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01/05 Politique Française. Quels lendemains ?

Publié le 01 mai 2014 par Jorge
01/05 Politique Française. Quels lendemains ?
Dans un excellent éditorial du Nouvel Observateur daté de ce jour, Laurent Joffrin se demande : Valls est-il de gauche ?
À mon sens, la vraie question du moment serait :Valls ou qui que ce soit d'autre peut-il, en France en ce moment, mener à court ou même à moyen terme une politique dite « de gauche » ?
Sans parler de l'incroyable décrédibilisation du Président Hollande et de son image, que, soit dit en passant, vient de prendre encore un coup qui le suivra longtemps avec le triste spectacle de Carmaux.
 

Dans cette ville, emblématique s'il en est pour la gauche, voir un Hollande s'en tirer d'un mauvais pas face à des habitants par une de ces « petites blagues » dont il est friand, est terrible.

Se sortir d'une difficulté verbale par un trait d'humour lors d'une jute avec des opposants est une chose ; le faire face à un « peuple ami » en plein désarroi est une faute politique majeure et qui se paye lourdement et dans la durée. Il n'en avait pas besoin.
Pour revenir à la politique de Valls, qui n'est qu'une tentative de mise en œuvre assez fidèle à la lettre initiale des annonces du Président depuis décembre dernier, elle renvoie à plus profond et à plus ancien.
 

La gauche, notamment socialiste, n'a pas de « système économique » propre à proposer ; l'existence même d'une possibilité de « système économique » de gauche propre à la « vieille maison » chère à Léon Blum, programmatiquement (et humainement) différente de la (aujourd'hui défunte) version marxiste, n'a jamais réussi à prendre corps depuis 1920. Le marxisme, notamment dans sa version soviétique s'étant définitivement noyé, il a emporté, comme on dit, le bébé avec l'eau du bain.
Les « solutions » scandinaves et de toutes les options socio-démocrates portent sur un « aménagement », une « domestication » ou « régulation » du capitalisme pour corriger ses dommages collatéraux les plus graves, notamment la redistribution des richesses. Mais laissant en place le « moteur » du système capitaliste. Ce sont des variantes politiques visant à faire autant de social que possible sans changer le fond du système économique en place.
Même la version supposée marxiste de la Chine et certains autres « anciens » n'est qu'un capitalisme d'État, impossible à classer comme un système économique différent par son fonctionnement (et comportant pour les travailleurs des formes plus proches du terrible XIXe siècle que de la modernité)
Or, il y a toujours des « contraintes de fonctionnement minimales » propres à ce système, comme à tout autre, qui fixent la limite sans le respect desquelles le système ne peut pas fonctionner correctement.
Le supposé « virage » de François Hollande en décembre dernier n'était que le constat que la France était parvenue à cette limite dans sa structure économique, sans obtenir le résultat « social » recherché et donc perdu toute possibilité d'aller plus loin dans la même voie sauf à courir le risque d'une crise centrale encore plus forte, dont les principales victimes seraient les plus faibles. 

En d'autres mots, le risque d'une explosion encore majeure du chômage et de la précarité des moins favorisés, à court terme et même au-delà.
Si on peut reprocher quelque chose à François Hollande sur ce sujet c'est, comme il le fait depuis son « intronisation », de ne pas faire confiance au « peuple » pour comprendre les problèmes et difficultés du pays et de ne pas s'en être franchement et largement expliqué sur les motivations de sa décision et sur les risques de ne pas remettre en marche le SEUL moteur disponible à sa portée.
Manuel Valls ne fait aujourd'hui qu'orchestrer la mise en œuvre de ce constat.
Comme une difficulté ne vient jamais seule, le délitement des partis politiques a joué et joue encore un rôle de facteur aggravant des difficultés économiques.
Devenus tous plus ou moins autistes, jouant dans l'arène politique essentiellement leurs petites cartes partisanes, ils ont laissé l'Europe s'éloigner des options des fondateurs sans mettre tout leur poids pour tenter d'enrayer ces dérives. 

La dernière preuve de cette légèreté des partis est la désignation des uns et des autres des candidats aux élections de mai prochain, se servant bien trop souvent de cette opportunité pour « recaser » quelques vieilles gloires et récompenser quelques amis plutôt que d'y envoyer des combatifs convaincus et disposés à jouer leur va-tout pour tenter de « redresser » cette Europe qui ne cesse de s'éloigner de ses supposés citoyens et fonctionne de plus en plus comme un club fermé. 
Or, si l'Europe continue sur sa ligne actuelle, d'une entité par trop technocratique, dominée par les idées du libéralisme qui ont envahi le monde entier depuis les années 1980 et le « leadership » intellectuel des lignes économiques et politiques défendues par Mme Thatcher et M. Reagan ; dirigée par les chefs d'États nationaux et non pas par des « grands » européens ayant pleine liberté par rapports aux intérêts particuliers des États et ayant un parlement fort et actif, qui peut effectivement représenter les citoyens européens et contrôler l'exécutif à la place du club de chefs d'États, il n'y aura pas de sitôt d'inflexion, bien au contraire.
Le jeu, principalement des deux grands, le PS et l'UMP, a facilité le renforcement du FN qui, faute de véritable programme et de crédibilité, cache sa nudité et son incohérence sous la critique permanente des autres partis, pointant leurs défauts qu'il prétend ne pas partager, assaisonnée d'une certaine de xénophobie.

Autour d'un noyau permanent, faible et peu représentatif de la population, il a réussi à ramasser des désespérés, des perdu-confiance, des on-ne-les-a-pas-essayé.
Le FN, comme d'autres partis européens de même tendance, ont su exploiter les défaillances et l'usure des autres pour se construire un socle électoral parmi des « laissés-pour-compte » des crises intellectuelles, politique et, surtout, économique.
Quels rôles pourraient encore jouer utilement la majorité socialiste dans ses deux principales composantes : les élus et le PS, pour aller de l'avant sans risquer plus de problèmes pour cette législature ?
C'est un avis personnel de ce chroniqueur, que d'affirmer qu'il n'y a pas, actuellement, d'autre possibilité que de pousser le moteur économique, tel qu'il existe, à accroître son régime et être plus efficace, dans le cadre de sa structure actuelle. Avec tout de même un certain nombre de garde-fous politiques :
-Pas question de tenter de limiter le droit à la critique politique, y compris dans la majorité. Autant, il est nécessaire de la part des élus de ne pas être des « godillots » mais de porter la parole du « peuple » qui les a élus, autant, il faut, par une telle période difficile, qu'ils soient capables de jouer la carte « nationale » et non celle de leur circonscription. D'ailleurs, cela ne doit pas se limiter à la majorité.
-Le PS n'est pas une composante de l'exécutif, mais le parti matrice de l'actuelle majorité. À ce titre, son rôle n'est pas celui de « courroie de transmission » mais celui de « matrice créative ». Il doit profiter de la liberté (relative, il est vrai) de sa situation pour chercher en permanence des solutions à proposer pour éclairer le travail de ses élus et, par eux, du gouvernement.
-De la part de l'exécutif et contrairement à la tendance « naturelle » de la fougue de Manuel Valls et du penchant du Président pour un peu trop préparer ses décisions s'appuyant essentiellement (parfois exclusivement) sur des « comités internes » il est bon pour le gouvernement comme pour le pays que des options et des orientations soient soupesées démocratiquement avant de les inscrire dans le marbre, plutôt que d'avoir à les modifier à posteriori et faire des « reculades » un marqueur de la législature. Les élus et les analyses et recommandations (et critiques) des partis pourraient et devraient jouer pleinement ce rôle d'éclaireurs avant et non après coup.

© Jorge

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