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W(e) talk : les héroïnes anonymes…

Publié le 15 juin 2014 par Comnonprofit

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Le 7 juin dernier, j’ai eu le grand plaisir de participer à la toute première édition de W(e) Talk à La Cartonnerie ! Un événement destiné à mettre en lumière des femmes talentueuses aux parcours singuliers, venues partager leur expérience, leurs leçons de vie avec beaucoup de sincérité, d’humilité et d’émotion. Les quatre organisatrices de l’événement Esra, Nathalie, Jehan et Alix, avaient pour ambition à travers cet événement de mettre en avant celles que les français n’ont pas l’habitude de voir sur scène, et dont le parcours peut être source d’inspiration, pour toutes les femmes. Pari réussi !  On ressort gonflée à bloc de cet événement qui met magnifiquement en avant des femmes qui ont dépassé des barrières matérielles, sociales ou psychologiques pour atteindre leurs rêves, leurs ambitions. Cet après-midi rythmé par les rires et les larmes, m’a beaucoup touché… sans doute parce qu’on se reconnaît un peu dans chacune d’entre elles… dans leurs craintes, leurs doutes, leurs épreuves, leurs joies, leurs ambitions… Laissez-moi (essayer de) partager un peu avec vous quelques uns de ces témoignages de femmes que je qualifierais "d’héroïnes anonymes"…

"Ne pas faire siennes les limitations des autres" 

W(e) talk : les héroïnes anonymes…

Béatrice Barbusse femme tenace et courageuse, a su s’écouter et se faire confiance pour ne pas faire siennes les limitations des autres ! Venue "des quartiers", Béatrice avait pour ambition d’intégrer l’école normale supérieure (ENS), quand sa conseillère d’orientation lui répondit "ce n’est pas pour vous" (comprenez : vous n’avez pas la gueule de l’emploi) l’envie de Béatrice s’est alors décuplée : elle travaille dure ses examens, obtient les notes requises et se retrouve bizarrement non acceptée… elle s’interroge, s’indigne, cherche à comprendre et enquête : un fils de député a été privilégié pour prendre sa place. Béatrice ne se résigne pas, bien au contraire : elle porte plainte à 20 ans et obtient gain de cause ! "Rien n’est fait pour nous ? C’est à nous de faire quelque chose pour nous ! On a le droit d’avoir de l’ambition ! " nous explique Béatrice. Une fois diplômée, Béatrice devient maitre de conférence et, passionnée de sport, devient LA première femme présidente d’un club de sport collectif masculin en dirigeant l’US Ivry Handball. "En Europe, nous sommes 4 femmes à diriger un club de sport professionnel". Oui seulement 4 !! Pour atteindre cet objectif, Béatrice a dû se battre, en faire deux fois plus, s’accrocher, faire face aux critiques, aux humiliations, voir aux insultes… "Je n’ai jamais rien lâché pour réaliser mes rêves. Mon histoire démontre qu’en dépit des handicaps sociaux et de genre, on peut avoir de l’ambition". 

"On a le droit d’être revendicatif et exigeant. Je le suis !"

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De l’ambition Elisa Rojas n’en manque pas ! Cette jeune Franco-Chilienne handicapée et avocate est l’une des chevilles ouvrières du collectif Non au report de 2015 qui fustige les nouveaux délais accordés pour l’accessibilité des lieux publics. Elisa partage avec nous son enfance et son handicap qui l’a conduit elle et ses parents à quitter le Chili pour s’installer en Bretagne. Elle nous raconte sa surprise face au regard des autres enfants sur sa différence, elle qui se voit ordinaire… Elisa Rojas affronte avec plus ou moins de difficultés l’école, le collège, le lycée : "J’ai toujours adoré l’école, et apprendre, ce qui m’a permis de tenir jusqu’au bout". Après avoir obtenu son baccalauréat, elle entame des études de droit. Là encore son parcours professionnel n’est pas de tout repos. "Il m’a fallu 18 mois d’efforts avant de trouver un emploi, et la recherche d’un stage, durant ma formation, a été plus longue que pour mes camarades." Là aussi on s’étonne : Elisa n’a pas choisi la facilité ! "Des confrères que j’ai rencontrés se sont parfois demandé comment je pourrais exercer, gérer mes déplacements et les réactions des clients ou des autres avocats. On s’est toujours concentré sur ce que je ne pouvais pas faire, pas sur ce que je peux faire. Ma fierté c’est d’avoir choisi ma voie, mon métier. Je n’ai pas accepté la place qu’on voulait me donner. Je suis avocate, c’est ce que j’aime faire. Le but n’est pas de prouver quoi que ce soit, mais de faire ce que j’ai envie".

"Une amie me dit : ils veulent pas de nous ! Je lui réponds : Pourquoi tu leur demandes ?!?"

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Fatoumata Kebe est doctorante en astronomie. "Ma passion c’est les étoiles, je ne sais pas d’où ça vient !". Une passion pas toujours comprise de son entourage… "Le jour où j’ai réussi mon bac S ma mère m’a demandé de postuler à Carrefour…". Une célèbre enseigne de distribution synonyme de réussite professionnelle ? Mieux que "réussir", Fatoumata veut vivre de sa passion. A la faculté, Fatoumata doit redoubler d’efforts pour compenser ses lacunes liées à un cursus dans un lycée de quartier populaire. Avec en plus un job étudiant, Fatoumata a dû s’accrocher pour intégrer l’Observatoire de Paris, le plus grand pôle national de recherche en astronomie. Uniquement guidée par ce désir, Fatoumata ne prête aucune attention aux potentiels obstacles susceptibles de se dresser devant elle : "Je voulais faire de l’astronomie, je n’avais pas vu qu’il n’y a que des hommes blancs. Alors j’y suis allée". Il n’y avait en effet aucune femme à l’observatoire. Mais avec beaucoup d’humour et de naturel, Fatoumata nous explique que de toute manière elle n’est pas du genre à renoncer parce qu’elle ne rentre pas dans "des cases". "Une amie me dit : ils veulent pas de nous ! Je lui réponds : pourquoi tu leur demandes ?!? "T’es noire, t’es une femme, t’es musulmane, t’es ceci, t’es cela : les gens ils aiment les problèmes !" L’intervention de Fatoumata se transforme en véritable one woman show, la jeune femme qui s’est spécialisée dans la gestion des débris spatiaux nous dit :  "Je me suis battue pour être astronome. Et en fait un jour j’ai réalisé que…ben…je suis femme de ménage de l’espace  ! Ma mère nettoyait les bureaux, et moi je nettoie les débris spatiaux.. y a une évolution quand même !" Après un fou rire contagieux, Fatoumata s’écrie : "J’ai gardé la tête dans les étoiles et dites vous, Inch’Allah, Fatou première femme sur la Lune !"

"A force de me conformer aux autres, j’ai fini par m’oublier"

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Annie Chaperon a choisi de partager son expérience sur l’échec entrepreneurial qu’elle revendique comme un véritable atout ! En tant que salariée, Annie a toujours eu l’envie secrète d’être un jour à son propre compte. En attendant, elle redoublait d’effort, faisait preuve de créativité, portait des propositions à la direction espérant un jour se distinguer pour avoir de plus hautes responsabilités. On lui a alors répondu : ""Ce que vous faites, vous le faites très bien là où vous êtes, alors vous allez continuer !" Il me restait 25 ans à m’ennuyer… "J’ai été naïve de croire qu’il suffit de bien faire son travail pour qu’on me déroule le tapis rouge. Dans le salariat j’ai laissé les autres me dire où était ma place et quelles étaient mes limites." Annie décide alors de se lancer, elle reprend ses études et créée une marque de vêtements bio pour les femmes. Mais voilà tout ne se passe pas comme elle l’aurait souhaité. La crise économique affecte son projet et elle est contrainte quelques mois plus tard de fermer sa boite. Annie Chaperon, est en larmes à l’évocation de son passé "Je me suis trouvée en situation de mort sociale, ni salariée ni entrepreneuse ni même chômeuse. Et de la mort sociale à la mort tout court, il n’y a qu’un pas". Le système Français est en effet très dur :"en France un entrepreneur en échec est bon à mettre à la poubelle alors qu’aux Etats-Unis, on est crédible en tant qu’entrepreneur si on a planté au moins une boite !" Annie a alors ouvert un blog pour partager son expérience, cet échec qu’elle a décidé de transformer en force. Elle a reçu de nombreux messages d’encouragements, de soutiens… "J’ai compris mon problème, le sentiment implacable de manquer de légitimité et de confiance après l’échec. La confiance en soi est un travail de tous les jours. N’autorisez pas les personnes qui ne font jamais rien vous dire que vous êtes illégitime. Vous êtes capables de choses extraordinaires si vous vous autorisez à les réaliser ! Les échecs sont des expériences comme les autres. Il faut capitaliser dessus! Son blog l’a amenée vers sa nouvelle activité : conseil aux PME/TPE !

"Devenue prof, je me suis rendue compte qu’on n’avait jamais dit à ces élèves de ZEP ‘tu peux être qui tu veux être’"

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Karima Mondon, se décrit comme une "erreur sociologique", enfin c’est surtout de cette manière que les autres la considérait petite… Etant d’origine algérienne et issue d’une famille monoparentale et nombreuse, le choc a été total quand elle a intégré une classe "de blonds" dans la chic banlieue du Val d’Oise. Oui quand Karima nous parle de blond, cela n’a rien avoir avec la couleur de cheveux, c’est tout un concept comme le décrivait Gad dans son célèbre sketch ! La surdouée qui savait déjà lire avant même d’entrer au CP, était confrontée aux a priori de ses camarades comme de ses professeurs. "J’ai toujours été première de la classe mais cela ne plaisait pas aux "blonds". Karima aurait pourtant aimé que les gens la voient simplement telle qu’elle est. Heureusement Karima a pu compter sur ses "amis morts" :  les livres, pour s’évader et comprendre que l’essentiel était dans le cœur plus que dans les apparences. Elle reprend cette célèbre phrase de Saint-Exupéry "L’essentiel est invisible avec les yeux. On ne voit bien qu’avec le cœur."  "Je voulais que les gens me voient avec le coeur" "Pour voir avec le cœur il faut se déplacer, il faut se décentrer. C’est ce que j’ai appris à faire."  Une idée d’autant plus parlante pour Karima qui a une maman aveugle. Parmi ses lectures qui ont bouleversé sa vie, le Coran. Elle, qui a « rencontré Dieu , a choisi d’arborer un voile là encore en dépit des a priori. Son ambition : transmettre son savoir, faire ce qui est juste et rester authentique. "J’ai voulu être prof. Je crois que c’est parce que j’ai eu beaucoup de profs nuls" J’ai décidé d’enseigner dans des lycées pro en difficultés. Avec un mot d’ordre qu’elle souhaite transmettre : "Tu peux être qui tu veux être".La preuve : aujourd’hui la petite fille qui était une erreur sociologique est un professeur de lettres et d’histoire dont les compétences l’ont amené à devenir conseillère pour le recteur de l’Académie de Guyane.

"Tu feras tout ce que tu veux sauf de la boxe ma fille ! Ah bon ? Je suis championne du monde aujourd’hui"

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Aya Cissoko est un modèle de combativité et de dépassement de soi. Sa vie est un véritable roman : à 7 ans elle perd son père et sa petite soeur dans un incendie criminel. A l’époque, on ne réclame pas justice pour sa famille… Une famille nombreuse, originaire du Mali et qui vit dans les quartiers, ça n’intéresse pas grand monde… Malgré les difficultés qui se dressent devant sa mère, elle tient le coup et décide coûte que coûte de se battre et de rester en France. " Ma mère ne sait ni lire ni écrire. Elle n’a jamais travaillé mais elle se dit j’ y arriverai". Plus tard Aya, se voir proposé plusieurs activités sportives au sein de son école : contre toute attente elle choisit la boxe. La petite est douée, très douée même… et ce n’est pas du goût de tous : "Les voisins venaient dire à ma mère ‘pourquoi tu laisses ta fille faire un sport de mecs ?’ Aya Cissoko devient championne du monde de boxe française à 20 ans. Elle nous raconte le dénigrement permanent de ses performances par les hommes. "Pour les hommes, une femme qui fait de la boxe est une aberration". Beaucoup ont d’ailleurs simplement refusé de l’entrainer quand elle décide de s’initier à la boxe anglaise. Aya Cissoko pugnace, têtue, accumule les titres de championne : "Championne de France, d’Europe, et du monde la même année : si un homme l’avait fait on en entendrait encore parler !"Ma vie est une vie de combats…j’ai travaillé avec acharnement pour les gagner." Du jamais vu ! Mais voilà qu’après un grave accident, Aya se retrouve interdite de ring. La jeune femme décide alors de retourner à l’école : diplômée de Sciences po, elle se reconvertit en écrivaine, avec le roman Danbé pour lequel elle obtient le Grand prix de l’héroïne Madame Figaro en 2011. Voilà donc une vie de combats, jalonnée d’épreuves et de réussites… Aya tient à nous encourager à nous montrer solidaires : "les femmes doivent "se serrer les coudes"". Ayant perdu récemment sa mère, son principal repère et soutien, elle se dit inquiète pour l’avenir de sa fille. Le combat n’est pas que sur le ring… 

Au terme de tous ces témoignages l’émotion était palpable chez les ambassadrices réunies sur scène tout comme dans le public. L’événement financé grâce aux dons récoltés via une plateforme de financement participatif, était une véritable succès et je suis fière d’y avoir participer en tant que contributrice. Nous avons là un très bel événement qui vient répondre à l’absence de pluralité dans les rôles de modèles féminins en France. Je tiens par ailleurs à préciser que la pluralité et la diversité était sur scène ET dans le public, et ça aussi c’était beau à voir ! A la fin des interventions, je m’empresse de me tourner vers Esra : "Alors c’est quoi la suite?!!" Car oui je prédis une belle et longue route aux équipes de W(e) Talk. En tout cas pour une prochaine édition, vous pouvez compter sur mon soutien ! :) Longue vie à W(e) Talk et bravo à toutes ces belles héroïnes anonymes inspirantes et admirables !

Plus d’infos : http://wetalk-event.com/


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