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Pologne : main basse de l’État sur les fonds de pension privés

Publié le 07 septembre 2013 par Copeau @Contrepoints

Donald Tusk a décidé de nationaliser les fonds de pensions privés pour réduire la dette publique. Les fonds accumulés sur des comptes privés depuis 1999 seront transférés vers les fonds de retraites publics. Il s'agit de facto d'une nationalisation de l’épargne privée pour financer le paiement des retraites actuelles.

Par la rédaction de Contrepoints.

Pologne : main basse de l’État sur les fonds de pension privés

Donald Tusk et son ministre des Finances Jacek Rostowski ont pris la décision de nationaliser les fonds de pension privés connus sous le nom de OFE en Pologne (Otwarty Fundusz Emerytalny) en les transférant dans le fonds public ZUS, organisme d’État qui verse les pensions et retraites. Avec des ventes massives d’actions, l’indice des vingt valeurs vedettes de Warsaw Stock Exchange (WSE), la principale place boursière en Europe centrale, a chuté de 4,63% jeudi, après avoir déjà perdu 2,49% mercredi.

Début juillet, au moment de l’annonce de trois variantes de la réforme des OFE, Tusk avait déjà suscité beaucoup d’inquiétudes parmi ses adeptes qui pour la plupart, malgré tout, croyait à une transformation en douceur du système de retraites. En définitive, c’est bien au transfert de fonds accumulés sur des comptes privés depuis 1999 vers le fonds de retraites publics que l’on va assister et donc à une nationalisation de facto d’épargne privée pour financer le paiement des retraites actuelles. Cela ne solutionne en rien les problèmes du système de retraite. Le ZUS est un puits sans fonds et les 270 milliards de złoty (65 milliards d’euros) en provenance des OFE ne feront que retarder la chute d’un organisme dont l’endettement est endémique.

En conférence de presse hier soir, le ministre des Finances a déclaré que le budget pour l’année prochaine prévoit déjà les changements dans les OFE, que le gouvernement planifie d’intégrer dans le courant de l’année 2014 c'est-à-dire le transfert de la partie obligataire entre le 1er et 2ème trimestre et le transfert des montants résultant de la décision par les épargnants (ou non décision car ceux-ci ont trois mois pour déclarer qu’ils souhaitent conserver leurs fonds en l’état) d’être totalement dépendants du ZUS qui « devrait survenir entre le 2ème et 3ème trimestre 2014 » selon Rostowski.

Le Ministre a également déclaré sa conviction que le transfert de la partie obligataire de l’OFE vers le ZUS est parfaitement constitutionnel. Il a souligné que des constitutionnalistes jugent que la construction du deuxième pilier (OFE) en 1999 était non constitutionnelle. « S’il [le transfert] devait passer devant le Tribunal constitutionnel, je prévois, en observant la situation au Parlement, que diverses plaintes peuvent apparaître, pas seulement sur notre proposition, mais également sur la construction initiale du système », a commenté Rostowski.

Rostowski a également dit que le flux d’investissement par l’OFE sur le marché des capitaux pouvait provoquer une baisse du prix des actions de certaines compagnies. D’où la réaction des marchés « assez surprenante » ce jeudi, a-t-il déclaré en faisant allusion à la baisse brutale de la bourse de Varsovie. Il a observé que la situation s’est stabilisée vendredi, ce qui prouve que certains investisseurs jugeaient ce marché « artificiellement gonflé ».

En réponse à la déclaration de l’ancien Premier ministre Jerzy Busk et de l’ancien Vice-Premier ministre Jerzy Hausner qui jugent que les propositions du gouvernement n’assurent pas une amélioration durable de l’état des finances publiques, ni la sécurité économique des assurés, Tusk a déclaré qu’ils croient que les OFE ont un impact important et positif  sur l’économie principalement par le soutien au marché des capitaux.

« Mais Rostowski et moi-même, ainsi que le gouvernement avons une autre manière de voir les choses » a déclaré Tusk. Il a ajouté que le marché des capitaux ne devrait pas être soutenu par l’argent des contribuables. « Comme nous jugeons également que les fonds de retraite ne devraient pas être soumis aux risques boursiers. Si quelqu’un souhaite jouer en bourse, si quelqu’un souhaite assurer son avenir, par exemple sa vie de retraité, en bourse, il devrait le faire à son propre compte. C’est ce que nous pensons et c’est la raison de la liberté de choix », a souligné le chef du gouvernement.

Beaucoup d’observateurs sont convaincus que peu de gens prendront l’initiative de déclarer leur choix de conserver leurs fonds dans les organismes de pension privés.

Cette expropriation des retraites privées est loin d’être une première historique. Ainsi, les retraites accumulées par capitalisation furent utilisées par le régime de Vichy et le Maréchal Pétain pour lancer la répartition. Plus récemment, le gouvernement de centre-droit hongrois a nationalisé des actifs de retraites pour équilibrer le budget après les élections d'avril 2010. Si les citoyens avaient en théorie la liberté de rester fidèles aux caisses privées, l'État hongrois avait pris des mesures faisant en sorte que ceux qui optaient pour ce choix perdraient dans les faits tous leurs droits à la retraite d'État et en plus devraient continuer à verser des cotisations au système public.


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