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Art sacré du Tibet, à la Fondation Pierre Bergé – Yves Saint-Laurent (Paris 16)

Publié le 29 juillet 2013 par Carnetauxpetiteschoses @O_petiteschoses

Pour faire le voyage jusqu’au Tibet, deux rappels sont utiles pour bien appréhender l’art sacré. La première concerne le territoire en lui-même, et la seconde le bouddhisme dont nous essaierons de rendre compte en introduction.

Le Tibet est un vaste pays, qui s’étend sur 3 800 000 km² soit sept fois la France. Dans ce gigantesque territoire de haute montagne qui culmine en moyenne entre 3 000 et 4 000 mètres  jusqu’à dépasser les 5 000 mètres par plusieurs points, et atteignant même les 8 000 mètres. Seule la partie sud est habitée, et avant 1959, la population entre 3, 5 et 4 millions d’habitants se répartissait irrégulièrement sur le pays.
Le territoire est traversé par de nombreux cours d’eau, dont le fleuve Tsang-po qui le parcourt d’ouest en est, et se confond avec le Gange une fois passée l’Himalaya. On peut ainsi distinguer :
- le Tibet occidental qui se poursuit jusqu’au Kashmir historique que domine la montagne sacrée du Kailash
- le Tibet méridionnal, le plus riche, qui correspond à l’ancienne province du Tsang
- le Tibet central, plus à l’est, ancienne province du dBus où se trouve la capitale lHa-sa
- et le Tibet oriental quant à lui se trouve aux limites des provinces chinoises partagé entre l’A-mdo au Nord et le Khams au Sud.

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L’histoire du Tibet est concomitante de celle du bouddhisme. C’est le second point sur lequel nous devons nous pencher pour avoir quelques notions préalables pour appréhender l’exposition. Au VIIème, des princes originaires de la vallée du Yar-lung au Tibet Central vont unifier le pays et créer un puissant empire. Le bouddhisme apparait lui en Inde dans la seconde moitié du VIème siècle avant JC. Dérivant du brahmanisme, le bouddhisme se constitue rapidement en religion autonome. Elle est portée par Sakyamuni « Le Sage » du clan des Sakya devenu « Buddha ». Elle consiste à une vie monacale mais sans tomber dans l’ascèse excessive, permettant de se libérer du cycle des réincarnations. En tant que religion missionnaire, le bouddhisme a connu trois phases principales, dont la dernière nous intéresse plus particulièrement puisqu’elle concerne le Tibet :
- le bouddhisme ancien (qui subsiste en Asie du Sud-Est et au Sri Lanka),
- le bouddhisme du Grand Véhicule qui se forme aux environs du 1er siècle
- et le bouddhisme ésotérique qui apparait au VIIème siècle et qui rejoint le Tibet.
Il se caractérise par un profond respect des maîtres, et par une importance accordée aux rituels et aux divinités. Le panthéon religieux se hiérarchise en fonction des strates du monde, et l’on répartit les divinités en 5 grandes familles correspondant à 5 bouddhas transcendants (tathagata) en méditation perpétuelle.

Les dieux sont représentés dans des formes diverses, soit bienveillantes mais aussi dans des formes dites courroucées qui servent à dompter les forces de l’ignorance.

Nous pouvons voir une peinture narrative du 15ème siècle, représentant le Mandala les 5 tathagata.

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Il s’agit d’une peinture réalisée à l’époque moderne lorsque l’ancien petit royaume tibétain de Dol-po fait partie du Népal. Il faisait sans doute partie d’un plafond. Au centre, figure Vairocana, l’Illuminateur, dont on remarque la carnation blanche. Autour de lui se répartissent les quatre autres tathagata, c’est-à-dire les buddhas transcendantaux en méditation perpétuelle. En bas, correspondant à l’Est, on trouve Aksobhya, l’Inébranlable en bleu, qui prend la terre à témoin, puis en tournant vers la gauche, se tiennent au Sud, Ratnasambhava, « Né du joyau », jaune, faisant le geste de don, et à l’Ouest Amitabha, Eclat Infini, rouge en méditation, enfin au Nord, Amoghasiddhi, Réussite infaillible, vert, faisant le geste d’absence de crainte. Le cercle extérieur compte 32 médaillons de divinités.

tara la liberatrice
L’adoration est surtout tournée vers Sakyamuni, le buddha historique et Maitreya le buddha des temps futurs. On discerne également les bodhisattva, qui sont des êtres de pure spiritualité, possédant dix perfections et qui aident les dévots en leur servant d’exemple. Parmi eux, Avalokitesvara ou la déesse Tara. Les dieux tutélaires sont les personnifications des textes canoniques et sont représentées le plus souvent dans l’union avec leur partenaire. On compte parmi eux de nombreux dieux protecteurs, ici nous verrons la déesse dPal-Idan Lha-mo et le dieu Makala.

Dans l’histoire du Tibet, vers 779 le premier monastère bouddhique est érigé au Tibet, et la religion devient officielle.

Après l’assassinat du roi Glang-dar-ma (838-842), des troubles dynastiques et des querelles entre les bouddhistes et les partisans des cultes autochtones mettent fin à l’empire tibétain. Les bouddhistes sont persécutés et pour plus d’un siècle le Tibet sombre dans l’anarchie.

Le Kashmir et l’apogée du Tibet Occidental

Vers 866, un prince issu de la branche cadette de la famille royale, se réfugie au Tibet Occidental et il rassemble autour de la principauté de Gu-gee plusieurs petits royaumes. Ces bouddhistes veulent renouer avec les traditions du bouddhisme indien. Ainsi le plus fameux de leur rois, Ye-shes-od envoie de jeunes moines se former au Kashmir et en parallèle les monarques invitent à leur cour des maîtres indiens. L’art kaçmîrien influence beaucoup la production artistique du Tibet occidental jusqu’à former l’une des composantes de l’art tibétain ancien. On assiste alors à un renouveau du bouddhisme au milieu du XIème siècle qu’on appelle la « Seconde Prédication ».

Le buddha Sakyamuni (XVe) Le buddha est représenté entouré de deux hommes lui faisant des offrandes. A chaque époque cosmique un bouddha éveillé prêche comment échapper à la causalité universelle car celle-ci fait errer les créatures de réincarnation en réincarnation plus ou moins douloureuses.

Buddha Sakyamuni - XVe
Buddha Sakyamuni - Laiton incrusté d’argent Kasmir Première moitié du VIIIe siècle

Sakyamuni [Kasmir Première moitié du VIIIe siècle],  est ici vêtu comme un moine (vêtement de dessous et manteau), il porte les signes de la bouddhéité que son l’excroissance de la fontanelle au sommet du crane (usnisa) et une touffe de poils tourbillonnant en bas du front. (urna). Il expose pour la 1e fois sa doctrine à Sarnath près de Bénarès (en Inde). Il fait le geste de mettre en branle la Roue de la Loi bouddhique qui doit briser la roue de la causalité universelle.

Bouddha Maitreya : est un bodhisattva qui attend son ultime réincarnation. Bouddha des temps futurs, on dit qi’il apporte un âge d or. On le représente traditionnellement assis sur un siège élèvé, les jambes pendantes (attitude dite improprement à l’européenne). Il fait le geste de tourner la Roue de la Loi.

Episodes de vie de Sakyamuni

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Dans le jardin Lumbini nait le prince Siddhartha par le flanc droit de sa mère, la reine Maya. Les quatre rencontres qu’il fera (un vieillard, un malade, un mort et un religieux) [>> lien possible avec la conférence Dieu(x), mode d’emploi] après une jeunesse préservée, seront marquantes et le décideront à partir méditer sur le sens de la vie. Il s’enfuit du palais. Il envoie son écuyer Cha Daka porteur de ses bijoux et de son cheval. Deux bergers le taquinent durant son ascèse qui dure 6 ans. Les armées démoniques de Mara veulent le détourner de sa méditation. Il donne son premier sermon à Sarnath. Il multiplie ses images lors du miracle de Sravasti pour confondre les religieux hétérodoxes. Montée au ciel des 33 dieux où le bouddha prêchera à sa mère décédée et réincarnée en ce lieu.

Inde du Nord Est

L’art indien est une composante fondamentale de l’art tibétain. Entre 750 et 1200, sous les dynasties (vers 750-1162) et Sena (vers 1162-1200), le Bengale, le Bihar et le Nord-Est de la péninsule indienne, connaissent une période de paix et de prospérité. Les pèlerinages vers les lieux où vécu Sakyamuni renforcent les liens internationaux. De grandes universités attirent les étudiants et les maitres réputés qui viennent des régions les plus lointaines du monde bouddhique, comme de l’Indonésie ou de la Chine. La production artistique est abondante et s’inscrit dans la lignée de la tradition, notamment d’époque des Gupta (vers 320-647) âge d’or de la civilisation indienne.
Mais vers 1200, les royaumes indiens et les universités seront balayés par les invasions musulmanes. Des réfugiés gagneront l’Himalaya, en apportant des textes sacrés, des bronzes et des peintures.

Avokitesvara pensif
La statue du bodhisattva Avokitesvara pensif représente un jeune homme élégant dans une attitude de délassement. C’est une des figures du bouddhisme du Grand Véhicule puis du bouddhisme Esotérique. Rarement représenté dans cette attitude, il tient ici le lotus (padma) dans la main gauche. Assis sur un siège d’osier tressé, on distingue les mèches échappées de son chignon qui flottent sur ses épaules, et son pied gauche repose sur deux lotus placés sur le siège en repose-pieds. Le détail du corps est surprenant, car on distingue la délicatesse de la pose accentuée par le geste nonchalant de la main, ou par la musculature du personnage.

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Plus loin, dans le Modello du temple de Bodhgaya, il s’agit de la représentation du  plus célèbre temple bouddha construit au VIIe siècle et restauré à maintes reprises notamment par des souverains birmans. La tour curviligne (Sikhara) domine le sanctuaire. Sur la terrasse 4 petites tours la ceignent  et identifient symboliquement le monument à une montagne à 5 sommets (Pancayatana). Ces maquettes étaient souvent emportées par piété par les pèlerins, car c’est le lieu précis où  Sakyamuni a connu l’Eveil.

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La statue d’Acala sous son aspect Nila, représente le dieu dont le nom signifie « montagne » (désignant aussi l’immobilité par extension), considéré comme la forme farouche de Vairocana. Il gagne le Japon sous le nom de Fudo et conserve ses deux attributs fondamentaux : le glaive et la corde (pasa). Dans l’iconographie tibétaine il brandit son épée de la main droite et de la main gauche, il tient le lasso à la hauteur du cœur, tout en faisant le geste de menace (tarjani mudra).

Influence de l’Inde Pala

En Inde, l’art connait un rayonnement important. Terre sacrée, où vécu Sakyamuni, l’Inde influence beaucoup l’art tibétain. Entre 750 et 1162, au Nord Est,  elle est sous la domination de la dynastie des Pala. Ces derniers entretiennent des liens étroits dans les domaines religieux, politique, économique, avec les pays étrangers, et contribuent au rayonnement important de leur pays en Asie. Au Tibet, leur apport a été profond. L’art pictural ou la sculpture portent les caractéristiques ou les motifs de cette esthétique particulière. Au fil des années, ces éléments s’aplanissent, jusqu’à se mêler avec les traditions kaçmîrienne et népalaise, donnant alors naissance à une esthétique proprement tibétaine.

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Les Saintes Empreintes présentées en grisaille, renvoie au culte ancien des empreintes de Buddha. Elles sont vénérées comme étant le signe de boddhéité. Ici elles sont d’une admirable précision, les motifs sont tracés à l’encre et aux pigments sur du coton.

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Dans la peinture représentant le bodhisattva Vajrapani sous forme courroucée, nous le percevons comme étant le porteur de foudre, il est ventripotent et il affiche un visage fâché. Son épiderme est bleu, et ses reins ceints d’une peau de tigre. Dans cette peinture il s’élance, brandissant son vajra éponyme, tandis que sa main tient une clochette. Il est parfois considéré comme une simple forme Sakra, qui est une manifestation d’Indra. Sur les côtés, on distingue des divinité secondaires ainsi que dans le brasier.

Le Népal

Les Newars qui sont les habitants traditionnels de la vallée de Kathmandu, développent une culture brillante très influencée par la civilisation indienne. Le Bouddhisme est présent depuis longtemps et il connait des développements importants. Sous la dynastie des Licchavi (vers 350-750) les caractéristiques de l’art Gupta deviendront un art national, et sera conservé pendant le règne des « Thakuri » (vers 750 – 1200) et à l’époque du Malla ancien (1200 – 1482).

Kubera ou Jambhala
Kubera ou Jambhala, la déité était un sylvain que la tradition indienne représentait le plus souvent comme un nain replet.  Cette statuette est caractéristique de l’art newar. Des mines de cuivre d’une grande pureté existent sur la route de Kathmandu, et les newars privilégieront ce matériau pour leurs sculptures. On remarque aussi le grand nombre de bijoux arboré par la divinité, qui s’ornent en plus de pierres fines.

Rakta Yamari
Rakta Yamari, Yamantaka est le dieu destructeur du dieu de la mort, Yama, et l’on peut l’identifier par sa tête de buffle.  C’est une déité protectrice, attestant de la victoire de la vie spirituelle sur le dieu de la mort. Il possède plusieurs aspects, ici on remarque sa face trioculaire, sa bouche béante et ses crocs découverts. Sa langue est dardée et ses cheveux rouges sont hérisses. Il porte un vêtement fait de peaux de tigre et de parures de serpent. Il foule aux pieds un buffle symbole de Yama. Il brandit un bâton surmonté d’une tête de mort (yamadanda). De la main gauche il tient une coupe crânienne remplie de sang. Il est tenu embrassé par sa compagne la déesse Svabha-Prajna.

Royaume des khasa malla.

Depuis à peu près 20 ans, la région de la Karnali où se trouvait un grand royaume, et dont la capitale était Semja (Jumla). Entre le milieu du 12ème siècle et le 14ème siècle, il s’étendait sur tout l’ouest du Népal moderne et une partie du Tibet Occidental, l’un de ses souverains les plus glorieux réussit à conduire ses armées jusqu’aux confins de la péninsule indienne. Dans la vallée de Kathmandu, apparait alors un art original.

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Tara sous aspect Sita, La déesse Tara a le rang de bodhisattva. Elle aide les dévots à traverser le monde de douleurs. Elle répand de sa main droite ses dons matériels et spirituels. C’est une belle jeune fille. C’est la contrepartie féminine d’Avalokitesvara elle tient comme lui la tige d’un lotus blanc qui fleurit à la hauteur de l’épaule. Ici représentée sous forme de « Tara blanche » (Sita Tara) elle est entourée par deux donateurs, Ripumalla l’un des grands souverains du royaume Khasa, et un de ses fils. Le style de la peinture est très fortement influencé par l’art newar, si bien qu’on pourrait penser à un artiste newar employé par les Khasa Malla.

Influences Népalaises.

La production tibétaine est durablement influencée par l’art du Népal, raffiné et virtuose. A partir du 13ème siècle, l’art newar rayonne jusqu’à la cour chinoise des empereurs mongols de la dynastie des Yuan (1279-1368).
L’ordre des Sa-skya-pa contribue largement à cette influence par la commande de grands décors monumentaux et la réalisation de nombreuses œuvres portatives. Beaucoup d’entre eux ont disparu, mais les textes nous renseignent sur le plus célèbre d’entre eux : le décor de la salle d’assemblée du Ngor, monastère dédicacé en 1429. Les peintures murales ont pour sujets 45 mandala de la tradition ésotérique indienne. De nombreux thang-ka de style similaires sont reporduits également.

Cette esthétique d’origine étrangère a été propagée par d’autres écoles monastiques. Les peintures « népalisantes » mettent en présence des motifs caractéristiques de l’art newar : pilastres ornementés, joaillerie particulière, larges crosses de lotus plus ou moins déchiquetées… Malgré l’absence de date, il est possible d’y voir une certaine évolution. Le 15ème et le 16ème siècle marquent l’apogée de ce style. Les bronziers, les dinandiers et les peintres du Népal vont être employés sur les chantiers du Tibet et le Vème Dalaï-Lama leur accorde un statut juridique particulier que leurs descendants (urha) même nés de mère tibétaine pourront conserver.

Dieu tutélaire Samvara, le Dieu à la peau bleue se trouve au centre de la composition, déployant ses 4 faces et ses 12 bras. De ses mains droites il brandit, le « foudre-diamant », le trident, le couperet, la hanche, le tambour-sablier à boules fouettantes, et la peau d’éléphant. De ses mains gauches, il tient la clochette, les têtes coupées du dieu Brahma, la corde et la coupe crânienne remplie de sang, le sceptre tantrique et de l’autre extrémité la peau d’éléphant. Il enlace sa compagne Vajravarahi, à la peau rouge. Des formes secondaires de la déité et des divinités gardiennes occupent les parties latérales et le registre inférieur.

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Le mandala de Hevajra : Bon nombre de destructions ont fait disparaitre les mandala peints dans le style népalais, sur les parois des chapelles. Dans ce très beau mandala, on distingue Hevajra qui danse au centre de la peinture,  enlacé de la déesse Nairatmya. Autour sur les pétales de lotus danse l’une des huit Dakini, déesses farouches et féeriques qui sont les suivantes de la déesse Nairatmya.  Les mandalas des divinités à l’aspect courroucé possèdent un cercle de plus figurant huit charniers mythiques dans lesquels les saints hommes doivent annihiler leurs passions. L’organisation du dessin, l’harmonie du bleu et du rouge, les pointes d’or évoquent la peinture newari de la fin du 14ème et du début du 15ème siècle.
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Mandala des Pancaraksa, Les mandalas sont des diagrammes très précis, constituant le palais céleste d’une divinité. Les mandalas sont liés à des rituels d’initiation et ils servent aussi de supports à la méditation. Les Pancaraksa, les « Cinq protections » sont des formules sacrées dont la récitation protège de divers dangers. Ici trône Mahapratisara, au centre de la toile, au cœur d’un lotus épanoui, elle est de couleur claire à trois faces et à six mains. Cette déesse préserve du pêché et de la maladie. Tout autour sont les déités de sa suite sur des pétales de la fleur centrale ou reparties dans des galeries. Une ou plusieurs enceintes percées de 4 portes sont représentées à la fois en plan et en élévation. Des cercles de protection protègent l’espace sacré : lotus foudre-diamants et flammes. Dans le registre supérieur de gauche à droite on reconnait Sakyamuni ou Jambhala.

Sculptures en cuivre doré

Dans cette section les sculptures qui sont présentées ont été faites en cuivre, le matériau de prédilection newar. On note une belle dorure, avec des incrustations de pierres fines, souvent des turquoises, et des ciselures délicates.

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La déesse Vajravarahi, (cuivre doré incrusté de turquoises) appelée la « laie adamantine » est la parèdre du dieu tutélaire Samvara. Les images représentent souvent une petite tête de laie au niveau de la carotide ou au sommet du crane. Quand elle n’est pas accouplée au Dieu, elle danse le pied droit levé paré d’un collier de têtes coupées en brandissant le couperet pour trancher les scalps des ennemis de la religion. Le sang est recueilli dans une coupe tenue par la main gauche ramenée devant la poitrine. Dans la saignée du coude gauche, elle tient un sceptre tantrique. A son pied gauche, elle écrase une déité hindoue symbolisant le triomphe du bouddhisme sur les autres religions brahmaniques. Une des statues la présente fortement déhanchée évoquant une danse frénétique.

Les dieux tutélaires sont des personnifications de systèmes philosophiques liés à des rituels qui sont des aides sur le chemin de l’éveil. L’iconographie est complexe, car les attributs sont variés et sont le plus souvent des armes pour combattre les forces de l’ignorance : coupes crâniennes, et joaillerie macabre représentent autant d’éléments participant à la quête de la libération du cycle de la causalité universelle.

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Samvara et Hevajra sont les aspects d’une même divinité, Heruka. Le premier a pour épouse la déesse Vajravarahi, tandis qu’Hevajra est souvent représenté accouplé à la déesse Nairatmya. Sous son aspect Kapaladhara, il possède 8 faces 16 bras et 4 pieds. Ses mains portent des calottes crâniennes (kapala).

Un peu plus loin, une section est réservée aux sculptures en laiton, qui sont elles, dénuées de tout ornement de surface, à l’exception d’incrustations de cuivre rouge, d’argent et plus rarement d’or. Les sources sont multiples : kaçmîrienne et pala principalement.

Empreinte chinoise.

L’empereur Khubilaï (1216-1294) de la dynastie mongole des Yuan (1279-1368) se convertit au bouddhisme tibétain et initie une politique de collaboration étroite avec les Sa-skya-pa.

En 1260, il déclare le bouddhisme religion officielle, et cela perdurera jusqu’en 1911 à la chute de l’empire. Les relations entre les empereurs, et le souhait de renouer avec une forme de mécénat, forment une influence mutuelle entre l’art tibétain et l’art traditionnel chinois qui est encore mal connue.

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Mi-la ras-pa par Chos-dbyings rdo-rje 15e,  est une peinture faite par le Xème Karma-pa lors de son long exil dans la province du Yunnan alors qu’il était proscrit par le Vème Dala -Lama. Sakyamuni n’est pas entouré par ses disciples préfèrés : Sariputra et Maudgalyana mais par Ananda et Kasyapa. Ces deux religieux furent choisis parmi les disciples pour écouter le prêche du sutra du lotus de la bonne loi sur le pic des vautours près de Rajagrha. Destinée à un contexte chinois,  les divinités secondaires musiciennes à corps d’oiseau sont traitées en camaïeu dans l’arbre au dessus du bouddha Kimara. Les musiciens et autres personnages n’ont rien de tibétains.

Fascinée par cet art, j’ai vraiment beaucoup aimé cette exposition désormais terminée.

Fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent
3 rue Léonce Reynaud
75116 Paris

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