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[critique] Cartel : nihilisme absurde mais brillant

Par Vance @Great_Wenceslas

 

Scénarisé par Cormac McCarthy, Cartel marque le retour au cinéma d'un Ridley Scott inspiré par son sujet. Difficilement aimable au premier abord, le film - d'une incroyable noirceur - interloque par son absurdité.

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Cartel est un film qui va diviser. Ce n'est pas le genre de film facile à suivre et qui se regarde avec plaisir, c'est même tout le contraire - on est vraiment aux antipodes d'un Savages auquel il pourra peut-être être comparé. C'est une œuvre sombre, désespérée et absurde qui nécessite un certain temps d'adaptation avant d'en comprendre le fonctionnement.

D'un nihilisme saisissant, mais pas si étonnant lorsque l'on a déjà vu d'autres adaptations de l'œuvre de McCarthy (on pense à  No country for old men ou La Route), The Counselor (son titre en VO, bien plus logique) risque de déstabiliser beaucoup de spectateurs. A aucun moment le long-métrage ne nous offre la possibilité de nous attacher aux protagonistes ou ne nous laisse avoir « trop » d'avance sur l'intrigue - qui n'aura finalement aucune importance réelle. Ridley Scott choisit de se focaliser sur l'ambiance, sur ses acteurs, sur les dialogues, et préfère filmer une sorte de monde chaotique, au détriment de la mise en scène d'une histoire fluide et facilement compréhensible.

Il n'y a pas vraiment de cohérence et de logique dans l'univers de l'auteur, et le réalisateur renforce cette sensation de désespoir en faisant en sorte que son public soit complètement perdu pendant le film. Ainsi, ce qui pourrait aisément passer pour une mauvaise gestion du rythme résulte au contraire d'un choix délibéré de semer le trouble chez le spectateur. On peut trouver le temps long, mais on ne peut reprocher à Ridley Scott de jouer habilement et intelligemment sur les attentes. Le montage est parfois très surprenant avec des scènes qui semblent quasiment toujours coupées quelques secondes trop tôt, comme si le film ne pouvait pas respirer, laissant une désagréable impression d'étouffer. Le spectateur n'a jamais le temps de se poser, de réfléchir. Il subit le récit en même temps que les personnages. C'est en cela que le film divisera : il ne cherche jamais à se rendre accessible ou sympathique, et pourra provoquer au contraire une sensation de rejet.

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Nul doute que le métrage puisse déstabiliser également par l'utilisation d'un casting de stars, quasiment toutes à contre-emploi. Certains comédiens sont à la limite d'être sous employés, comme Javier Bardem et Brad Pitt, dont les looks annoncent des personnages bien plus hauts en couleurs qu'ils ne le sont réellement. Tout l'opposé de Cameron Diaz qui nous propose l'un de ses meilleurs rôles. Quant à Michaël Fassbender, il trouve une nouvelle fois le ton juste dans la peau de cet avocat aux multiples facettes. Ridley Scott joue avec l'image des comédiens, il s'amuse à « décevoir » les envies d'un public venu voir toutes ces stars ensemble.

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Antispectaculaire, lent, confus, le film choque d'autant plus lors de quelques rares séquences hyper violentes. Le réalisateur impose sa vision pessimiste du monde en endormant ou hypnotisant son public avant de le réveiller brutalement. Cartel n'est absolument pas un film « confortable ».

On ne l'attendait plus vraiment, pourtant le cinéaste parvient à retrouver une hargne, une envie de faire du cinéma. Après quelques films très décevants, dont son dernier en date Prometheus était aussi beau que complètement idiot, Ridley Scott nous rappelle qu'il est un grand réalisateur.

Et si on aime l'auteur, il ne faut pas hésiter à le voir.

Ma note (sur 5) :

3

 


 

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Titre original

The Counselor

Mise en scène 

Ridley Scott

Production 

20th Century Fox

Date de sortie France 

13 novembre 2013

Scénario 

Cormac McCarthy

Durée

100 min

Distribution 

Michael Fassbender, Penelope Cruz, Cameron Diaz, Javier Bardem & Brad Pitt

Photographie

Darius Wolski

Musique

Daniel Pemberton

Synopsis : la descente aux enfers d’un avocat pénal, attiré par l’excitation, le danger et l’argent facile du trafic de drogues à la frontière américano-mexicaine, mais qui découvre qu’une décision trop vite prise peut le faire plonger dans une spirale infernale, aux conséquences fatales…


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