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Un tout petit rien – Camille Anseaume

Publié le 23 février 2014 par Noann

Voici un livre que, une fois n’est pas coutume, j’ai découvert sur ce site à la con où les gens s’agglutinent comme des mouches autour d’un étron. Vous voyez ce que je veux dire, celui qui prétend réunir un milliard d’utilisateurs. Sauf que je connais des gens morts depuis des années et qui ont toujours un profil, d’autres qui ont 5 comptes, d’autres enfin qui errent comme des fantômes.

J’avais donc découvert l’auteure sympa, et son blog sympathique : café de filles, et entre autres un article hilarant sur une séance d’épilation ratée. Dès que le roman avait été annoncé, j’avais plongé sur cet autre site à la con qui vend tous les livres imaginables, et même les miens, avec frais d’envoi gratuits. Oui celui qui planque ses comptes au Luxembourg.

Me voici donc fébrile à la réception dudit bouquin, que j’ouvre immédiatement. Il se fait que chez moi, le facteur passe toujours vers midi, et que j’ouvre souvent le courrier au cours du repas, au risque d’avaler de travers en cas de mauvaise facture ou de bilan de contributions. Je déchire le paquet du site Mondo-luxembourgeois-irlandais, le ciseau dans une main, la fourchette dans l’autre. Je commence la lecture, bouche pleine. Au début, ça se déguste facilement. Quelques pages qui se tournent toutes seules. La narratrice est enceinte, et c’est un drame, et le mec se sauve, re-drame, les parents débarquent re-re-drame, les amis s’affolent, re-re-re-drame. On a vite compris que l’Anseaume allait nous balancer pendant 300 pages ses émois de future mère qui se lamente de long en large, et jusque dans le détail. On se demande s’il faut rire ou pleurer, gerber peut-être. Moi j’ai dû me retenir pour ne pas maculer la salle à manger de sauce tomate. Ça m’apprendra à lire le courrier en bouffant. Ç’aurait pu être pire, un redressement fiscal de 10.000 €, sait-on jamais.

Un tout petit rien
À part ça, Camille a un talent extraordinaire. Elle fait passer ses émotions avec une force incroyable. Ce petit bout, on en ressent le moindre mouvement, et surtout l’angoisse qu’il provoque chez maman-auteure. Chaque ligne met en exergue le doute, l’émoi, la passion, la folie. Ben oui elle est folle. Faire autant de cas pour si peu. Des milliards de femmes sont passées là avant, réveille-toi jeune maman, ce n’est que le premier, faut pas en faire toute une histoire. Mais si, il le faut. C’est qu’on a un livre à remplir, moi et le petit bout. Alors on y va, et on n’épargne pas le lecteur de la moindre douleur, de la moindre peine. Dire que j’ai moi une sœur qui en a eu trois d’un coup et qui a perdu son mari après 5 ans de lutte, et elle est rayonnante. Tout le contraire. Ici on a envie de lui botter le derrière à cette maman-bobo. Et cette famille qui pleurniche et lui somme de procéder à l’expulsion du petit, tant que c’est légal. Qui sont ces ogres ? Des personnages de circonstances, qui ajoutent du drame au drame ?

Quant au style… Des phrases courtes et éclatantes, des mots bouleversants, oui oui, on en veut des tomes comme ceux-là. Hélas aussi. que de formules de style creuses, que de métaphores boiteuses, que de paragraphes qu’il faut relire sans être vraiment sûr de comprendre. Alors que tout était en place, il suffisait de dire les choses le plus simplement possible. Le contenu s’y prêtait. Au lieu de quoi, des effets de mots, des jeux à la Rubik’s cube, et finalement le tout ressemble à un plat de nouille trop cuites, qu’il faut démêler. C’est quoi se fatras de mots ? Toutes les trois phrases, j’ai envie de donner un grand coup de pied pour remettre de l’ordre.

Il reste un mystère. Comment ce livre peut-il recueillir tant d’éloges ? Il faut dire que notre auteure s’était constituée un bon fan club, des hordes de jeunes filles en fleur, de dames aussi, sans parler des rombières et des mal-baisées. On s’y reconnait, entre nanas, la complicité féminine joue à fond, c’est l’une des nôtres qui a souffert, il faut la soutenir, allons-y toutes, inondons google-facebook-amazon-twitter de nos commentaires, il faut aider la talentueuse et surtout sympathique auteure, il faut copiner, son livre est excellent, il parle de nous de notre souffrance à toutes. Et en plus on y casse du mec, et ça nous rappelle des souvenirs de ce qu’on a vécu ou pas, ces types qui nous larguent dans le moments durs, quand nous avons envie de balancer notre ventre rond sous les roues du tram. Ah les salauds, elle a bien fait de leur couper les couilles sous le pied l’Anseaume. Et voilà que les commentaires élogieux déferlent, avant même la sortie du livre. L’on dit que le livre est génial, 15 jours avant sa sortie. Une amie avoue même qu’elle en a acheté 5 pour toutes ses copines, tant elle est sûre qu’il est génial. Et ça bavasse, et sa cancane. La solidarité féminine, ce n’est pas rien. Mais eh oh, mesdames, ça vous ira oui ? Le meilleur service que vous puissiez rendre à votre amie auteure, c’est l’honnêteté, c’est de lui dire ce qui est bien et ce qui ne l’est pas. Ça lui permettra  de se remettre en question et d’écrire un meilleur la prochaine fois. Car moi, je ne le trouve pas 100 % abouti.

Certes, je ne suis pas la bonne lectrice. Je n’ai jamais été enceinte, juste une grossesse nerveuse. Et je considère que des millions d’enfants crèvent de faim, alors la Parisienne céliperdante qui attend son premier marmot et en fait un drame à La Zola, excusez-moi mais ça m’est passé par dessus le bide. Sorry Camille, je vous aimais bien… Mais vous avez dilué votre talent dans le pathos et dans les fioritures de style. Dommage, ç’aurait été un bouquin génial, on n’en est pas loin… Mais. Je ne m’en fais pas toutefois, vos milliers de fans viendront vous consoler, il paraît même que vous serez sur France 5 la semaine prochaine

Ben moi je sens que je vais faire une grossesse nerveuse.

Un tout petit rien de Camille Anseaume

Date de parution : 08/02/2014  

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