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Extrait exclusif de « La loi des seigneurs »

Par Sylvie-Uderzo

Extrait exclusif de « La loi des seigneurs »

UNE LONGUE SUITE DE FAITS TROUBLANTS

Est-il bien normal qu’un père de 80 ans convoque sa fille, directrice générale de la société familiale depuis plus de quinze ans, à un entretien préalable sous des prétextes fallacieux (qui seront rejetés ultérieurement par la justice), pour lui dire qu’il voulait simplement lui faire peur et que l’affaire en resterait là ? Et qu’elle ne serait pas licenciée ! N’y avait-il pas d’autres manières d’agir ? Est-il normal que, pour finir, dans les semaines qui suivront, sans qu’un autre événement ne se soit produit, Albert ait finalement procédé au licenciement pour faute lourde de sa fille, et, ce, un vingt-quatre décembre ?

Est-il bien normal, alors qu’Albert me proposait un accord amiable pour que je cesse, en octobre 2007, mes activités pour le petit Gaulois que je reçoive, quinze jours plus tard, une assignation pour avoir à lui rembourser plus de cent vingt mille euros de frais tombés du ciel (affabulation que la justice rejettera ensuite), laissant sous-entendre que j’aurais commis des abus de biens sociaux ? Bienvenue chez les gentils Gaulois ou bien chez les prédateurs capitalistes formés à l’américaine ? Ce ne pouvait être la volonté du dessinateur d’Obélix ! L’objectif évident était dans les deux cas de brouiller les messages entre le père et la fille, les relations entre les générations.

Est-il bien normal, qu’après que Sylvie ait alerté son père par courrier, en janvier 2008, sur des erreurs matérielles graves découvertes dans la gestion de la société familiale, que les avocats d’Albert Uderzo l’aient assignée au tribunal de commerce afin de couvrir leur incurie ?

Est-il bien normal qu’ainsi, dès le début du conflit, par trois fois, l’entourage d’Albert ait décidé de nous traîner devant les tribunaux ? Pour ensuite faire dire à Albert et faire passer le message à certains médias complaisants que nous n’étions que des procéduriers, les méchants, en somme… À l’intérieur d’une famille, s’il n’y a pas de lâcheté, il y a beaucoup d’autres solutions qui évitent ainsi d’étaler les différends sur la place publique.

Est-il bien normal que l’entourage d’Albert lui ait fait engager l’agence de communication la plus chère de Paris, dirigée par Stéphane Fouks, pour lutter contre… sa fille et son gendre ? Ne serait-ce pas trop d’honneurs, mes seigneurs ?

Est-il bien normal que lors de la dernière assemblée générale de la société familiale (père, mère, fille depuis l’origine) à laquelle Sylvie ait pu assister, il se soit passé le fait suivant ? Au moment de procéder au vote des membres du nouveau conseil d’administration, Albert se penche vers son avocat historique, Yves Sicard, pour lui demander s’il est bien nécessaire d’en écarter sa fille. L’avocat, intraitable éminence, insiste : « oui, Albert, c’est nécessaire ». Albert vote, alors, contre sa fille, les yeux baissés… Comment peut-on définir une telle attitude ? Si ce n’est par la sujétion de l’avocat sur un homme âgé alors de 81 ans…

Est-il simplement normal que les enquêteurs de police n’aient effectué les auditions des personnes désignées par la plainte pour abus de faiblesse que quinze mois après nos dépositions ?

Est-il vraiment normal que lors de l’enquête de police consécutive à la plainte pour abus de faiblesse, toutes les déclarations des personnes désignées comme étant susceptibles d’avoir pu commettre des manipulations sur la personne d’Albert n’aient jamais été vérifiées ? Est-il normal que le rapport de police ait pu conclure à un non-lieu alors que l’enquête préliminaire avait relevé un certain nombre de comportements délictueux réalisés par l’entourage d’Albert tels que, notamment, des abus de confiance ?

Est-il bien normal que les constatations policières, dans le cadre de la plainte pour abus de faiblesse, ne soient intervenues, elles aussi, que prés d’un an et demi après le dépôt de plainte ? Les enquêteurs n’ont, en effet, alors que pu constater que les coffres étaient vides et les ordinateurs sans informations exploitables.

Est-il bien normal que lors d’une première audition avec la BRDE (Brigade de répression de la délinquance économique), Albert Uderzo, âgé alors de 85 ans, ait pu déclarer avoir effectué « un troc » avec son notaire à l’occasion d’une transaction immobilière en lui offrant une Ferrari d’une valeur de plus de 200.000 euros ? Puis quelques jours après, lors d’une seconde audition, qu’il se soit rétracté en révélant qu’il s’agissait d’une cession, en réalité, à vil prix, soit pour un montant de 30.000 euros ? Et que les enquêteurs aient pu classer ce « détail » dans la colonne pertes et profits sans que personne n’y trouve à redire ? N’y avait-il pas, là, un indice du fait qu’Albert n’avait plus toute sa lucidité ?

Tous ces détails et bien d’autres seront développés dans l’ouvrage. Car cette affaire confine, comme le lecteur le découvrira, à une incroyable liste à la Prévert, sans la poésie, mais avec en prime, les déviances humaines à la fois modernes et éternelles : corruption, influence, détournement, forfaiture…

La question qu’il faut nous poser est : pourquoi ? Pourquoi tout ce déballage parfaitement inutile ? La réponse est simple : parce que le conflit familial était nécessaire au quarteron d’avocats et d’industriels avides qui avait décidé d’annexer le village des irréductibles. Il fallait créer un écran opaque devant les yeux d’Ada et d’Albert Uderzo afin d’obtenir le Graal recherché : Astérix ad vitam ! Pour ce faire, il était nécessaire de nous écarter, violemment, pour éviter tout rapprochement ultérieur entre la fille et le père, réputés si proches… Mais, ce que tous ces puissants, fardés d’arrogance, ne peuvent jamais tout à fait prévoir, ce sont les réactions sincères qui brisent le cadre dans lequel ils ont souhaité enfermer un dossier. C’est justement ce qui s’est déroulé dans l’écho de leur action du 2 décembre. Car, nous avons décidé, définitivement ce soir-là, qu’il fallait sortir du bois.

 La Loi des Seigneurs. Bernard de Choisy, éditions Michalon.

Disponible dans toutes les bonnes échoppes à partir du 17 avril.


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