Magazine Humeur

Lilian Thuram, le football et le racisme

Publié le 21 octobre 2013 par Raymondviger

Le mois de l’histoire des Noirs

Redonner ses couleurs à l’histoire

Né en 1972, Lilian Thuram a connu une grande carrière de footballeur. En 2008, il a mis sur pied la fondation Éducation contre le racisme. Nous avons parcouru son livre Mes étoiles noires, chaudement recommandé par Johnny Walker Bien-Aimé.

Normand Charest Dossier Racisme

Enfant, Lilian était le seul Noir de sa classe, et il constata bien vite que l’histoire de ses ancêtres était absente des livres d’école. La seule fois où on en parlait, c’était pour dire que les Noirs avaient été les esclaves des Blancs. Cela l’a choqué. Il s’est «senti estampillé, marqué au fer, et bien seul dans cette classe que je regardais désormais autrement et qui me regardait aussi peut-être d’une autre façon».

Déjà, ce début d’introduction est génial, parce qu’il réussit parfaitement à nous mettre dans la peau de cet enfant Noir. À nous faire ressentir directement son désarroi. C’est clair. On comprend bien maintenant le but de son livre : celui de fournir aux enfants une histoire et des modèles où ils pourront se retrouver.

«Il est aberrant que les enfants ne sachent toujours pas qu’il n’y a qu’une seule espèce d’homme, l’Homo sapiens… le jour où l’histoire des grandes civilisations africaines, asiatiques ou amérindiennes, telles que celles du Mali, de l’Inde ou du Mexique, sera enseignée, les mentalités évolueront.»

«Si nous voulons vraiment changer notre société, lutter contre le racisme, ce n’est pas sur la discrimination positive ni sur le communautarisme qu’il faut compter… Il n’y a pas d’histoire noire ou d’histoire blanche. C’est tout le passé du monde que nous devons reprendre pour mieux nous comprendre et préparer l’avenir de nos enfants. Par ce livre, j’espère y contribuer.»

Des pharaons noirs

Dans la quarantaine de chapitres qui suivent, l’auteur survole l’histoire de l’humanité. Nous apprendrons, entre autres, l’existence d’une dynastie de pharaons noirs en Égypte. Certains historiens avanceront même que la population égyptienne serait descendue graduellement de l’Éthiopie jusqu’à la mer, en suivant le Nil.

Le penseur Ésope de l’Antiquité grecque (7e-6e s. av. J.-C.), auteur de fables qui ont influencé l’Europe, était en réalité un esclave nubien, avant d’être affranchi. Ses fables, très populaires au 17e siècle, ont été reprises par La Fontaine qui leur a donné la forme rimée que l’on connaît bien.

Fables de Lafontaine

«Tous les enfants connaissent les fables de La Fontaine. Il serait bon que les professeurs expliquent le lien entre Ésope et La Fontaine, le Noir et le Blanc. Dire aux élèves que l’intelligence n’a pas de couleur, c’est éduquer contre le racisme avec sensibilité, intelligence et humour.»

On aimerait citer au complet le «Serment des chasseurs du Manden», composé dans l’empire du Mali, en 1222. On y parle du respect de toute vie, ainsi que de la fin de l’esclavage:

«Chacun dispose désormais de sa personne,

Chacun est libre de ses actes,

Chacun dispose désormais des fruits de son travail.

Tel est le serment du Manden À l’adresse des oreilles du monde entier.»

Une reine d’Angola au 17e siècle instaure la parité homme femme dans l’administration. Lorsque les Portugais arrivent au Kongo en 1482, ils découvrent un grand royaume dont les habitants sont «civilisés jusqu’à la moelle des os! L’idée du Nègre barbare est une invention européenne», écrit l’anthropologue allemand Leo Frobenius en 1911.

Au 18e siècle, un garçon du Cameroun deviendra page du sultan d’Istanbul. Avant d’être adopté par le tsar Pierre le Grand de Russie, qui l’élèvera comme son fils. Il deviendra le général en chef de l’armée impériale russe.

Poète russe Noir

Alexandre Pouchkine (1799-1837), le plus grand poète russe, sera son descendant: «Il n’y a que moi dans la littérature russe qui comptasse un Nègre parmi ses ancêtres», écrira-t-il. Dans ses écrits, il défendra la cause de ses «frères noirs» contre leur esclavage aux États-Unis. Malgré la blancheur de ses parents, il avait hérité de la peau bistre et des cheveux ondulés de son lointain aïeul.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Raymondviger 8679 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte