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Grâce et dénuement; Alice Ferney

Par Sylvielectures
Grâce et dénuement; Alice FerneyCe roman est l'histoire d'une rencontre.
Celle d'une bibliothécaire et d'une famille gitane installée sur un terrain de la commune.
J'ai lu ce livre parce que Magda et Amanda en ont parlé sur leur blog et m'en ont donné très envie.
C'est un magnifique sujet que celui d'une bibliothécaire qui va porter des livres là où il n'y en a pas, mue par un désir un peu mystérieux qui la fait entrer dans une communauté rétive et fermée sur elle même.
Par le biais des enfants, et des histoires qu'elle leur raconte, elle se fait accepter petit à petit et apprends à connaitre les hommes et les femmes qui vivent là, dans le dénuement, sans papiers, sans travail, sans argent, seulement avec l'espoir, l'amour, et les enfants.
Il n'y a pas de mièvrerie, ni de doux angélisme dans le quotidien rude et violent qui nous est raconté. Il y a le froid, la faim, la saleté, le désœuvrement, l'alcool et la violence, la pauvreté et l'analphabétisme. Il y a le rejet, l'exclusion, l'impossibilité de mettre les enfants à l'école, l'expulsion qui viendra, inexorablement, comme toujours, comme une condition, une fatalité.
Il y a aussi ce paradoxe brûlant de vies libres de toutes les chaînes et qui s'avèrent pourtant être des prisons claniques dont jamais personne semble ne pouvoir sortir.
Mais la rencontre fait son œuvre tout doucement...
Pas de miracle, pas de magie, juste un début de changement qui ouvre quelques brèches dans les têtes et les cœurs et permet l'espoir d'un mieux...
On est touchés par la fierté de parents qui auront un enfant qui saura lire et nager, même si c'est au prix de grandes souffrances à traverser. On admire le courage et la détermination d'un mère qui quitte son mari violent pour vivre ailleurs avec ses filles, loin du joug de la belle mère. On tente de cerner la mystérieuse figure centrale du groupe : cette "matriarche" qui tente coûte que coûte de sauver son monde voué à disparaître.
Il y a quelques beaux passages sur ce qu'il y a d'essentiel dans une vie, sur la liberté, la pauvreté, la fierté et ce qui nous fait homme.
Cette lecture ne laisse pas indifférent, on entrevoit ce que peut être le dénuement et la grâce qu'il fait jaillir dans les moments d'émotions intenses qui remplissent une vie. On égrène avec plaisir autour du feu les seules richesses inaliénables qui peuvent nous êtres données au cours d'une existence.
Les moments de lecture collective sont des temps hors du temps, gobés par les enfants avec une avidité et un bonheur rare et captés avec une finesse et sensibilité par l'écriture d'Alice Ferney.
Cette histoire raconte sans doute un peu de toutes les expériences "hors les murs" menées en France par des associations et des bibliothèques. Sans être un témoignage, ni un documentaire, c'est peut-être tout simplement un bel hommage rendu à ce travail souterrain qu'on ne voit pas mais qui fait beaucoup.
"Elle les installa, les petits à côté d'elle, les grands juste derrière. Et elle commença à raconter l'enfance de Babar. Elle lut comme jamais elle ne l'avait fait, même pour ses garçons : elle lut comme si cela pouvait tout changer."
... "Elle lu avec de la tendresse pour eux et de la foi dans les histoires. Et elle n'avait ni crainte ni question, est-ce-que c'était artificiel, utile, naïf, stupide, de venir ainsi, sans prévenir, sans demander, pour lire des histoires à des enfants. Un élan la portait." ...Elle lisait, et le reste attendait. Le monde était évanoui, et morte ainsi sa dureté, et le froid des jours d'automne oublié lui aussi."
..."Esther prenait son livre. Ils ne bougeaient plus et hormis quelques reniflements, le silence était total. Elle ignorait qui, de la chaleur ou de l'histoire, les apaisait d'un seul coup, sans qu'ils ne demandent rien. Ils ne sont pas difficiles, se disait-elle. Jamais ils ne réclamaient jamais ils n'avaient soif ou faim comme d'autres enfants qui ont sans arrêt besoin de quelque chose. Elle lisait dans ce calme. On entendait juste le ronflement d'air chaud. Les enfants avaient posé les mains sur leurs cuisses."
"Il y avait un secret au cœur des mots. Il suffisait de lire pour entendre et voir, et l'on n'avait que du papier entre les mains.Il y avait dans les mots des images et des bruits, la place de nos peurs et de quoi nourrir nos cœurs. Elle ne s'arrêtait plus de lire."
Papillon et Amanda en parlent, Naniella ,Anna , Leil, et Calouan aussi.
Une belle critique d'Indgrid Merckx, sur Lire : fr,
Pascale Arguedas a aimé, sur Calou, L'Ivre de lecture.
Magda est admirative, et c'est son post qui m'a vraiment décidée à le lire,
De nombreuses critiques éclairs sur critiques Libres, dont une de Cuné,
Un très joli post également de Sybelès, sur 49 Hors Les Murs,
Enfin, sur itinerrance, une belle phrase pour caractériser ce roman : "un hymne à la vie, crue, dépouillée, celle qu’il nous reste lorsqu’on n’a plus rien d’autre…"
Alice Ferney parle de son travail d'écrivain sur auteurs TV, un régal!

Alice Ferney
par auteursTV

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