraient notamment figurer une réaction de la partie défenderesse concernée dans le sens d’une prise de distance claire par rapport aux déclarations publiques à l’origine de l’apparence de discrimination ainsi que l’existence de dispositions expresses en matière de politique de recrutement de cette partie aux fins d’assurer le respect du principe de l’égalité de traitement au sens de la directive 2000/78".


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Duncan 275 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte