Magazine Cinéma

Do not disturb - 7,5/10

Par Aelezig

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Un film d'Yvan Attal (2012 - France) avec Yvan Attal, François Cluzet, LaetitiaAsia Argento, Charlotte Gainsbourg

Culotté !

L'histoire : Ben et Clara, son épouse, amoureux fous, vivent dans un bonheur paisible et tentent d'avoir un enfant. Surgit soudain Jeff, un ami de jeunesse de Ben, aventurier et spécialiste de coups foireux, de passage à Paris. Les deux potes se retrouvent avec émotion et Ben héberge aussitôt son ami dans le garage, ce qui n'emballe pas spécialement Clara... Très vite, il se laisse entraîner par Jeff dans des soirées un peu particulières, où se côtoient des gens passionnés de films porno. Jeff a d'ailleurs décidé de réaliser un film, mais cherche une idée originale. Une amie lesbienne lui suggère que la seule chose qui n'ait jamais été vue, c'est deux hétéros ayant une aventure homosexuelle. L'alcool aidant, les deux garçons se mettent à se défier : ils joueront eux-mêmes dans le film ! Une fois dessaoûlés, ni l'un ni l'autre ne veut avouer qu'il a peur et ils planifient une nuit à l'hôtel. Clara, effondrée, essaie de jouer les épouses compréhensives, mais redoute que son couple n'explose rapidement...  

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Mon avis : Ce film, je me souviens, avait eu de mauvaises critiques. Ce qui m'avait beaucoup déçue, car j'aime beaucoup Attal, acteur et réalisateur. Do not disturb passait sur Canal+ et nous avons eu envie de le voir quand même, curieux de comprendre ce qui n'avait pas marché. A l'heure où la comédie française s'enlise dans une médiocrité indescriptible, le pari était évidemment risqué... Et bien, nous, on a aimé et on s'est bien marré !

Parlons sexe, mes amis ! Car c'est de ça qu'il est question ; sans fausse pudeur et dès le début ça annonce la couleur, avec une scène hot entre Yvan et Laetitia. On n'est pas trop dans une romcom, mais vu le pitch on s'en doutait un peu ! Ca m'a fait un peu peur, mais avec Attal, je savais qu'il n'allait pas nous faire un truc lourdingue... pas possible... j'avais confiance.

Ici, on appelle un chat un chat, quelques scènes sont fort osées et le jeune public devra être éloigné. Mais les moments hards sont rares, très courts, rien de vraiment choquant. L'incroyable séquence où l'on voit Charlotte - jouant une lesbienne avec Asia - affublée d'un sexe d'homme en plastique... est à mourir de rire ! Je n'aurais jamais penser rire d'une telle situation, moi qui suis - allez disons-le - légèrement prude ! Mais là franchement... on imaginait le tournage, où tous les acteurs devaient être pliés de rire, et franchement ça vaut son pesant de cacahuètes ! La scène m'a d'ailleurs rappelé la sado-maso party entre la même Charlotte et Alain Chabat, pour faire peur à la belle-mère, dans le très drôle Prête moi ta main ! Sacrée Charlotte... la voilà qui joue même dans les porno de Lars Von Trier maintenant !

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Au début, je me demandais comment Yvan en était arrivé à ce sujet. Je ne voyais pas trop le rapport avec ses précédents films. Yvan le romantique, qui ne cesse de clamer partout son amour pour sa Charlotte... Mais en fait, après réflexion, c'est très logique : dans ses premières réalisations, il s'interroge sur ce mystérieux lien qu'est l'amour, à la fois si puissant et si fragile. Dans Ma femme est une actrice, il livre une réflexion sur la jalousie ; un oeuvre forcément autobiographique, puisqu'il se met en scène lui-même avec sa propre compagne ; impudique mais bourré d'humour. Dans le second Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants, il se penche sur la tentation de l'adultère (Charlotte a avoué avoir eu peur... elle s'est demandé ouh la la, mais pourquoi fait-il un film sur ce sujet ? notre couple est-il en danger ?). Et dans ce troisième volet, il explore cette fois la part inconnue que chacun porte en soi, ce jardin secret, fermé à l'autre, par pudeur, ou parfois simplement parce qu'on la refoule ; cette part inconnue qu'il ne faut pourtant pas ignorer car elle fait partie intégrante de notre personnalité et que trop de secrets peuvent grandement fragiliser le couple. Yvan est bien, au final, un incurable romantique, qui dissèque les mystères de l'amour... Et ceux qui l'aiment, comme moi et comme tant d'autres, ressentent chez lui cette vulnérabilité, cette tendresse, sous une apparence forte et virile, très méditerranéenne. Adorable Yvan.

Car le vrai but du film n'est pas de faire trash (ça ne l'est pas ; c'est juste parfois un peu cru). Le réalisateur parle de la petite part homosexuelle qu'on a tous au fond de nous, idée que les plus psycho-rigides rejetteront avec horreur ! Et pourtant je pense moi qu'il a raison. Il évoque aussi les mécanismes du désir, si aléatoires, si incompréhensibles parfois, une des rares chose au monde qu'on ne peut contrôler (bon, évidemment, maintenant il y a le Viagra... mais franchement cette "béquille" me semble davantage un tue-l'amour qu'autre chose...). Il met aussi en avant les amitiés masculines (ou féminines, ça marche dans les deux sens) où la tendresse a son mot à dire, qu'on le veuille ou non ; tendresse qui chez certains seulement pourra bifurquer vers autre chose. Et puis il questionne même sur l'art et ses "dérives " : le film que les deux compères veulent réaliser est destiné à un festival ; l'art ne peut-il trouver de renouvellement que dans la provocation ? Et c'est bien quand le cinéma nous fait rire tout en posant des questions.

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Tout le coeur du film se condense dans la fameuse nuit à l'hôtel où le suspense est à son comble ! Ben et Jeff passent leur temps à se défier, à se chamailler, cap pas cap, envie pas envie, c'est idiot, c'est drôle, c'est n'importe quoi ! Les deux acteurs sont fabuleux, livrant tour à tour leurs certitudes et leurs doutes, s'affrontant dans un combat... qui n'est pas pour eux mais qu'ils veulent mener par amour du jeu et du défi !

Une autre étonnante surprise : Laetitia Casta ! Je passe mon temps dans ce blog à débiter des méchancetés sur elle et son jeu d'actrice. J'ai pris une claque. Elle est ici fraîche, nuancée, infiniment juste et donne à son personnage plein de petites facettes qui composent un portrait fort attachant. (et, pour l'anecdote... elle possède un petit postérieur absolument parfait, ah ah ah !)

J'aime bien le titre aussi : il évoque bien sûr le célèbre carton que l'on met à la poignée de la chambre d'hôtel pour ne pas être dérangé, mais aussi le petit côté "ne réveillez pas l'eau qui dort", c'est-à-dire "ne titillez pas trop mes pulsions profondes" !

Un film audacieux, mais non vide de sens ; c'est au contraire plein d'intelligence et de sincérité. Moi je dis Bravo Yvan. Le mec, il en a.

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Je suis allée voir ce matin les commentaires divers sur le film, puisqu'il a tant déçu. D'abord, il s'agit d'un remake de Humpday (2009, Lynn Shelton... et des critiques tout aussi mauvaise). On lui reproche donc en premier lieu, c'est l'habitude, de ne pas être à la hauteur de l'original (un comble quand on voit les notes attribuées au premier !). Puis de livrer un film vulgaire et ennuyeux, ridicule et faussement provoc. Le tout en concluant qu'il s'agit d'un film de "commande" et que le réalisateur y a perdu son âme.

Moi je ne savais pas qu'il s'agissait d'un film de commande... et j'ai trouvé que c'était très Attalien ! C'est donc que l'acteur/réalisateur y a mis tout son propre vécu et ses questionnements.

Alors, bref, encore une fois, je ne pige pas ces critiques assassines. Pour une fois qu'on a une comédie française, audacieuse en plus, qui tient la route... Les Français préfèrerent donc les incommensurables sucessions de clichés éculés de Camping ou De l'autre côté du périph' ou toutes ces autres idioties décérébrées...

Allez tiens, je rajoute un demi-point, histoire d'embêter le monde !


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