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Pas son genre, film de Lucas Belvaux

Publié le 03 juin 2014 par Onarretetout

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Sans doute, les deux personnages principaux sont-ils un peu « typés » : la coiffeuse de province (et Arras a beau être la ville de Robespierre, c’est quand même la province, et puis ce n’est pas Lille !) et le prof de philo parisien (vêtu de noir mais vivant encore chez papamaman, haute bourgeoisie, fréquentant les concerts classiques). Mais on accepte assez vite les codes de cette histoire. D’autant que les deux acteurs qui les incarnent sont excellents : on s’attache à Jennifer (Emilie Dequenne) et à Clément (Loïc Corbery) en se demandant si leur aventure sera plus qu’une aventure. 

Combien de femmes a-t-il fait pleurer, lui, auteur d’un essai au titre prétentieux et capable, dans une conférence, de dire d’une virgule qu’elle est la question ? Sait-il seulement ce qu’est le désir, pas seulement le désir charnel ? Que connaît-il vraiment de la vie, sociale, amoureuse, humaine ? 

Elle, c’est la joie de vivre incarnée. Son appartement, sur les hauteurs, lui donne une vue panoramique sur la ville au loin, et sur beaucoup de ciel. Quand elle ouvre ses rideaux colorés, le matin, avant de réveiller son fils, elle sourit déjà, même si on se doute que sa vie n’a pas toujours été facile. Un fils, donc, un travail où elle se sait utile (par exemple à cette jeune fille à qui, par une coupe de cheveux, elle redonne de l’espoir), et deux copines avec lesquelles elle chante le week-end dans une ambiance électrique.

Deux mondes. Peuvent-ils se rencontrer ailleurs que dans une chambre d’hôtel ? Parce que Clément ne s’installera pas à Arras où il vit sa mutation comme une punition. Le premier baiser, les corps qui s’accordent, les expériences qui s’échangent (la lecture de l’un, le cinéma de l’autre, jusqu’à danser ensemble)… mais « on n’a pas du tout les mêmes goûts », dit-elle. Ou encore : « Dans quel monde vivez-vous, Clément ? »

Emilie Dequenne passe de la joie de vivre à l’inquiétude, en gardant le sourire. C’est dans son regard qu’apparaissent ses questions ou sa détermination. Et c’est comme si l’ovale de son visage même changeait.

Loïc Corbery a l’élégance froide et détachée qui convient à son personnage, à qui il donne parfois de la gaucherie, des faiblesses, de telle sorte qu’on ne saurait le juger trop vite. 

Sandra Nkake, Charlotte Talpaert, Anne Coesens, Didier Sandre, Martine Chevalier, les seconds rôles donnent l’ancrage social, familial qui inscrit le film dans notre réalité. Et Lucas Belvaux continue d’explorer les genres cinématographiques.


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