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La Nuit de L'Iguane

Publié le 08 février 2014 par Picotcamille @PicotCamille

Quand mes journées sont bien remplies j'aime me poser le soir, regarder un vieux film. Un plat de pâtes, une soupe ou un thé et je ne suis plus des vôtres. Hier soir c'était La nuit de L'Iguane de John Juston. Inspirée par une amie de l'école qui aime Ava Gardner.

"Toutes les questions sont permises cette nuit."

Nous suivons un homme, le pasteur Shannon (Richard Burton), homme de Dieu en proie au diable. Suite à un pétage de plomb du pasteur, il devient guide touristique pour grenouilles de bénitier à travers le Mexique. Il est prit en tenaille entre une jeune nymphomane (Sue Lyon, Lolita devant l'éternel) et une dévote très à cheval sur les principes (Grayson Hall). Le voyage va de mal en pis quand Shannon tente le tout pour le tout, en enlève son bus de bigotes pour les emmener dans l'hôtel d'un vieil ami. Mais il n'y trouve que sa veuve (Ava Gardner). Coincé dans ce petit coin de verdure, tous les protagonistes sont prêts quand arrive le plus vieux poète vivant (Cyril Delevanti) et sa petite fille dessinatrice (Deborah Kerr).

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Un scénario de Tennessee Williams, la patte de John Huston, le défilé d'acteurs incroyables, j'aime tout. Tennessee Williams a un talent pour mettre en scène les névrosés que j'affectionne. Nymphomane, lesbienne qui s'ignore, peur de vieillir, d'être seule, du désir. Le tout est finement orchestré. D'abord Shannon, comme pasteur dans une église, et sa prise de folie. Puis Shannon guide, qui picole en faisant la sieste au soleil. Arrive Charlotte, jolie mineure très précoce et complètement dingue. Puis sa tutrice, la rigide Miss Fellowes. On suit ce trio pendant une première partie du film. Cette relation triangulaire qui a elle seule pourrait faire un film. Je tiens à dire que le personnage de Charlotte est exaspérant de malhonnêteté, dans le bon sens. Si je ne pourrait  jeter la pierre à aucun personnage, elle est sûrement , celui que je condamnerai en premier. Car elle mêle habilement sa pervertion à son innocence (feinte?). Puis ils arrivent dans l'hôtel et là il y a Maxine, la magnifique Ava. Tout en force et fragilité, entourée de ces boys mexicains aux rôles peut reluisant.

"-Mé Jou Gouatchi, vous comprenez?

-Je ne crois pas.

- Ça veut dire laisse couler en chinois."

C'est peut-être un des aspects négatifs de ce film, sûrement dû à son époque, car les deux boys sont clairement des fair-valoirs aux torses nus et musclés suivant les ordres de leur patronne. Ils ne prononcent pas un mot et tous leur semble être un jeu, se battre comme se faire rejeter par leur maîtresse. Hormis un tenancier de payotte sur la plage, il n'y a aucun mexicain qui ne parle, qui à l'air de posséder une volonté propre. Après voilà, c'est un film de 1964, d'hommes élevés dans un apartheid permanent, avec l'idée que les gens étaient différents. C'est des conneries mais on ne peut pas passer outre l'Histoire, quelle qu'elle soit, pour une œuvre et au final pour tout (certains manifestants du "jour de la colère" feraient bien d'ouvrir un manuel d'histoire de temps à autre, parce que c'était clairement le 'jour des cons"). Passons.

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Donc Maxine, je l'adore! C'est la femme forte parce que fragile, prête à arracher des dents mais incapable de ne plus être désirable. Puis arrive son contraire, la douce Hannah qui parcourt le monde avec son grand-père poète. Maxine et Hannah ont le même âge, la première est mué par la passion, l'autre est une force tranquille. Peu de temps après que tous les protagonistes soient arrivés à l'hôtel, le bus de bigotes arrivera à récupérer le cable nécessaire au démarrage du car et s'évadera fissa fissa.

"Mais je connais la différence entre aimer quelqu'un et aller au lit avec quelqu'un."

Il est intéressant de voir que le parcours de Shannon se découpe en deux parties, chacune composé de deux femmes opposées. D'abord Charlotte pleine de désir envers lui et offerte alors que Miss Fellowes n'éprouve pour lui qui dégoût. Puis ensuite Maxine et Hannah, l'une est une sorte d'âme sœur qui a choisi de s'abandonner à la passion alors qu'Hannah guérie de ses fantômes n'aspire qu'à l'apaisement. Shannon se trouve à chaque fois entre les deux duos. Succomber au désir ou y résister? Le suivre aveuglement ou le domestiquer?

"Le fantôme a gagné.

Brillante démonstration.

Il n'y a plus de place pour moi, dans le monde de la réalité.

Le fil fragile, le dernier, qui me retenait ici-bas est rompu."

Je flash complètement sur ce film. Parce que j'aime ses personnages traité avec intelligence et respect, j'aime les acteurs qui y sont merveilleux, j'aime certaines séquences comme celle du bain de minuit filmée avec une vrai poésie, où celle de Shannon ligoté à un hamac, qui en devient burlesque et terrifiante quelque part. C'est, comme pour Tant qu'il y aura des hommes, le genre de film que j'affectionne. Donc un Flash love attendu.

"Moi aussi j'ai eu mon fantôme. Je l'appelais différemment.

Je l'appelais "le Diable Bleu".

Oh, nous nous sommes fait la guerre longtemps.

(...)

Je l'ai supporté et j'ai gagné son respect."


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