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Du 25 juin au 1er juillet, au cinéma Gérard Philipe, "Tuez Charley Varrick !" de Don Siegel

Publié le 21 juin 2014 par Journal Cinéphile Lyonnais @journalcinephil

Durant l’été, le cinéma  Gérard Philip propose une sélection de polars des années 70 à 90 !
Le cycle débute par Tuez Charley Varrick de Don Siegel. 

Retrouvez toutes les informations pratiques sur www.ville-venissieux.fr/cinema

Tuez Charley Varrick !
De Don Siegel 

Avec Walter Matthau, Joe Don Baker, Felicia Farr
USA – 1h51 – 1973

Date de reprise 24 juillet 2013 – Version restaurée

Synopsis

Charley Varrick cambriole une banque avec sa femme et un acolyte. Mais il comprend vite que la somme énorme qu’il a dérobée appartient à la mafia, qui lance un tueur à ses trousses…

Un polar troussé à l’ancienne par l’un des spécialistes du genre. D’une efficacité redoutable !

A propos du film

"Réalisateur souvent déprécié, Don Siegel était pourtant un maître du cinéma de genre qui savait développer une dramaturgie avec des plans d’apparence très dépouillée et une véritable science du montage. Il suffit, pour s’en convaincre, de se souvenir de son chef d’oeuvre de science-fiction L’invasion des profanateurs de sépultures ou de ses polars A bout portant et L’inspecteur Harry.

Dès la séquence d’ouverture de Tuez Charley Varrick!, sans doute l’un des ses opus les plus méconnus, Siegel livre une formidable leçon de mise en scène : après un hold-up qui tourne au drame, les deux seuls malfrats qui en sortent indemnes foncent à travers le désert, puis font exploser leur véhicule, avant de se changer en tenues de travail et de regagner leur caravane pour se partager le butin. En quelques minutes à peine, le cinéaste campe les enjeux du récit, sans qu’un seul plan soit inutile, et donne le ton du film. Certes, il s’agit d’un thriller d’action, mais teinté d’ironie et marqué par la revanche du "petit" sur le "gros". Car le protagoniste est un homme de l’ombre, simple pulvérisateur d’insecticides vivant dans un mobile-home, qui se contente de modestes larcins. Jusqu’au jour où il tombe sur une somme d’argent dépassant toutes ses espérances — sauf qu’elle appartient à la mafia… Tout en brouillant sans cesse les pistes et en nous donnant le sentiment que le crime organisé garde une longueur d’avance sur Varrick, Siegel organise l’espace comme un vaste terrain de jeu, où le manipulateur n’est pas forcément celui qu’on croit. Prostituées, revendeur d’armes, faussaire, ou simple banquier provincial — les personnages sont des pions que Varrick et son ennemi sans visage déplacent sur un échiquier grandeur nature avec maestria.

Déjouant encore les attentes et les codes du genre, le réalisateur ne situe pas l’action dans les ruelles sombres d’une métropole suffocante, mais dans les étendues désertiques inondées de soleil du sud-ouest américain. Si la plupart des intérieurs sont nimbés de lumière naturelle — à l’image de la banque ou de l’armurerie —, les deux scènes d’action qui ouvrent et concluent le film se déroulent en extérieurs, en plein jour. Loin de jouer avec les ombres portées d’inspiration expressionniste, Siegel opte pour un découpage ultra-rythmé et organise un affrontement par machines interposées : la voiture contre le biplan. Dans cet univers aux allures de polar rural, des personnages d’enfants ponctuent le film, comme des figures de l’innocence vouée à être bientôt dévoyée : une fillette qui demande au caïd de la mafia de la pousser sur une balançoire ou un petit garçon qui demande au shérif, blessé à la tête, s’il va mourir…

Mais le film doit beaucoup à la bonhomie et au tempérament flegmatique de Walter Matthau dans un rôle où on ne l’attendait pas. Lui qu’on a connu face à Jack Lemmon dans des joyaux de la comédie signés Billy Wilder incarne ici un type qui ne perd jamais son sang-froid, y compris dans les situations les plus inextricables. Sorte de contrepoint placide et drolatique au minéral Eastwood de L’inspecteur Harry, Matthau livre l’une de ses plus belles prestations et dévoile une facette peu connue de son talent." Solaris Distribution

Quelques Anecdotes

Tuez Charley Varrick! (Charley Varrick pour la version originale) aurait dû s’appeler "The Last of the Independents", avant que ce titre ne soit finalement choisi comme tagline de l’affiche principale. Il s’agit également du slogan de l’entreprise de Walter Matthau dans le film

L’une des répliques de Tuez Charley Varrick!, dite par John Vernon, est reprise in extenso dans Pulp Fiction par Ving Rhames/Marsellus Wallace à Peter Greene/Zed : "They’re gonna strip you naked and go to work on you with a pair of pliers and a blowtorch."

Don Siegel – L’efficacité en marche

D’abord archiviste à la Warner, Don Siegel gravit rapidement les échelons pour devenir monteur : il peaufine ainsi son inimitable sens du rythme, puis signe deux courts métrages oscarisés en 1945. Dès l’année suivante, il passe au long métrage avec The Verdict qui connaît un beau succès. Très vite, il s’impose comme un réalisateur efficace de films d’action et de polars. Après le western Duel sans merci (1952) et le film de prison ultra-réaliste Les révoltés de la cellule 11 (1954), il tourne l’un des sommets de la science-fiction des années 50, avec L’invasion des profanateurs de sépultures (1956) : inscrit dans le contexte de la guerre froide et de l’hystérie anticommuniste, le film a été perçu comme la métaphore d’une menace susceptible de s’infiltrer à tout moment au coeur même du pays.

À partir des années 60, il passe d’un genre à l’autre, où il témoigne de son sens aiguisé de la narration et de la dramaturgie, qu’il s’agisse du western (Les rôdeurs de la plaine, 1960), du film de guerre (L’enfer est pour les héros, 1962), ou du polar (A bout portant, 1964). Vers la fin de la décennie, il fait une rencontre décisive avec Clint Eastwood, qu’il dirige notamment dans Les proies (1970) et, bien entendu, dans L’inspecteur Harry (1971). Le personnage de l’inspecteur Harry Callahan, et ses méthodes musclées, déclenchent la polémique : l’acteur et le cinéaste sont accusés d’encourager l’autodéfense, ce qu’ils contestent fermement. Peu importe : Clint Eastwood s’impose en star absolue et s’inspire de son mentor pour devenir lui-même réalisateur.

Par la suite, Siegel dirige John Wayne dans Le dernier des géants, offrant au comédien mythique son dernier rôle, et poursuit sa collaboration avec Eastwood, comme en témoigne L’évadé d’Alcatraz (1979), formidable film carcéral particulièrement irrespirable. Le cinéaste disparaît en 1991, à l’âge de 78 ans. Clint Eastwood lui dédicacera son Oscar pour Impitoyable, l’année suivante.


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