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"L'Homme chauve-souris" de Jo Nesbø

Par Leblogdesbouquins @BlogDesBouquins
Disons que je cherche à réduire ma dépendance aux romans illisibles. Et à éviter la cure de Stephen King, qui ne manque pas de suivre. Prévoyant et rusé, j’avais donc prévu une alternative toute estivale, le polar scandinave. Et Hemingway m’ennuya, et Cendrars m’endormit. Alors que Jo avec sa tête à demi cachée sous une capuche et ses titres qui claquent, serait le complément idéal à mon Cornetto pistache. Ai-je eu raison de placer tant d’espoirs et de promesses, la réussite de ma semaine de vacances, dans « L’homme à la chauve-souris » ? Quelques fois, il faut savoir faire confiance à son instinct, et ne pas avoir le triomphe modeste.

L’avis de JB :

De la chantilly, du chocolat, du caramel et du sirop de fraise svp
Jo Nesbo  franchement, côté story telling, il pèse pas mal :
« But my greatest passion was soccer. I made my first appearance for Molde, a Premier League team in Norway, at the age of seventeen and I was sure I would go on to play professionally in England for the Tottenham Hotspurs. So I started skipping school and I think that, if you asked the teachers at my high school, my very existence came to be shrouded in mystery. My grades tanked, but so what? I was going to be a pro athlete…
Then I blew out the cruciate ligaments in my knees. Probably no loss for Tottenham, but my world came crashing down. School was over and when I got my grades I realized they just weren’t good enough to do the things I had wanted to do. A number of career paths were no longer open to me. So I took a deep breath and signed up to do military service in the far north of Norway. For the three years I was there, I shut myself in every night and every weekend and bulldozed my way through the high school syllabus. And read quite a bit of Hamsun and Hemingway, too. »

Le coup de la carrière sportive brisée, un vrai bon classique devenant un must quand on enchaine avec Hemingway, l’armée, une carrière de journaliste économique et de musicien.
Quand on a une très bonne étoile,  aucune raison de ne pas être audacieux. Jo Nesbo rencontre (comme souvent) le succès en 1997 à la sortie de son premier livre, « L'Homme chauve-souris ».
Et disons que ,depuis, c’est genre “la très grosse réussite”, dixit en toute humilité son site officiel :
« Jo Nesbø has achieved an unparalleled success both in his native country Norway and abroad, winning the hearts of critics, booksellers and readers alike. Translated into more than forty languages, awarded a whole range of awards and boasting record-breaking sales, Nesbø has been lavishly praised by international critics for broadening the scope of the contemporary crime novel, and is today regarded as one the best crime writers of our time. »

Il y a même la sacro-sainte citation de James Ellroy qui va bien. Difficile, avec tout ça, de ne pas se sentir un peu minable.
Suivant la millénaire recette du polar à (long) succès, notre Sherlock Holmes se nomme Harry Hole (celui de Connelly c’est Harry Bosch et c’est encore moins bien). Un profil que Wikipédia a déjà finement examiné, à travers ce beau moment de littérature :
« C'est le stéréotype du policier bourru, alcoolique et grand accro au tabac, qui a peu d'amis et utilise parfois des méthodes peu orthodoxes pour résoudre ses enquêtes. »

Une jeune norvégienne ayant été retrouvée sauvagement assassinée, le gouvernement prend le problème très au sérieux et décide d’envoyer un de ses limiers sur place, en Australie donc. Et voilà notre Harry sur site, aux prises avec un chef local bien gueulard ,mais gentil, et un coéquipier aborigène pas toujours très respectueux des lois. Harry est hanté, Harry fume et boit. Harry est déboussolé, Harry s’intègre. Harry est timide, Harry se révèle viril. Harry est hanté par le souvenir de son ex, Harry rencontre une chouette nana c’est-pas-sérieux-mais-ca-va-le-devenir. Harry est un gros bourin plein de clichés. Heureusement, notre Mc Nulty a son Bunk Moreland. Ancien boxeur, ce fidèle compagnon n’hésite jamais, après quelques verres, à nous régaler de quelques contes et légendes aborigènes qui s’avèrent être les meilleurs moments de littérature de l’ouvrage. Spoiler, il noie sa crise identitaire dans l’héroïne.
Et qu'en y en a plus, ben il y en a toujours
Que dire de l’intrigue faiblarde ? Mon cœur n’a jamais dépassé 60 pulsations-minute, sauf micro-sieste dûe à l’ennui provoqué par ce polar haletant. La chute et son meurtrier sont grotesques, entre auto-psychanalyse et scène finale featuring un crocodile albinos. Le fils spirituel de Bunk étant lui-même boxeur vivant une histoire d’amour avec un travesti et tuant les blondes « parce qu’il est sûr qu’elles ne sont pas de son peuple ».  Et oui, pourquoi se priver et ne pas s’essayer à un peu de critique sociale? Un SDF aborigène affable, une prostituée droguée, un dealer fils à maman-la-hippie et boum :
« Les aborigènes sont presque totalement absents de la vie sociale en Australie, exception faîte de quelques affaires politiques qui touchent les intérêts particuliers et la culture aborigènes. Les Australiens se dédouanent en affichant de l'art aborigène sur les murs de leurs maisons. En revanche les Aborigènes sont bien représentés parmi les bénéficiaires d'aides sociales, dans les statistiques de suicides et les prisons. Si tu es aborigène, la probabilité pour que tu te retrouves en prison est vingt-six fois plus importante que pour un Australien lambda. Penses-y un peu Harry Hole. »

L’écriture est plutôt mauvaise, sans être catastrophique. Phrases trop courtes ou trop longues, vocabulaire récurent, phases introspectives bien jalonnées, efficaces à défaut d’être plaisantes.
Est-ce qu’on peut se remettre d’une expérience comme ça ? Bien sûr, et c’est mon plaisir de repousser pour vous les limites de ma patience littéraire. Et puis il y a cette histoire de brochettes, sublime :
« Harry bondit en avant, frappa et se replia. Le bras droit de l'homme au couteau tomba, inerte, le long de son corps, et l'arme toucha le sol en tombant. Il regarda avec étonnement son épaule d'où émergeait la pointe d'une brochette portant encore un morceau de champignons. »
A lire ou pas ?
Non, mais bientôt pas à regarder, Léo était pas dispo apparemment :
« Le septième roman de Jo Nesbø, Le Bonhomme de neige, devait quant à lui être porté à l'écran par Martin Scorsese. Mais suite à un calendrier trop chargé, ce dernier s'occupera plutôt de la production du film. Ainsi, c'est Tomas Alfredson qui a été choisi fin mai pour réaliser «  Le Bonhomme de neige ». Le calendrier reste encore à définir. »

Disons que c’est vraiment moins bien que James Lee Burke alors que son sheriff Robicheaux n’était déjà pas formidable.
Vos conseils polar sont donc plus que jamais les bienvenus…

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