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L’ERE DU CONTEXTE : Big Data, capteurs, géolocalisation….Ces nouvelles technologies qui bouleversent notre environnement (parution en ebook de l’édition française du livre de Robert Scoble et Shel Israel)

Publié le 25 juillet 2014 par Diateino

L’ERE DU CONTEXTE : Big Data, capteurs, géolocalisation….Ces nouvelles technologies qui bouleversent notre environnement (parution en ebook de l’édition française du livre de Robert Scoble et Shel Israel)L’édition française du livre de Robert Scoble et Shel Israel, The Age of Context, vient de paraître en avant-première en ebook. Voici la préface de Marylène Delbourg-Delphis.

« Lorsqu’on parle de « contexte » d’une phrase ou d’un événement, on pense aux circonstances ou aux conditions qui donnent un sens à cette phrase ou cet événement. Le « contexte », sorte de toile de fond, permet de mieux les comprendre, les expliquer ou les justifier en renvoyant à leurs causes profondes à un moment donné. Tout ce que nous disons et faisons est inscrit dans un environnement que nous ne pouvons pas toujours contrôler et auquel nous sommes en quelque sorte assujettis.

Dans L’Ère du contexte, Shel Israel et Robert Scoble étendent et, à certains égards, inversent la notion de contexte. S’il est vrai que nous sommes les enfants de notre temps, agissons et pensons dans le cadre spatio-temporel qui nous est donné, nous sommes plus que le produit d’un contexte, nous en sommes aussi les créateurs par les choix que nous faisons et l’usage de notre libre-arbitre. De nos jours, les nouvelles technologies offrent tant de possibilités que nous avons, plus que jamais, la capacité d’être les artisans de notre propre contexte.

À l’ère de l’hyper-connexion, une multitude de technologies nous permettent de nous situer dans un environnement, d’en comprendre la complexité, de le modifier, et de le contrôler. L’Ère du contexte décrit notre capacité d’adapter notre environnement à nos besoins, d’en extraire les informations pour optimiser nos choix et accroître notre efficacité. Nous vivons dans un monde d’appareils mobiles, de médias sociaux, de capteurs et de services géolocalisés qui nous transmettent continument les données qui élargissent, en même temps qu’elles précisent, les contenus de nos expériences. L’ère contextuelle touche à tous les domaines de notre existence, nous connecte à toutes sortes d’objets, eux-mêmes interconnectés. « Qui aurait cru que quelque chose d’aussi ordinaire qu’un pèse-personne aboutirait à une fonctionnalité Wifi ? », demandait en 2009 Ubergizmo, l’un des meilleurs blogs dédiés aux gadgets créé par deux Français, Eliane Fiolet et Hubert Nguyen. « Le pèse-personne Wifi Withings [une société française] a non seulement un look sorti tout droit d’un film de science-fiction, mais il peut également envoyer (technologie beaming) votre poids et autres données vers un tableau de bord sur le Web, auquel nous pouvons accéder via une application iPhone gratuite. »

Robert Scoble et Shel Israel nous font partager leur enthousiasme pour l’univers de l’humain connecté en prenant des exemples dans le monde qui est le leur, la plupart du temps aux États-Unis. Mais l’ère contextuelle se répand à peu près au même rythme partout dans le monde et des milliers d’entrepreneurs rivalisent d’ingénuité et de créativité. Les uns s’attaquent à d’énormes problèmes d’infrastructure, comme la start-up toulousaine SIGFOX qui propose un réseau global adapté à l’expansion de l’Internet des objets, à faible consommation d’énergie et faibles coûts : « J’ai remis au goût du jour une technologie low cost qui servait aux sous-marins lors de la Première Guerre mondiale. C’est l’Ultra Narrow Band, qui servait à transmettre les signaux en morse », rappelle non sans humour le fondateur de l’entreprise, Ludovic Le Moan. « Avec cette technologie, on traite des signaux très faibles au milieu d’un énorme vacarme ambiant. » D’autres marient avec une rare élégance design et technologie, par exemple Netatmo : dessiné par Philippe Starck, son thermostat pour smartphone permet à l’utilisateur de piloter son chauffage à distance, enregistre les habitudes de son utilisateur et adapte la température en temps réel. June, conçu par Camille Toupet, est quant à lui un superbe bijou mesurant l’exposition au soleil et conseillant les femmes sur la manière de mieux se protéger de ses effets.

Les « wearables » d’une manière générale ont un impact marketing considérable et quand vous portez les Google Glass, vous faites l’objet d’un intérêt tout particulier. Vous pouvez fasciner et attirer vers vous des gens qui veulent les essayer, ou au contraire vous faire rejeter parce que les gens en face de vous ont le sentiment que vous allez les mettre à nu et envahir leur espace privé. Mais s’il est vrai que certaines technologies peuvent générer de la méfiance, voire des phobies, il est non moins exact que les gens s’y habituent plus rapidement qu’on le croit généralement : de nouvelles conventions ou de nouvelles règles de savoir-vivre et de bienséance s’instaurent, comme cela a été le cas pour le téléphone portable. Très rapidement aussi, nous passons outre les inconvénients pour ne plus retenir que les avantages qui sont parfois spectaculaires. Demandez à la patiente de 80 ans opérée dans un centre hospitalier près de Rennes ce qu’elle pense du fait que son chirurgien ait pu transmettre les images de son opération à un professeur au Japon ! « Grâce aux Google Glass, c’était comme si [le Professeur Gotto] était à mes côtés dans le bloc opératoire », confiait Docteur Collin à un reporter de Ouest-France. « Il voyait exactement ce que je voyais moi-même et pouvait interagir avec moi via l’affichage des lunettes. »

Google teste un prototype de lentilles de contact qui devraient aider les diabétiques à mesurer le niveau de glucose dans l’œil et Samsung, de concert avec l’université de San Francisco a ouvert un laboratoire pour le développement de capteurs assurant le contrôle numérique de votre santé. L’Ère du contexte n’a rien à voir avec l’ère magique des automates qui fonctionnaient selon des programmes préétablis ; de nos jours, les capteurs permettent aux objets de recevoir et traiter les informations et donner les réponses appropriées à des environnements variables et compréhensibles à des utilisateurs sans culture technologique particulière. Ces objets sont plus ou moins complexes mais ils sont souvent très simples à utiliser, qu’il s’agisse de la brosse à dents Kolibree, qui répertorie vos habitudes de brossage et identifie les zones brossées incorrectement, ou de Flower Parrot, qui s’occupe de l’entretien optimal de vos plantes.

L’Ère du contexte, c’est la révolution du quotidien, touchant les bijoux comme les tondeuses électriques, les voitures ou les appareils volants sans pilote, des petits objets communiquants comme Nabaztag qui depuis 2005 a fait des petits et encouragé son créateur, Rafi Haladjian, à « développer des systèmes réellement intelligents qui permettent la création de nouveaux services dans tous les domaines de la vie ». La maison intelligente (« smart home ») n’est plus un concept mais une réalité qui se précise à grande vitesse, avec des réalisations fascinantes, comme le rappelle la Commission de régulation de l’énergie (CRE) dans son panorama des projets de maisons communicantes et de bâtiments intelligents dans le monde : « L’éco-efficacité énergétique, avec l’intelligence embarquée dans l’habitat et dans ses équipements, est désormais reconnue comme une priorité par les politiques et les institutionnels ». Celle-ci concerne de nombreux acteurs, qu’ils soient de l’ancienne ou de la nouvelle économie, les fabricants d’appareils électroménagers, les constructeurs de chauffage électrique, les acteurs du monde des télécommunications et de l’Internet, les entreprises de bâtiment, voire les constructeurs automobiles. Ainsi que l’ajoute aussi le rapport, « Toyota développe au Japon, dans le village de Rokkasho, un lotissement intelligent, le Toyota Smart Center, dans lequel le constructeur automobile a associé deux maisons intelligentes, équipées d’un système domotique de gestion de l’énergie, à six véhicules électriques, des Prius hybrides rechargeables. » Même chose, naturellement, pour Honda en Californie, parce que les voitures et les maisons feront toutes partie de la Smart Grid, qui est l’expression américaine désormais utilisée en France pour désigner un réseau de distribution d’électricité « intelligent »

L’Ère du contexte décrit la partie vécue de ce que Jeremy Rifkin appelle la « troisième révolution industrielle ». Quel que soit le domaine, l’idée directrice est celle d’une « smart » assistance à l’utilisateur, c’est-à-dire « un concentré de technologies vous accompagnant dans vos efforts quotidiens », pour reprendre une formule d’Omate pour sa montre connectée, ou vous offrant la possibilité d’augmenter votre réalité, ainsi que le promet Optinvent, une société rennaise qui entend bien concurrencer Google Glass. Cet âge est celui du « Smart-Sensing », qui est le nom que Cityzen Sciences, société spécialisée dans la conception de textiles connectés, a donné à son programme. Il est aussi résolument optimiste : « Il résultera de ce lien entre les gens et les machines une population en meilleure santé, mieux informée, plus consciente des changements de son environnement, plus sûre, plus efficace et plus productive », écrivent Robert Scoble et Shel Israel. C’est un « Meilleur des mondes » complètement inversé, où chacun peut s’attendre à une expérience hautement individualisée et immédiate. Allez-vous attendre un taxi sous la pluie quand Chauffeur Privé, Drive, LeCab ou SnapCar peuvent être là sur-le-champ ? Stéphane Marceau, le cofondateur de la société canadienne OMSignal qui fabrique du smartwear vous donnant des informations sur votre état physique et émotionnel, ne manque pas d’humour en prenant pour devise cette remarque d’Aldous Huxley : « Il n’y a qu’un coin de l’univers que vous pouvez être certain d’améliorer, c’est vous-même. »

Notre monde hyper-smart est bien évidemment un monde de Big Data… L’Ère du contexte ne peut bien entendu pas omettre de se poser des questions importantes comme « Où vont ces données ? », « Qui possède ces données ? », « Dans quelle mesure peuvent-elles se retourner contre nous ? ». Le but de ce livre n’est pas d’y répondre, ni d’accroître les crises de terreur ou de les éluder. Il est certain que seules des données très précises et en très grand nombre peuvent nous fournir les quelques données qui nous importent : les Big Data sont la condition sine qua non des « Little Data » ciblées pour les services hyper-personnalisés que nous attendons. De plus, échapper au ciblage est extrêmement difficile et relève du parcours du combattant, comme l’a raconté récemment lors d’une conférence à Brooklyn (Theorizing the Web) Janet Vertesi, assistante en sociologie à l’université de Princeton, qui essayait de cacher sa grossesse… Mais peut-être que l’expansion de cette ère contextuelle donnera aussi aux utilisateurs les moyens de contrôler totalement les conditions d’utilisation de leurs données à des fins commerciales. L’ère des « ultraprivate » smartphones est déjà là… comme l’est aussi l’ère de nouvelles régulations. Ainsi que le rappelle le Huffington Post, « La vogue du « moi quantifié » (quantified self) va engendrer des flots de données très personnelles qui devront être protégées, avertit la Cnil dans son rapport annuel. »

Bonne lecture !

Marylène Delbourg-Delphis


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