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Pourquoi je filme?

Publié le 26 janvier 2014 par Picotcamille @PicotCamille

Parce que j'aime ça

Parce que ça bouge

Parce que ça vit

Parce que ça pleure

Parce que ça rit

Parce qu'au ciné

On est dans le noir

On est au chaud

Entre un mec qui vous fait du genou

Et une nana qui enlève le sien

Devant un con qui parle trop fort

Derrière un génie aux cheveux ébouriffés

Qui vous empêche de lire les sous-titres

Parce que ça danse

Parce que ça chante

Alors je plane

Parce que c'est beau

Parce que filmer c'est comme une femme

C'est comme un homme

Ça peut faire mal

Ça vous écorche

C'est parfois moche

Mais c'est bien quand même

Parce que ça zoom

Parce que ça travelling

Parce que ça silence et moteur et on tourne

Parce qu'on rêve

A vingt-quatre images seconde

Et que par conséquent ça fonce dans la nuit

A quatre-vingt six mille quatre cents images a l'heure

Et que le Tgv en crêve de jalousie

Parce que c'est blanc

Parce que c'est noir et pleins d'autres choses encore

Parce que j'aime ça.

Et parce que je ne sais rien faire d'autre.

Jacques Demy

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Dimanche dernier il passait Les Hommes préfèrent les Blondes dans un petit cinéma du quartier Latin. Le bonheur. D'abord de revoir ce film, mais aussi de partager les rires du public, de voir un film sur une vieille pellicule qui saute un peu avec des sous-titres "vintages" (la traduction de Little rock par Caillou-sur-mer). Je suis trop subjective sur ce film pour vous en parler. C'est le genre d'instant que j'adore, être au chaud dans un petit cinéma, entourée d'amis à regarder un vieux film. J'aime Paris pour ça.

C'est une question qui revient souvent, Paris et le fait de l'aimer. Comme quelque chose d'incroyable.

Ce que j'aime en ma ville, c'est ces promesses d'aventures. Combien de fois j'ai vécu un film? C'était un film d'action, parfois une comédie romantique, un portrait de société, un drame et même un musical. Paris a cette essence cinématographique qui fait rêver ceux qui y croient. Hier, par exemple, j'étais triste. Un vague à l'âme, rien de plus. J'ai quitté la soirée où j'étais. Personne ne trouvant une quelconque grâce à mes yeux. Quand je suis d'une humeur de merde, je suis d'une humeur de merde et autant que j'aille me coucher. Je me casse, je rentre à pied, plus de métro et puis l'envie de marcher. La balade, un anxiolytique à ma mesure. Tout Paris s'offre à moi. J'évite d'habitude les coins touristiques, mais à 3 heure du matin, je me tente Montmartre. Paris à mes pieds, seule dans mon gros manteau, khôl noir se faisant la malle sous mes yeux brillants, je suis l'héroïne de mon propre film. C'est sûrement un film un peu chiant, Une fille un peu trop fière, inapte aux règles sociales, qui cumulerai les boulots comme on rentre en guerre pour sa propre survie. Le film serait morcelé, à chaque défi viendrait s'ajouter un phrase tiré d'une pièce de théâtre. Comme autant de rôles qu'une meuf doit revêtir pour être indépendante. Hier soir j'étais triste. Une histoire à la con de cœur, mais trop orgueilleuse pour me l'avouer. La réplique aurait été, sûrement, celle d'Aricie dans Phèdre de Racine:

"Phèdre en vain s'honorait des soupirs de Thésée.

Pour moi, je suis plus fière, et fuis la gloire aisée

D'arracher un hommage à mille autres offert,

Et d'entrer dans un cœur de toutes parts ouvert.

Mais de faire fléchir un courage inflexible,

De porter la douleur dans une âme insensible,

D'enchaîner un captif de ses fers étonné

Contre un joug qui lui plaît vainement mutiné;

C'est là ce que je veux, c'est là ce qui m'irrite."

Aricie, Phèdre de Racine, Acte 2 scène I

 


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