Test : Ultrasone Signature Pro

La rencontre

Un lieu bien connu. Une odeur persistante d’arachide mêlée au bourdonnement incessant de cadres en costumes. Au milieu de ces vapeurs presque exotiques, une table dissimulée aux yeux de tous dans une pénombre artificielle. Deux complices rapidement identifiés. Plus la peine de se saluer, le rituel n’exige même plus d’introduction.

La vapeur du wok ne masquera pas longtemps l’objet de ces retrouvailles programmées : un étui relativement discret (sommaire ?) trône tel un invité absent sur la place libre, abritant pourtant le sujet du moment : un casque fermé répondant au nom d’Ultrasone Signature Pro.

La mission parait évidente : faire parler le sujet, et pas uniquement en allemand. Ca tombe bien, chez TupperWav, nous afons les moyens dé fou faire parler (il fallait bien la faire un jour).

Tout en discrétion

Terminée l’intro façon polar de seconde zone, on attaque directement par la présentation du casque. Son (tout) petit frère, le HFI-780 avait déjà été testé sur TupperWav, tout comme les derniers intras de la marque, les Tio et IQ : plus la peine donc de revenir sur l’histoire de la marque Ultrasone.

On commence donc par le premier contact avec la bête : un étui assez simple, peut être trop pour un premier contact avec un objet avoisinant les 900€. Il n’en restera pas moins efficace pour protéger des chocs et rayures, mais il ressemble fortement à ce que des casques à 100-200 euros peuvent proposer. Toujours est-il qu’il protège bien l’ensemble, c’est ce qu’on lui demande.

On compare rapidement les packaging de 2 autres marques allemandes, histoire de voir si c’est un trait partagé : Beyerdynamic (pour le T70p) et Sennheiser (pour le HD800).

• Beyerdynamic T70p

• Sennheiser HD800

La réponse est claire : non. Le Beyerdynamic T70p, pourtant un bon cran (tarifaire) en dessous, propose un étui plus consistant malgré un positionnement nomade.

Le Sennheiser HD800 est mieux loti (mais plus cher) avec son coffret sobre mais tout à fait cohérent avec le positionnement du casque, au dessus des 1000 euros.

Pour en revenir à l’Ultrasone Signature Pro, son étui contient le casque ainsi que 2 jeux de câbles : l’un avec jack de 3,5mm (classique) et l’autre avec un jack de 6,35mm. Vous l’aurez compris le câble est détachable, ce qui est un très bon point, presque attendu ceci dit compte tenu du prix de l’ensemble.

Furtif et costaud à la fois

L’Ultrasone Signature Pro n’est pas le plus beau casque de la gamme (avis tout à fait personnel) mais il parait solidement construit et bien fini. Le plastique noir mat n’affiche pas ostensiblement le prix dont il faudra s’acquérir pour pouvoir le chausser, mais c’est plutôt une bonne nouvelle. Son objectif affiché est de pouvoir s’utiliser sur une multitude de sources, ce qui implique une utilisation nomade pour laquelle un peu de discrétion est bienvenue.

De même pour une utilisation professionnelle : le casque de la marque allemande affiche ses ambitions et semble vouloir être jugé sur la partie sonore uniquement. Pourquoi pas, et si le constructeur aurait malgré tout pu s’inspirer un peu plus de son Edition 10, la vocation du Signature Pro semble un peu différente de son grand frère.

Le cuir de chèvre d’Ethiopie (rien que ça) assure enfin une isolation assez moyenne mais un confort appréciable.

Place donc à la partie sonore, puisque la forme ne nous en apprendra pas beaucoup plus.

La salle d’interrogatoire

Un point rapide sur les éléments qui ont permis de tester l’Ultrasone Signature Pro :

• Sources : Platine CD Denon DCD-1560 – Macbook Air & Audirvana+ (fichiers lossless)
• Amplificateurs : Intégré Denon DCD-1560 – Trafomatic Experience Head One – Beyerdynamic A1

En complément (et puisqu’on est plutôt sympas), vous aurez le droit à des comparatifs avec le Sennheiser HD800 et le Beyerdynamic T70p. De quoi se faire une idée assez précise de ce que le casque allemand a dans le ventre, face à des concurrents bien différents.

1. L’Ultrasone toujours 2 ou 3 fois.

Le casque de la marque allemande sera donc testé sur 2 amplificateurs dédiés, ainsi que sur la sortie de la platine CD : de quoi juger de sa capacité à « réagir » en fonction de la puissance délivrée.

Place à la liste des morceaux utilisés pour tester ce dernier : principalement du rock et de l’électro, mais pour le classique et le jazz, vous irez vous plaindre à Olivier. Il connait mieux ce rayon que moi.

C’est parti !

Attaquons la partie audio avec un essai du Signature Pro directement sur l’ampli intégré de la valeureuse Denon DCD-1560, une mamie qui envoie toujours des claques avec la même fraîcheur. Les volumes de tous les amplis ont au passage été réglés sur les mêmes niveaux, histoire de ne pas fausser les impressions.

Porcupine Tree – In Absentia

• Amplificateur intégré de la Denon DCD-1560

Ca démarre pas trop mal en ce qui concerne le titre « The Sound of Muzak » (que j’utilise régulièrement), même si l’on reconnait la signature de la marque allemande aux premières notes : ça tape très fort dans le bas du spectre, chaque coup de grosse caisse se ressent « physiquement ». On a un peu l’impression d’avoir l’oreille dessus au fur et à mesure que le morceau se prolonge, et les premières limites du casque se font ressentir rapidement.

Tout ça n’est pas extrêmement propre ni bien maîtrisé. La basse, lorsqu’elle démarre, vient ajouter à cette impression de « gras », largement soulignée par des mediums (les voix) en retrait. On le savait avant de commencer l’interrogatoire, c’est la signature en V caractéristique d’Ultrasone, que l’on retrouve aussi sur l’Edition 9 de mémoire, seul l’Edition 10 me paraissant à part.

Un peu pataud donc dans le bas du spectre, mais la profondeur des basses semble cacher quelque chose. A tous les coups, un peu de jus en plus permettrait de les rendre plus tendues. On verra plus tard si cette hypothèse se confirme : toujours est-il que sur cette source et cet amplificateur, le morceau est bien trop mollasson. Les aigus sont assez mal définis et ne compensent pas du tout des basses paresseuses qui gâchent le message.

Tout ça manque de finesse et de précision. On débranche, et on passe sur la centrale nucléaire qu’est le Trafomatic Experience Head One.

• Trafomatic Experience Head One

L’amplificateur permet 3 réglages d’impédance (30/100/300 ohms). Celle de l’Ultrasone Signature Pro étant de 32 ohms, on reste sur le premier cran.

C’est tout de suite mieux, et cela vient confirmer mes impressions précédentes : avec un peu plus de jus, les basses se tendent et rebondissent bien plus facilement. Ca tape toujours aussi fort dans le bas du spectre, mais le Trafomatic parvient à rétablir un équilibre avec des aigus bien mieux définis.

Il ne pourra en revanche rien faire pour les mediums, toujours un peu en retrait, et s’il élargit un tout petit peu la scène sonore, ça reste trop timide pour en faire une qualité de l’allemand. En tout cas c’est largement rassurant : on tombe désormais dans une préférence en terme de signature sonore (qui n’est pas la mienne pour le coup), mais plus dans un déséquilibre flagrant.

Les amateurs de casques avec de solides fondations seront ravis, s’ils ont l’opportunité d’apporter un peu de puissance supplémentaire à un casque qui semblait au départ plus polyvalent. Un (très) bon combo donc jusque là, qui cumule dynamique et tension, et améliore grandement le rendu global.

• Beyerdynamic A1

Une impression de retour à la case départ, confirmée par un switch rapide entre l’amplificateur intégré à la platine CD et le Beyerdynamic. Aucun gain notable, on prend les mêmes et on recommence : gras, mou, aigus sales. Sympathique.

On ne va pas faire long : les 2 amplis se ressemblent, et le Beyerdynamic n’apporte pas le gain espéré. Il copie ce que l’on entend sur la Denon, ni plus ni moins : après quelques écoutes, je me demande même s’il ne vient pas perfuser un peu plus le bas du spectre qui n’en avait vraiment pas besoin.

Une mauvaise association en somme, que l’on résumera élégamment comme ceci : « c’est pas parcequ’on porte tous les deux la moustache et la coupe mulet qu’on doit être copains. »

Daft Punk – Random Access Memories

• Amplificateur intégré de la Denon DCD-1560

On part sur un « Get Lucky » entendu jusqu’à satiété cet été, et donc a priori bien gravé en mémoire. Du coup, cela ne prendra que quelques instants pour déceler le problème : ce n’est plus gras dans le bas du spectre, c’est carrément obèse. La basse prend le pas sur à peu près tout le message, même si les mediums arrivent quand même à émerger. Quant aux aigus, appelez les secours, ils ont disparu.

On aurait pu s’arrêter à ce premier constat, mais en écoutant un peu longuement le morceau (et l’album), j’ai pris conscience d’une chose : l’allemand, sous ses apparences un peu rudes et sa grosse voix, semble cacher une sensibilité qui peut intriguer. Deuxième hypothèse du test donc : il est particulièrement sensible à l’amplification, mais aussi au mixage de l’album. Le disque précédent (Porcupine Tree) était peut être plus clair (ou « bright ») à ce niveau, là où l’album des Daft Punk est peut être plus sombre, ou simplement flat (ce dont je doute quand même, la mode étant aux basses hypertrophiées).

On ne s’arrête donc pas sur cette impression, mais en tout cas, l’Ultrasone révèle une fois de plus des basses dantesques, plutôt bien texturées mais traînantes si elles ne sont pas maîtrisées. Avec un peu de chance le Trafomatic va (à nouveau) remettre les choses en place.

• Trafomatic Experience Head One

Encore une fois, on gagne un bon cran en terme de définition, de maîtrise et de tension. Encore merci Olivier pour le prêt, qui risque de se transformer rapidement en vol si le Trafomatic persiste à sublimer les casques.

C’était presque attendu après l’essai sur Porcupine Tree, et c’est confirmé : l’amplificateur rééquilibre le tout, en tendant les basses comme jamais, et en révélant des aigus que l’on perd rapidement de vue sur les autres configurations. Cette fois, la charleston ressort clairement, c’est presque étonnant lorsque l’on vient de la Denon et du A1, sur lequels on l’avait oubliée.

Le message est dans l’ensemble beaucoup plus digeste, le Signature Pro se laisse écouter et ne semble plus traîner avec lui un excédent de gras bien désagréable après quelques morceaux. Le bas du spectre donne au contraire envie de bouger et l’ensemble du message apparait comme dynamique.

Le Trafomatic révèle la boule de nerf qui sommeille au fond du casque : plus d’entraves, ce dernier lâche tout ce qu’il a dans le ventre et c’est tant mieux. On attendait que ça.

• Beyerdynamic A1

Un léger gain cette fois lorsque l’on compare avec la sortie de la Denon. C’est un peu mieux maîtrisé, et cela confirme ma première impression : le A1 ajoute encore un peu de texture aux basses.

Dommage qu’il n ‘y ajoute pas plus de maîtrise comme le Trafomatic a su le faire, car cette fois les basses descendent bien bas, et si elles bavent encore un peu, elles pourraient tout à fait plaire aux bass-heads. C’est presque abyssale, et à fort volume, assez impressionnant de définition.

Pas la meilleure association encore une fois, mais c’est déjà un léger cran au dessus de la Denon. Pour mes goûts personnels, ça reste bien trop gras et pas assez percutant, mais la faute n’en revient pas qu’au casque ou à l’ampli : le mixage de l’album des Daft Punk me parait au moins aussi fautif.

Opeth – Watershed

• Amplificateur intégré de la Denon DCD-1560

On partira sur le titre « The Lotus Eater » pour se faire une idée, avec ses blasts dantesques et sa rythmique plus que nerveuse. Et ça commence excessivement bien : la double pédale se détache avec surprise, elle claque et s’en trouve particulièrement bien définie. On se dit rapidement que l’allemand est clairement à l’aise sur ce style, et ça n’en finit pas de se confirmer

Peut être est-ce du à un enregistrement plutôt bright comme suggéré précédemment (c’est souvent le cas sur les enregistrement de metal), mais le résultat est là : les basses ne traînent pas, les aigus sont bien rendus sans être sibilants, et les voix sont à leur place. Un vrai bonheur.

J’en arrive presque à redouter la confrontation avec le Trafomatic, si déjà le rendu est aussi bon sur la Denon. Les amateurs de metal devraient donc suivre avec avidité les prochaines impressions, parceque ça commence déjà très fort.

• Trafomatic Experience Head One

Etonnant, mais cette fois l’amplificateur ne transcende pas le rendu en comparaison de la platine CD. Il vient tout de même ramener à la vie des aigus qui s’étaient égarés, et ajoute cette fameuse tension dans le bas du spectre. Bien évidemment, tout s’en trouve « encore » plus digeste, mais on touche à un gain qui ne mérite peut être pas l’investissement nécessaire.

Ceci dit, puisqu’il est possible d’en profiter, je ne vais pas me priver : encore une fois, les chevaux sont lâchés et ils cavalent comme si leur vie en dépendait. L’Ultrasone Signature Pro est (presque) définitivement un casque taillé pour le metal, où il navigue avec une aisance assez remarquable. Associé à des enregistrements qui n’amplifient pas de base son bas du spectre, il fait des merveilles.

Allez, encore quelques minutes pour profiter de ce petit solo de batterie qui groove comme il faut, et on passe à autre chose. C’est vraiment parceque c’est vous, sinon le test se serait terminé à la fin de cette phrase.

• Beyerdynamic A1

Premiers instants, et on se dit « bof ». Pratiquement aucun gain notable avec la Denon (déjà excellente) : ça envoie toujours autant, même s’il manque le raffinement aperçu avec le Trafomatic.

Même si l’on note des fondations encore plus présentes, et toujours aussi « coup de pied au cul », le gain ne justifie pas forcément l’ajout d’un amplificateur à la platine CD. Le Beyerdynamic n’apporte pas grand chose, mais ne détériore pas non plus le message en l’alourdissant. Une association assez transparente, et donc peu utile selon moi.

Vitalic – Flashmob

• Amplificateur intégré de la Denon DCD-1560

On attaque cette dernière phase du test avec un morceau issu de l’album Flashmob de Vitalic : « Terminateur Benelux ». Dès les premières secondes, on sent qu’on va être secoués dans tous les sens. La basse saturée, similaire à la montée d’un grand huit, annonce de manière à peine voilée ce que l’on risque de se prendre dans la tête lors de la descente.

Quand cette dernière arrive, une nouvelle confirmation apparait : l’Ultrasone est décidemment très à l’aise avec les genre bien énergiques et nécessitant une assise de qualité. Les deux premiers albums testés devaient être mixés trop timidement pour lui à n’en pas douter.

Sur l’album du DJ français en revanche, ça envoie du très lourd : les basses abyssales transforment rapidement l’expérience en dancefloor auditif. Ca cogne, rebondit, on se croirait presque sur un démonstration live et collé à 2cm de l’enceinte. Bref, une belle claque qui démontre l’aisance du casque allemand avec des styles qui demandent de montrer les muscles.

• Trafomatic Experience Head One

Sur ce type de musique (du moins sur le morceau utilisé jusque là), le Trafomatic ne brille pas forcément et c’est une première. S’il ne dégrade en rien le message, il n’apporte tout simplement pas grand chose.

Au final, l’Ultrasone semble nécessiter une amplification de qualité pour les styles sur lesquels il n’est pas très à l’aise de base. Je n’ai pas eu l’occasion de confirmer cette impression sur du Jazz ou du Classique, mais je doute me tromper de beaucoup. Le Signature Pro est tellement à l’aise sur des style qui envoient qu’un ajout de puissance est dispensable.

En revanche, il perd beaucoup en définition sur des morceaux ou styles plus complexes. En l’état, et sur de l’électro, Nicky Ultrasone ne craint personne.

• Beyerdynamic A1

Comme c’est le cas depuis le début de ce test, on s’attardera finalement assez peu longtemps sur l’association de l’Ultrasone Signature Pro avec le Beyerdyanmic A1. Rien de transcendant, mais surtout le gain depuis la Denon n’est pas clair.

Il n’y avait pas besoin d’en rajouter, le bas du spectre répondait déjà présent sans que l’on ait besoin de lui filer un coup de main. Bref, merci l’ami, mais on se passera de toi.

2. Face à face entre camarades

Même s’ils boxent dans des catégories différentes, comparons rapidement l’Ultrasone Signature Pro à deux de ses camarades allemands eux aussi : le Beyerdynamic T70p et le Sennheiser HD800.

Les morceaux utilisés piocheront dans les albums cités pour le test, de manière assez aléatoire, afin d’en ressortir une impression globale valable sur des genres différents. Pour l’amplificateur utilisé, on restera sur le Trafomatic Experience Head One : si vous n’avez pas zappé le début du test, vous comprendrez ce choix.

• Ultrasone Signature Pro vs Beyerdynamic T70p

Le Beyerdynamic T70p possède de base une signature très différente, bien plus analytique voire sèche suivant l’amplification utilisée. Beaucoup regretteront des basses inexistantes au départ, mais c’est mal connaître l’engin. Bien amplifié, il se transforme littéralement, et puisqu’il est couplé au Trafomatic pour ce comparatif, aucun soucis à se faire de ce côté là.

Le constat est un peu dur pour l’Ultrasone Signature Pro, coutant près de 2 fois le prix du Beyerdynamic, mais ce dernier n’a clairement pas à rougir. Plus mesuré dans le bas du spectre, il s’offre le luxe de présenter une scène bien plus large, et surtout des aigus sans commune mesure. Ces derniers, beaucoup plus détaillés, rendent totalement hommage au morceau écouté.

Le bas du spectre n’est pas en reste, beaucoup plus à sa place et mesuré, il sera peut être un poil léger pour les bass-heads. C’est le prix à payer pour avoir des mediums d’une qualité superbe, et une tension qui ferait rougir n’importe quel casque plus haut de gamme.

Il faut bien sûr prendre en compte les préférences de signature de chacun, et celle du Beyerdynamic fait clairement partie de mes préférées : j’ai le sentiment qu’il délivre un message beaucoup plus cohérent et lumineux, moins fatigant sur le long terme. Le confort est également en faveur du T70p, au détriment d’une isolation presque nulle (pour un fermé).

Les détails sont plus facilement décelables avec le Beyerdynamic, mais l’ensemble mériterait parfois une assise plus rentre-dedans. Beaucoup plus fidèle mais parfois moins fun que le Signature Pro donc, c’est une question de goût. Pour ma part, ma préférence va clairement au T70p, capable de par sa tension et sa rapidité de restituer un message beaucoup plus propre, et des transitions sans faille. Nulle doute ne revanche qu’il paraitrait un peu fade à côté de l’Ultrasone, plus musclé sur du métal ou de l’électro.

N’allez pas croire pour autant que le T70p manque de basses, au contraire une fois qu’il est bien amplifié. Elles sont beaucoup plus tendues, mais moins enveloppantes que celles de l’Ultrasone. Il me parait donc plus équilibré au global, et colore moins le message.

Verdict : je donne le Beyerdynamic T70p gagnant sur ce coup, question de préférence personnelle.

• Ultrasone Signature Pro vs Sennheiser HD800

On passe cette fois sur un casque totalement ouvert, le fleuron de la marque Sennheiser. L’ouverture se ressent immédiatement : sans rentrer dans un test du HD800, il m’a toujours donné l’impression d’avoir été conçu en oubliant le bas du spectre.

Heureusement pour nous, le Trafomatic arrive là encore à sublimer l’ensemble, apportant une assise jamais vue à ce casque, qui bénéficie déjà (de par sa conception ouverte ?) d’une scène sonore exceptionnelle et d’aigus tout simplement magistraux. Autant vous dire qu’avec ce complément de basses bienvenu, c’est une énorme claque.

La résolution de l’ensemble, le détail et la vitesse du HD800 sont remarquables, et le Trafomatic parvient à lever le fameux voile Sennheiser sur les mediums. Vous l’aurez compris, face au Signature Pro, c’est une énorme gifle, alliant maîtrise et rapidité.

En totale opposition au côté un peu plus sombre, voire intimiste (plus logique pour un casque fermé) de l’Ultrasone, le Sennheiser HD800 couplé au Trafomatic envoie du bois comme jamais, quel que soit l’enregistrement qui lui sera donné en pâture. On atteint pour moi ce qui se fait de mieux, compte tenu là encore de ses préférences en terme de signature.

Cela ne vaut que pour ce combo pour le moment, le A1 et la Denon seule ne parvenant pas (du tout) à ce rendu, mais puisque l’on compare ces casques avec le même amplificateur, c’est un peu difficile pour le Signature Pro de surnager. Il apparaitra tout de suite comme un peu pataud dans le bas du spectre, face à deux monstres de rapidité et de précision dans leurs gammes respectives.

Verdict : le Sennheiser HD800 vainqueur par KO, mais uniquement dans cette configuration. Couplé avec un amplificateur moins efficace, le Signature Pro reprendrait la main par sa dynamique et son assise dans le bas du spectre.

Au final, ces comparatifs sont un peu biaisés puisqu’ils opposent des casques fondamentalement différents, mais ils restent pertinents ne serait-ce que pour les juger sur leur placement tarifaire. L’Ultrasone Signature Pro peine ici à justifier son placement et son prix, et plus encore son appellation « studio » : très exigeant sur l’amplification et le mixage de l’album, il reste souvent plus brouillon que ses concurrents. Difficilement compréhensible à près de 900€ malheureusement.

3. Et sur des sources plus nomades ?

Les tests précédents auront permis de tester l’Ultrasone Signature Pro dans un environnement capable de le pousser dans ses retranchements. En revanche, et comme précisé au tout début de ce test, il a aussi vocation à être utilisé dans des situations plus nomades.

C’est pourquoi il me paraissait intéressant de faire un rapide tour d’horizon de 3 sources nomades distinctes parmi les plus utilisées : pc portable, tablette et smartphone. Je mets volontairement de côté les baladeurs audiophiles tels que le iRiver Astell & Kern AK100, trop proches des conditions utilisées plus haut.

• Macbook Air 2012 & Audirvana+

Un test sur la sortie intégré du Macbook Air (2012) confirme ce que les tests précédents laissaient entrevoir : il faut du jus au Signature Pro pour s’exprimer. La pauvre puce audio de l’ultraportable d’Apple est logiquement à la ramasse, et fait sonner le casque allemand comme à peu près n’importe quel concurrent dans les 200 euros.

Encore plus fort, mais c’est peut être spécifique à ma configuration : le Macbook Air fait pencher la balance vers l’oreille gauche, déséquilibrant totalement le message. Ce phénomène ressemble fortement au channel imbalance que l’on retrouve parfois sur de petits lecteurs mp3 ou amplificateurs nomades à faible volume, ce qui n’est pas le cas ici. Pourtant le résultat est le même.

Rien à faire donc, c’est très mauvais. En tout cas très (très) loin d’être à la hauteur de ce qu’a pu nous montrer le Signature Pro correctement amplifié. On zappe.

• iPad Mini

Pas de grande surprise, ça sonne relativement plat. C’est loin d’être mauvais, mais le message parait légèrement désincarné. Les basses s’atténuent étonnamment (quand on connait la nature du casque), et les aigus perdent très largement en définition/propreté.

Il faut pousser un peu le volume pour récupérer de la dynamique, mais ça ne fonctionne qu’un moment : le casque n’est pas totalement à la ramasse, mais sonne de façon quelconque. La partie haute du spectre est particulièrement à la peine sur l’ensemble des morceaux testés, et c’est peut être ce qui choque le plus, au delà d’un rendu assez mollason.

Pas de miracle ici : il y a bien du son qui sort du casque, mais impossible ou presque de reconnaitre l’Ultrasone Signature Pro tant il apparait timide et calme. L’iPad Mini réussit le tour de force d’anesthésier notre ami allemand, pour un rendu final vraiment peu réjouissant.

• Google Nexus 4

Rien de mieux en général qu’un smartphone milieu de gamme pour faire sonner un casque comme un vague produit noname chinoix. Ce n’est étonnamment pas le cas ici, alors même que le Nexus 4 n’est pas reconnu pour sa partie audio. Il ne s’en sort pas si mal que ça, même mieux que le Macbook Air et l’iPad Mini, ce dernier étant pourtant plus à l’aise en général.

Le son un peu sec de base rendrait presque justice au Signature Pro, calmant largement ses ardeurs dans le bas du spectre, et faisant briller ses aigus. L’écoute se prolonge et difficile de cracher (comme envisagé) sur le smartphone. Bien sûr, ça manque un peu de dynamique et de précision face au Trafomatic, mais rien de dramatique.

Autant dire qu’un sentiment partagé entre la honte et l’étonnement se dessine au fur et à mesure que j’écris ces lignes, mais je trouve le rendu global plutôt bon compte tenu de la source. En replaçant les choses à leur place, le Nexus 4 n’est pas ridicule, loin de là, et écrase clairement les portables d’Apple. Oui, ça remet beaucoup de choses en question…

Constat sympathique au passage : ces rares démystifications font partie des petits plaisirs que l’on peut avoir lors des tests. Voir un matériel lambda sonner correctement et contre toute attente, face à du matériel valant parfois 10x ce prix, c’est presque jouissif, et un peu inquiétant en même temps. En tout cas, et contre toute attente, le combo Ultrasone Signature Pro et Google Nexus 4 fonctionne plutôt bien, et c’est une belle surprise.

Sur ce je vous laisse, je vais refaire quelques tests d’audition, on ne sait jamais.

Le mot de la fin

Si vous êtes encore là après toutes ces lignes, vous l’aurez deviné : difficile de se faire un avis tranché sur le casque Ultrasone. Tantôt apathique et mollasson, tantôt boule de nerfs indomptable, le petit dernier de la gamme Signature d’Ultrasone se révèle plus pointilleux, plus sensible que prévu.

Amplifié correctement mais sans plus, il vous le rendra : un bas du spectre obèse, des aigus bien trop discrets et des mediums en retrait, caractéristiques d’une signature en V bien (trop) marquée. Le risque serait de s’arrêter à ce premier constat, légitime si l’on prend la grande majorité des sources sur lequel il sera utilisé.

En revanche, si l’on prend soin de lui coller une amplification musclée, à la hauteur de son appétit, il se transforme. La tension et la précision s’en trouvent démultipliées, et il retrouve un équilibre qui lui rend hommage. On aperçoit enfin la boule de nerfs qui se cachait sous ce cuir en chèvre d’Ethiopie, et qui colle beaucoup mieux à ce qu’on pouvait imaginer de la part d’un casque Ultrasone (surtout lorsque l’on a posé l’oreille sur l’Edition 9).

Que retenir au final ? Un casque qui sous ses airs polyvalents ne l’est pas tant que ça, et nécessite une amplification de qualité pour totalement s’exprimer. Et malgré tout, un sentiment qui se confirme tout au long des tests et confrontations avec d’autres casques : à près de 900€, il justifie difficilement son positionnement.

A environ 500€, il aurait clairement une place en or, rivalisant sans problèmes avec les meilleurs de ce segment. Deux fois plus cher, il affiche des limites (bas du spectre pataud, aigus écourtés) qui malgré l’amplification demeurent souvent problématiques.

Pour les vrais amateurs de basses au budget conséquent, il conviendra parfaitement à condition de lui fournir la puissance nécessaire (quoique, quand on entend le résultat avec un simple smartphone…). En revanche, celles et ceux qui recherchent un rendu fidèle et équilibré n’y trouveront pas leur compte.

En résumé : entraînant (parfois), dynamique et musclé si bien nourri, il reste trop cher au regard de ses performances et du matériel nécessaire pour le faire sonner. On était pourtant pas si loin d’une réussite.

En discuter sur le forum