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La Grâce des brigands ~ Véronique Ovaldé

Publié le 17 novembre 2013 par Antigone
lagracedesbrigands

"Elles se regardèrent, Joanne accoudée à la fenêtre et Maria Cristina en tailleur sur le tabouret, cigarette à leurs becs respectifs, au frais dans leur courette en ciment, avec la cage du mainate de la voisine au milieu des cactus en pot, et elles se mirent à rire et Maria Christina se dit qu'il n'y avait décidément rien de meilleur que la camaraderie et, comme elle ne savait pas encore bien vivre les choses sans penser au moment où elle ne les aurait plus, elle eut peur de perdre Joanne."

Maria Cristina a trouvé depuis quelques années un semblant d'équilibre dans sa vie. Elle a quitté depuis longtemps Lapérouse, la bourgade de son enfance, et sa famille asphyxiante. Elle est écrivain, elle vit seule, et a comme amie Joanne, une serveuse libérée, mère d'un petit garçon, et comme ancien amant et mentor un écrivain à succès, Rafael Claramunt. Depuis le succès de son premier roman, l'écriture est au centre de son existence, et l'image qu'elle renvoie aux médias est celle d'une femme libre et déterminée.
Alors quand Maria Cristina reçoit un appel affolé de sa mère - alors qu'elle n'a pas eu de nouvelles d'elle depuis des années - la priant de venir s'occuper du fils de sa soeur, le bouleversement est grand...

Mis à part Déloger l'animal, je crois avoir tout lu de Véronique Ovaldé. Et ce qui surprend dans ce roman-ci en premier lieu est l'absence de fantaisie, qui était pour moi une des caractéristiques de l'écriture de l'auteure. Nous sommes loin du Sommeil des poissons lu précédemment. La grâce des brigands n'a pas en premier lieu l'allure d'un conte. Le récit, d'ailleurs, démarre de façon désordonnée, presque avec acidité.
Et puis, parce qu'il était évident que la magie apparaitrait enfin, certains passages, d'une extrême vérité et d'une grande beauté, m'ont donné la chair de poule, comme pouvaient seules le faire (me semblait-il) certaines chansons. 
La grâce de ce roman est donc ailleurs, non pas dans la fioriture de l'écriture, mais dans la simplicité toute nouvelle d'une auteure qui sait convoquer des images fortes, si bien parler des ravages des éducations mystiques et de la complexité des êtres, et ce avec un attendrissement et une empathie touchante. Passer quelques heures en compagnie de la petite troupe qui entoure Maria Cristina est par ailleurs d'un réconfort et d'une tendresse rare.
Un coup de coeur de lecture évident !

"Ce qu'il est intéressant de noter c'est que l'apparente docilité de Maria Cristina était en fait un type de résistance. Mais une résistance tranquille et adpatée au contexte. Une résistance à ce que sa mère pensait faire d'elle, une résistance à son milieu. Une sécession silencieuse en quelque sorte.
Il est certain que Meena était la seule personne à avoir remarqué le désir de Maria Cristina de se fondre dans leur milieu (tenue de camouflage) tout en s'adonnant à ses deux passions coupables : l'une pour les supputations diverses à l'égard de ses contemporains [...] et l'autre pour les livres. Cette dernière passion, ça ne faisait pas un pli, l'entraînerait loin de Lapérouse, puisque les livres servent, comme on le sait, à s'émanciper des familles asphyxiantes."

Tout Véronique Ovaldé sur ce blog [clic ici]

Editions de l'Olivier - 19.50€ - Août 2013

Un titre lu dans le cadre des matchs de la rentrée littéraire de PriceMinister-Rakuten !! (Grand merci)

D'autres nombreuses lectures dont...  L'irrégulière - Sylire - Clara - Cathulu - Theoma !


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