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Influence et réputation sur Internet – 3 questions à Martin Pasquier

Publié le 30 avril 2013 par Infoguerre

Influence et Reputation sur Internet   communautes  crises et strategiesLe 20 mai prochain, la Collection AEGE publie son 5e ouvrage intitulé : "Influence et réputation sur Internet : communautés, crises et stratégies". Premier ouvrage collectif de la Collection, Infoguerre propose une série d'articles de type "3 questions à…" aux différents auteurs qui seront publiés dans les semaines à venir. NB : le responsable d'Infoguerre a co-écrit dans cet ouvrage.
Commençons cette série d'articles par Martin Pasquier qui, après avoir dirigé pendant 3 ans le département médias sociaux d’une agence parisienne, est désormais associé de l’agence Tesla, dont il assure le déploiement en Asie du Sud-Est depuis Singapour.

Ton chapitre dans "Influence et réputation sur Internet" s'attarde sur les communautés dans l'influence. Peux-tu nous en dire plus ?

Il est difficile aujourd'hui de passer une journée sur le web sans croiser le mot "communauté". Rejoins la communauté ! Finance ton projet par la communauté ! Il en va de même dans les discours des professionnels de la communication et du marketing, pour qui les communautés sont une nouvelle manière de nommer des segments de consommateurs. Ce ne sont pas uniquement des statistiques démographiques, socio-professionnelles, mais également des personnes en relation, qui ont des sites ou des groupes de discussion où leur opinion se cristallise, des influenceurs plus actifs ou légitimes que les autres. 

Un exemple simple, c'est la Santé. Nous cherchons des informations sur Doctissimo, ou sur des applications éditées par des marques (je pense à l'application Nestlé Bébé). 96% des médecins eux-mêmes cherchent de l'information sur Google, et ce sont les résultats les plus recommandés par les communautés, par le jeu des hyperliens ou de l'inclusion dans les réseaux sociaux, qui ressortent. Les étudiants en pharma forment une autre communauté passionnante d'expertise sur Twitter, autour d'un mot-clé, #hcsmeufr, plutôt qu'autour d'un "leader". Ce sont donc des communautés, aux acteurs, modes d'expression et d'interaction différentes, qui font références, aux côtés de journalistes ou de professionnels un peu dépassés par la vitesse de ces changements.

Internet et les médias sociaux ne sont pourtant pas à l'origine de ce mouvement des communautés, même s'ils l'outillent, l'amplifient, le facilitent, et permettre de nouveaux projets 100% communautaire, comme Wikipédia, ou les quelques 2,6 milliards de dollars de projets financés en 2012 par le crowdfunding. J'ai souhaité proposer dans ce chapitre comment le concept de communauté est en gestation depuis les Révolutions américaine puis française du 18e siècle, et comment, plus récemment, d'autres tendances lourdes, comme l'émancipation des individus ou la dispersion de la puissance, favorisent ce phénomène. 

De la politique au financement, en passant par l'innovation ou le marketing, les exemples sont légions pour montrer que non seulement les communautés sont influentes, mais surtout, les organisations traditionnelles, Etats, grandes entreprises, associations, sont souvent dépassés par ce phénomène. La prime à ceux qui comprennent ce nouvel environnement ouvert, participatif et transversal est immense. Aux autres, en revanche, bon courage.


Selon toi, comment vont évoluer l'influence et la réputation sur Internet dans les années à venir ?

J'enfonce une porte ouverte, mais c'est véritablement le mobile qui doit guider pour le moment nos pensées. 

La connection mobile est différente de celle du "desktop", car elle est plus intime avec un terminal qui contient nos vies professionnelles et personnelles, plus émotionnelle en s'ancrant dans l'instant, et plus contextuelle car elle peut s'adapter à nos déplacements et nos environnements. 

Comment fonctionne l'analyse de la réputation en ligne aujourd'hui ? Eh bien, de manière pas très mobile ! Les dashboards de veille restent focalisés sur la qualité du locuteur, plus que sur son contexte d'émission. Or, je n'écris pas le même commentaire sur un restaurant en mobilité (avant même ou juste après le service, à chaud) qu'en revenant au bureau ou à la maison (2h après, à froid…). Foursquare, par exemple, est une mine d'informations qui est peu exploitée. Ce réseau social qui permet à chacun de dire "je suis là !" et de rédiger des conseils, un commentaire à chaud, de télécharger une photo ou de citer ses amis, est notoirement sous-évalué. 

A Singapour, par exemple, les plus grands centres commerciaux ont jusqu'à 10 fois plus de citations sur Foursquare que sur Facebook, mais c'est rarement pris en compte, alors même que sur Foursquare, on peut "pousser" des deals personnalisés et obtenir des données vraiment précises sur ses consommateurs, visiteurs, ou détracteurs. Je vous conseille par exemple de regarder ce qu'il se dit de l'aéroport Charles de Gaulle sur ce réseau social, et d'imaginer comment les anglo-saxons, très friands de ce réseau, voient le principal aéroport français avant même d'être descendus de l'avion…

L'influence, elle, sera je l'espère plus diluée, plus diffuse. Les marques réfléchissent encore en termes de "blogueur", c'est à dire qu'elles cherchent encore à séduire des têtes de réseau en espérant que leurs audiences "absorbent" un message de marque. L'activité des communautés est si riche, qu'il y a beaucoup plus à faire en se focalisant sur des groupes d'utilisateurs, avec qui co-créer, co-financer, imaginer des choses à plusieurs. Ce que fait Starbucks avec sa plateforme My Idea est remarquable avec des dizaines de milliers de contributions, votes, idées, appels à projets… C'est autre chose qu'une page Facebook et les quizz minables qui les parsèment, franchement.

Peux-tu nous dire deux mots sur ce que tu fais en ce moment ?

Je découvre une nouvelle région, l'Asie du Sud-Est, et son "next billion users". C'est excitant, car ce nouveau milliard de personnes qui va se connecter est à la fois plus jeune, plus mobile, et… plus optimiste que nous autres, vieux Européens empêtrés dans la crise. Nous avons basé avec Mathieu l'activité asiatique de notre agence Tesla à Singapour, pour disposer d'une porte d'entrée "facile" dans la région (anglophone, business-friendly), mais nous avons hâte d'aller découvrir le potentiel de l'Asie du Sud Est. J'ai commencé l'apprentissage de l'indonésien, qui devrait m'ouvrir l'accès à près de 300 millions de personnes, et une classe moyenne qui grossit de 1,5 millions de personnes chaque année.

Je découvre aussi, avec la création d'une entreprise en Europe et en Asie, des différences culturelles et économiques majeures. Ici par exemple, le conseil a peu, voire pas, de valeur, toute dépense doit amener des ventes. A tel point que nous pensons développer plutôt des produits que des prestations, un peu à la manière d'une startup. Cela nous oblige à être beaucoup plus pragmatique et orienté résultat, avec, souvent, des demandes de facturation à la performance.

Retrouvez toutes les informations sur cet ouvrage sur le blog dédié.


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