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Jeux AAA : Pourquoi les gros budgets nuisent aux Jeux Vidéos

Publié le 13 juin 2013 par Igeek4you @Tristan_Denis

Un jeu AAA est une façon de désigner ces jeux vidéos qui disposent du plus gros budget de développement. Pour bien comprendre cette problématique, rappelons que le développement de n'importe quel jeu vidéo est par essence un procédé long et coûteux avec un facteur risque non négligeable.

La norme pour un jeu triple A est un cycle de 3-4 ans de développement et un coût de plusieurs dizaines de millions d'euros.

Ainsi, le budget élevé permet à ces jeux de disposer d'une large équipe de développement et de se voir donner des délais de conception confortable. De plus, le produit disposera d'un budget marketing important lors de son lancement afin de toucher le plus de gamers possibles. Un jeu AAA correspond en fait, dans l'univers du jeu, à un blockbuster hollywoodien pour le cinéma.

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Black Ops II :                                                                               une jaquette minimaliste qui cache un des blockbusters les plus importants de la décennie

Sur le papier, ces jeux pourraient sembler être ceux qui rapportent le plus et surtout les plus réussis. Pourtant, cela n'est pas forcément vrai. En effet, la niveau d'investissement et de donc de risque, bien supérieur à celui d'un jeu normal, fait peur à l'éditeur.

Alors, pour réduire ce risque, il décide parfois de faire en sorte que son produit touche le public le plus large possible. Rien de condamnable en soi, bien sur, une entreprise existe pour faire des bénéfices. Mais ce choix a de lourdes conséquences.

Une très bonne illustration de ce problème est Dead Space 3, jeu sorti en 2013 et considéré comme un échec commercial par EA malgré des ventes de plusieurs millions d'unités. Son PDG de l'époque, John Riccitiello, annonçait que ce troisième opus devait vendre 5 millions d'unités pour justifier ses coûts de production. Pour comprendre cela, intéressons nous à l'évolution de la série.

Dead Space 1 et 2 constituaient une licence de survival horror acclamée par la critique se déroulant dans un univers science-fiction réaliste. La licence se basait sur la création d'une atmosphère oppressante, un sens de vulnérabilité et sa marque de fabrique d'ennemis particulièrement malsains : les nécromorphes.

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Dead Space 3 : un petit survival horror devenu un jeu AAA

Le héros, Isaac Clarke, était un simple ingénieur seul et inexpérimenté qui tentait simplement de survivre en se défendant avec des outils d'extraction minière trouvés sur place. Ravagé par la culpabilité en raison de la mort de sa femme, il représentait un avatar fragile et humain auquel le joueur pouvait s'identifier.

Le succès du deuxième opus poussa alors Electronic Arts à vouloir investir plus dans la licence. Problème, le survival horror représente une niche de taille réduite qui n'a pas le potentiel de rapporter assez pour justifier un investissement plus important. Jugeant que la licence Dead Space est assez populaire pour attirer plus de joueurs qui en ont entendu parler, EA décide de rendre le jeu plus "mainstream".

Alors, le côté horreur de la série est largement mis de côté au profit d'un positionnement plus "action". D'abord, aux monstres nécromorphes sont ajoutés une faction de soldats humains : les Unitologues. Cela amène des phases de combat à l'armes à feu classiques et assommantes à souhait car pas du tout en phase avec l'esprit du jeu.

Ensuite, le jeu offre la possibilité de jeu avec un ami qui incarnera Carver, un soldat d'élite à l'histoire tragique et au charisme inexistant. Notre rédaction a joué la partie en co-op, qui n'était finalement pas mal fichu, mais il faut bien admettre que cela a détruit le semblant d'atmosphère inquiétante qu'il restait.

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Isaac et Carver toujours prêts à s'amuser avec le moteur physique du jeu au milieu d'une apocalypse de zombies

Enfin, et c'est là le véritable sacrilège, le système d'armes a été entièrement repensé dans l'optique de permettre la construction et customisation d'armes. Ce système compliqué casse le rythme du récit et détruit l'immersion mais le pire reste qu'on comprend très vite la raison de son implémentation "forcée" : les microtransactions.

À chaque fois que le joueur revient au plan de travail, magasin du jeu, il nous est proposé d'acheter des éléments d'armes et des ressources en ligne avec de l'argent réel. Ce système, compréhensible dans un MMO persistant, est complètement et indéfendablement stupide dans une partie qui finit par se terminer. La mécanique, ajoutée sans réflexion, n'est clairement présente que pour récolter quelques euros de plus sur un jeu déjà vendu à 60€.

Je tiens à préciser que Dead Space 3 n'est pas un mauvais jeu, loin s'en faut. Pourtant, il se révèle frustrant et fade, affreusement fade. En essayant de toucher un public plus large, il a perdu toute son âme, toute sa personnalité, en bref tout ce qui faisait de la licence quelque chose d'unique. On se retrouve avec un soft graphique et fonctionnel mais perdu dans la masse des jeux d'action semblables les uns aux autres.

Et c'est là les deux problèmes principaux des jeux AAA en général :

1) Pour plaire au plus grand nombre, les éditeurs font parfois disparaître l'originalité du jeu. Cela le rend fonctionnel et ergonomique mais sans saveur. On rajoute des aspects classiques et on enlève certains qui pourraient ne pas plaire.

2) Une licence de niche est surbudgetée et lancée sur un marché qu'elle ne peut pas conquérir. En effet, Dead Space était un jeu de grande qualité dans sa catégorie avec une base de fans fidèle dans sa niche. Mais il n'était pas fait pour entrer sur le terrain des titres AAA et n'a évidemment pas vendu aussi bien que prévu par EA.

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EA : l'éditeur de jeux vidéos élu plus mauvaise entreprise des Etats Unis en 2013 (devant une compagnies pétrolière responsable d'une marée noire)

Les jeux AAA comptent évidemment parmi eux la plupart des meilleurs jeux de l'histoire du jeu vidéo mais aussi, et c'est malheureux, certains des plus décevants. Les jeux AAA peuvent être de véritables phénomènes qui révolutionnent le monde du gaming tout entier à l'image d'Half Life, GTA 3, Super Mario Bros. ou Zelda : Ocarina of Time mais toutes les licences n'ont pas cette légitimité.


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