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Le corps humain

Publié le 13 décembre 2013 par Lecteur34000

corps

« Le corps humain »

GIORDANO Paolo

(Seuil)

« Quelle connerie la guerre ! » Prévert avait raison. Et même sous ses formes les plus contemporaines, les plus modernistes, la guerre reste toujours une sale, une ignoble connerie.

Puisqu’il faut bien résumer, le Lecteur résume. L’Italie assume ses engagements au sein de l’OTAN. Un détachement de jeunes militaires est envoyé en Afghanistan, dans une base perdue au cœur d’une aride vallée de montagne. Les soldats, tous professionnels, s’installent dans un milieu hostile, où rien n’a été préparé pour les recevoir. Leur vie se résume à un quasi néant. Jusqu’au jour où ils sortent de leur tanière pour s’engager dans une opération dite de routine. Une opération qui tourne vite au drame : le convoi est pris sous le feu des talibans, un véhicule explose sur une mine, quelques soldats y laissent leur peau. Alors même que les militaires italiens engagés en Afghanistan sont censés, à l’instar de leurs collègues occidentaux, revenir vivants.

Mais puisque cadavres il y a, l’autorité dite supérieure désignera un coupable. Le colonel commandant de la base se défausse devant celle qui rédigera le rapport : « Ils se valent tous. Dites-le leur aussi. Le colonel Giacomo Ballesio parle de ses hommes, deux points, ouvrez les guillemets, Pour moi, ils se valent tous. Celui-ci est mort à la place de celui-là, et alors ? C’est du pareil au même. Dites-le à vos maudits supérieurs. C’est du pareil au même. C’étaient juste des gosses qui ne savaient pas ce qu’ils faisaient. » Le coupable ? Le lieutenant, médecin de son état, celui qui occupait le grade le plus élevé lors de l’opération, mais aussi celui qui avait osé critiquer le bien fondé de cette opération avant qu’elle ne soit décidée.

Quelle connerie la guerre ! Certes bien différente de celle contre laquelle témoignèrent, entre autres, Barbusse, Giono ou Remarque. Mais tout aussi barbare, tout aussi cruelle. La guerre d’aujourd’hui est d’abord et avant tout une affaire de suprématie technologique (ce sont des hélicoptères qui sauveront les militaires italiens du traquenard tendu par les talibans). Des femmes combattent désormais aux côtés des mâles. Sans que la plupart de ceux-ci ne dissimulent le mépris qu’ils leur portent. (« Zampieri émet un petit cri sous l’effet d’une douleur au sein, compressé entre l’arme et le sternum de Masiero. Lequel l’oblige violemment à pivoter et le secoue. « Tu te prends pour un fusilier ? Hein ? Un fusilier ? Ici, on est au Gulistan, bordel ! Ici, on nous massacre à cause de filles comme toi ! »

Voilà donc des gosses englués malgré eux dans une aventure sanglante. Puisqu’il n’existait pas d’autre perspective pour eux que cet engagement au sein d’une machinerie déshumanisée. Leur inexorable parcours initiatique les conduit à se confronter à la mort. Dans d’horribles circonstances. Puisque la guerre constitue l’horreur absolue. Même et d’autant plus lorsque l’on en ressort vivant.


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