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"Des oiseaux et des voitures" de Béatrice Monnard

Publié le 12 novembre 2013 par Francisrichard @francisrichard

Tous ceux qui sont devenus femmes ou hommes se souviennent de leur première fois. Que cela se soit passé bien ou mal. Ce passage n'est jamais banal. L'avant et l'après font partie des choses de la vie.

Il en est de même de toute solution de continuité dans l'existence humaine.

Dans le livre de Béatrice Monnard, l'héroïne, Jeanne Marker, a commencé sa vie de femme dans des circonstances, qui laisseront leurs marques sur le reste de son existence.

Au début du livre, cette femme à la petite tête de moineau "connaît ses peurs, la part d'ombre et fragile d'une fille vierge laissée par son premier amour le soir où elle ne l'était plus".

Depuis elle a connu plusieurs hommes et semble résignée:

"On apprend à aimer et à se défaire de l'amour, on n'arrête pas, on se remet de tout, n'est-ce pas?"

Plusieurs hommes, et leurs bolides:

"Seules les aiguilles des compteurs montraient quelque chose. Il faut croire qu'elle aimait la vitesse, les étourdissements et les imprudences."

Jeanne sait que non, Venise n'est pas en Italie, comme le chante Serge Reggiani, que Venise est n'importe où, là où elle peut se réjouir de moments heureux, dans la zone ouest ou la zone est de la ville, auprès du chevalier ou du maître de la corneille ou encore du chef de la meute...comme elle les appelle.

Quand elle avait dix-neuf ans, elle était allé travailler dans une ville d'Italie, à la colonia Gamberini, viale Gozzano, 8. Elle était venue pour la mer. Sur la plage elle avait fait la rencontre de L. Sorgente et l'avait suivi au petit bar:

"Son prénom était celui d'une chanson qu'elle chantait dans sa langue."

Louis, de Véronique Sanson.

Il venait la chercher en voiture pour aller dans l'arrière-pays, dans la campagne où elle connut avec lui ses premiers émois:

"Maintenant avoir une bouche, des cuisses, des seins à la minceur de papier, mais des seins quand même, elle savait."

Puis le premier soir d'août, il l'avait emmenée dans une chambre et cette chose de la vie s'était passée...

Elle ne devait jamais revoir L. Sorgente... mais revenir sur les lieux trente ans après pour remettre ses pas dans ceux d'alors.

Béatrice Monnard, par touches successives, révèle ce qui hante Jeanne depuis une trentaine d'années et qui ne se limite pas à son initiation.

Le flou du début du livre, où il faut quelque temps pour prendre ses repères, se dissipe peu à peu comme une brume matinale. Le registre poétique demeure, mais la quête de cette femme se précise et cette affirmation sur elle prend alors toute sa signification:

"Elle sait pour quelle vie elle est faite, loin des assurances aux primes très chères payées, le prix des libertés et des aspirations."

Francis Richard

Des oiseaux et des voitures, Béatrice Monnard, 136 pages, L'Aire


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