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Gil Rivière-Wekstein défend des thèses qui servent les multinationales agroalimentaires et chimiques

Par Baudouindementen @BuvetteAlpages

Gil Rivière-Wekstein, un nom à retenir

Gilles-Eric Séralini aurait des liens avec une secte ésotérique selon Gil Rivière-Wekstein. C’est ce qu’il avance sur son site agriculture-environnement.fr, dévoilant ainsi la "part d’ombre" du professeur dont la récente étude sur la toxicité des OGM et des pesticides a secoué pas mal de monde fin de l’année passée. Mais qui est Gil Rivière-Wekstein ?

La publication le 19 septembre 2012 de l’étude de l’équipe du professeur Séralini relative à la toxicité des OGM et des pesticides (roundup) a provoqué à la fois un ras de marée médiatique, une sérieuse controverse au sein du monde académique et des agences concernées (voir notamment ici et ici pour ceux qui rejettent l’étude, mais ici et ici pour les soutiens) et enfin une véritable guerre secrète pour décrédibiliser l’étude ou son auteur.

Un dernier rebondissement est le fait de Gil Rivière-Wekstein sur son site agriculture-environnement.fr dans un article qui, en bref, met en cause le biologiste pour les liens qu’il entretiendrait avec le mouvement Invitation à la vie (IVI), "à travers une petite société de produits homéopathiques baptisée Sevene Pharma".

Gil Rivière Wekstein
Gil Rivière-Wekstein

Mais qui est Gil Rivière-Wekstein ? La brève biographie postée sur son site nous apprend qu’il est né en 1960, à Bruxelles. A l’âge de 15 ans il découvre les grands débats concernant l’environnement et l’écologisme. Révolté par le discours malthusien du Club de Rome (et de son rapport Halte à la croissance ?, publié en 1972), il s’engage alors dans différentes associations danoises et rédige ses premiers articles dans la presse locale. Il n’hésite pas à aller à contre-courant de l’opinion publique danoise, en prenant en particulier la défense du nucléaire civil.

« Gil Rivière-Wekstein est membre adhérent de l’Afja (Association Française des Journalistes Agricoles) ». Notons que cette association au service de l’agriculture française a, entre autres, pour « membres associés » - qui paient une cotisation de 625 euros - BASF Agro, Bayer Cropscience, Syngenta Agro, Total Raffinage Marketing, Union des industries de la protection des plantes (UIPP) [1]...

Gil Rivière-Wekstein est par ailleurs l’éditeur du site agriculture-environnement.fr dont la principale raison d’être est la publicité d’une lettre d’information présentée comme suit par Marie-Christine Blandin, sénatrice Europe-Ecologie-Les Verts, : "Régulièrement, nous recevons de modestes informations, mal présentées, d’origine mal définie, sous le couvert d’une étrange association, qui publie un quatre-pages, Agriculture et environnement. Sur tous les thèmes, cette feuille, un véritable libelle, attaque violemment ceux qui mettent en doute l’agriculture intensive et évoquent le réchauffement climatique. On y trouve des calomnies, des diffamations sur le professeur Belpomme, Greenpeace, Nicolas Hulot, le WWF ou l’association Kokopelli. Souvent des attaques sordides. Avec un ton presque militant. Comme ce n’est pas sur papier glacé, c’est presque plus efficace !".

Le site Web à l’origine des attaques lancées contre M. Séralini n’est pas anodin précise par ailleurs lemonde.fr : il est bien connu des chercheurs dont les travaux mettent en cause la sécurité des produits commercialisés par l’industrie agrochimique (OGM, pesticides, etc.). Notamment, des scientifiques travaillant sur les risques des pesticides pour les abeilles y sont systématiquement mis en cause, quand bien même leurs travaux ne sont pas controversés. L’un d’eux, le chimiste Jean-Marc Bonmatin (CNRS), a même poursuivi pour diffamation le responsable et rédacteur du site, Gil Rivière-Wekstein, et a obtenu gain de cause.

Le site et la Lettre sont édités par Amos Prospective, une société qui, outre l’édition, procure des services : "30 à 40 structures agricoles se sont abonnées pour 3 000 euros en moyenne" à Agriculture et Environnement, ce qui "leur permet d’avoir une intervention de ma part comprise dans leur abonnement" précise notre homme au Monde. Il y a fort à parier que pour une telle somme, lesdites structures agricoles trouvent en GRW un allié de leurs thèses.

Ses ouvrages méritent également une attention particulière. Citons notamment :

Bio, fausses promesses et vrai marketing : David Naulin de Cdurable.info le démonte à la perfection, ce qui l’amène à poser la question de savoir si ce n’est pas tout simplement une information au service du lobby agrochimique.

Abeilles, l’imposture écologique : décrypte l’affaire des « pesticides maudits » qui détruiraient les abeilles. Les récentes données en la matière suffisent à montrer qu’il a misé sur la mauvaise hypothèse dans son opuscule.

Ou encore, son dernier ouvrage : Faucheurs de science : les fanatiques sont dans nos campagnesdont voici la présentation par l’auteur lui-même : Depuis 10 ans, les Faucheurs Volontaires sévissent dans nos campagnes. Aucun livre n’avait encore été écrit sur ces militants écologistes radicaux. Même s’il n’y a plus aucun OGM cultivé en France, les Faucheurs Volontaires continuent pourtant à détruire des champs, à occuper des sites, à fliquer des agriculteurs et à s’introduire chez eux de nuit, à réaliser des montages financiers et fiscaux… Bref, le bras armé de la Confédération paysanne continue à monter des coups tordus. La Fédération, quand à elle soutient ce type d’action [2]. Voir aussi : rendre la justice, pas se faire vengeance.

Gil Rivière-Wekstein aime aussi critiquer les ouvrages de ses cibles privilégiées d’une manière particulièrement perverse, mais qui ne résiste pas à une investigation sérieuse. Ainsi en est-il de "Pesticides, révélations sur un scandale français" de Fabrice Nicolino et François Veillerette, démonté en 14 arguments par Gil Rivière-Wekstein, mais "contre-démonté" en autant d’arguments sur le site naturavox.fr dans un article intitulé Le lobby des pesticides pris en flagrant délire.

Il s’attaque également de manière virulente à Isabelle Saporta, auteure du Livre noir de l’agriculture. "Avec son Livre noir de l’agriculture, la journaliste Isabelle Saporta réalise une malenquête, comme d’autres font de la malbouffe.." affirmera-t-il pour introduire sa critique.

Sur cette base, le moins que l’on puisse dire est que Gil Rivière-Wekstein défend des thèses qui servent les multinationales agroalimentaires et chimiques. Elles sont aux antipodes des questions légitimes que l’on peut se poser quand on en identifie les excès, à l’instar notamment du professeur Bruno Schiffers dans le cadre de sa leçon inaugurale de la cérémonie d’ouverture de l’année académique de la faculté de Gembloux intitulée « Les pesticides ou le mythe de Prométhée revisité ». Les pesticides ont permis à l’agriculture du siècle dernier de relever le défi de la productivité agricole, mais à quel prix pour l’environnement et la santé ? Aujourd’hui la question de la gestion des risques est clairement posée…et il faudra y apporter des réponses. (Voir Evaluation des OGM et pesticides : vers une approche systémique ?). L’étude du professeur Séralini, même si elle présente des lacunes va dans ce sens. Le protocole suivi dans cette étude présente des défauts qui font débat au sein de la communauté scientifique. Mais en tout état de cause, disqualifier le protocole suivi dans le cadre de cette étude revient à disqualifier du même coup les données ayant fondé les décisions d’acceptation des OGM par les experts(voir Sciences et conscience).

Vous l’aurez compris, Gil Rivière-Wekstein, est un nom à retenir !! Et ne manquez pas de vous pencher sur ses publications : cela vous permettra de prendre connaissance des arguments et des méthodes des lobbyistes qui défendent des opinions diamétralement opposées aux nôtres et d’ainsi mieux les contrer.

[1] Le discours selon lequel un pesticide n’est nocif que si on l’utilise mal est le leitmotiv, depuis des années, de l’Union des industries de la protection des plantes (UIPP) - charmant nom dont s’est affublée la fédération de 20 entreprises qui mettent sur le marché et commercialisent des produits phytopharmaceutiques et des solutions de protection des cultures, dont les biotechnologies et les techniques complémentaires. Leur site vaut le détour, ainsi que l’interview de leur directeur, Jean-Charles Bocquet, suite au procès de Paul François.

[2] notamment en décernant la Palme de l’environnement à Barbara Van Dyck,membre du Field Libération mouvement qui a remplacé des plants de patates OGM par des plans bio à Wetteren. Inter-Environnement Wallonie a ainsi voulu mettre à l’honneur un engagement citoyen exemplaire au service d’un enjeu sociétal majeur. A travers la personnalité de Barbara, c’est d’ailleurs l’ensemble du FLM qui est récompensé. La fédération environnementale souhaite ainsi apporter son soutien à une forme de militance dont elle ne peut accepter la criminalisation ; il est en effet des circonstances où la désobéissance civile constitue un devoir civique.

Source : IEW


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