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Compte rendu de ma 6000D 2014 / Christine Denis-Billet

Publié le 05 août 2014 par Myactivasport

Lundi 7 juillet (Maratrail de Faverges +2 Jours) : Je prends enfin la décision de ne pas faire le championnat de France de 100km le 30 Août. 2 jours après Faverges, j’ai mal aux quadriceps, c’est terrible mais la montagne est tellement belle que je ne peux pas me consacrer au bitume cet été. Trop de contraintes, trop de pression, trop de chaleur peut-être…mon été sera montagne et trail.

Il me manque 2 courses pour le TTN : le chpt de France à Buis les Baronnies le 28 sept (déjà prévu au programme) et une autre : 6000d ou Côte d’Opale 15 jours avant le France : trop loin et trop près du France. Ce sera donc 6000D.
Je téléphone à l’organisation de la 6000d : les inscriptions sont closes mais il y a des désistements…Ouf ! Y’a plus qu’à manger du dénivelé car pour Faverges je n’en ai quasiment pas fait et je rentrais de vacances de Crête…du coup pas de jambes ce jour-là.
Repos complet de 6 jours après Faverges et reprise le samedi pour un cycle de 10 jours optique Montagne. Je bosse mais je suis d’après-midi donc je peux m’entrainer correctement le matin.

christine_denisbillet_podium_6000D_laplagne_2014

Ces 10 jours se passent bien, pas de sortie supérieure à 2h15 mais 3 grosses sorties avec dénivelé, un peu de seuil et une séance de vitesse, histoire de garder du rythme. L’objectif en soi n’est pas la 6000D car le plateau sera relevé cette année : Maud (intouchable), Aline (victorieuse l’an passé et 4ème au chpt de France de trail à Gap), Laureline (2ème l’an passé et toujours un peu devant moi), Laurence (recordwoman de France de 100km, 3 fois vainqueur du marathon des Sables, bref un palmarès envieux !!) et bien d’autres filles aussi.

L’objectif c’est Le Tour de la Grande Casse (le 24 août à Pralognan) et le chpt de France de Trail (le 28 septembre) en attendant une éventuelle sélection pour le championnat du monde de 100km fin novembre.

Semaine d’avant course :

Toujours difficile à gérer pour moi car le stress monte, je cours peu et je bosse du matin (réveil 4h40…)…Heureusement les étapes de Montagne du Tour de France me permettent de me poser un peu…

Vendredi 25 juillet 13h30 (J-1): je sors du boulot, fin des préparatifs et nous voilà partis vers Aime (1h10 de route), je ne me sens pas super bien, j’ai mal à mon tibia et au pied gauche (j’ai glissé sur un trottoir  il y a 10 jours).
Arrivée à Aime, je récupère assez vite mon dossard, m’achète un nouveau camelback que je testerai demain (je suis plutôt adepte du porte bidon, à Faverges je courais pour la première fois avec un camelback et il n’était pas idéal …). Puis je  monte vite à l’Hôtel à Montalbert (annoncé 3* qui se révèle être assez misérable…et beaucoup plus loin que prévu..). Petit footing et qqs lignes pour me dégourdir et destresser ! Puis préparation de mon éqpt pour la course. J’ai l’impression d’être « à côté » de l’objectif, mauvaises sensations…bref la soirée se passe vite, l’orage éclate…ça promet pour demain…il pleut toute la nuit, je dors à peine, réveillée à 3h… j’attends 4h pour me lever déjeuner et à 5h15, on est à Aime. Il pleut toujours un peu, 12°C, et il y a du brouillard en altitude…ouh la la, mais qu’est-ce qui m’a pris de m’inscrire ?

Dernières paroles à mon homme, j’ai peur, j’ai un mauvais pressentiment, je sens que je vais abandonner….Un peu d’échauffement, je mets ma veste et un cuissard plutôt qu’un short, j’ai peur d’avoir froid là-haut. Nous voilà partis vers le départ en trottinant, le sac semble impeccable…Un dernier bisou à mon homme et je rentre dans le sas, j’essaie de me mettre le plus devant possible sans être avec les stars.

5H50 briefing : pas de montée au Glacier car trop risqué, flocons annoncés là-haut, bref parcours de repli à partir du Col de la Chiaupe (mi-course) mais kilomètrage  maintenu et un peu moins en dénivelé.
Pas de souci on fera avec. J’enlève ma veste car j’ai peur d’avoir chaud ; il pleut moins.

6h Top départ. Je pars à bonne allure, j’ai peur de me retrouver coincée sans pouvoir doubler derrière une file de coureurs au premier raidillon. Traversée d’Aime puis descente vers l’Isère, qu’on longe pdt qqs minutes : route puis piste forestière, je double qqs filles  dont,  il me semble, Anne Valéro. Au bout de 15minutes de course, j’attaque le sentier. C’est très sombre et un peu boueux. Mais ça va, pas trop de densité, donc je ne suis pas gênée, les jambes ont l’air de tourner, pas de douleur. Qqs passages plus pentus m’obligent à alterner course-marche. 2 filles me doublent. Traversée du village de Longefoy en 45minutes environ, je passe 4ème femme ex-aequo. Ça va toujours, il ne pleut plus mais il y a un peu de brume. Arrivée au village de Montalbert après 1h02 de course, beaucoup d’encouragement des spectateurs (merci le prénom sur le dossard !). Je suis 4ème . Jusqu’au début de la piste de Bobsleigh, je prends le temps de m’alimenter solide. Le parcours est gras mais ça reste praticable et finalement assez roulant.

La népalaise me double dans un petit raidillon, je ne cherche pas à suivre. Qui va piano, va sano….
Kilomètre 13 environ, pied de la piste de Bob. Grande première pour moi, ce passage restera gravé dans ma mémoire longtemps… Certes c’est un goulot de bitume mais  une mélodie classique  m’accompagne dans cette ascension (musique que j’apprécie mais dont je ne me rappelle plus l’auteur) et ça m’en colle des frissons. Les 50 derniers mètres sont indescriptibles : une grosse ambiance, avec le tam tam des tambours et le cri des spectateurs…Enormissime !

J’ai rattrappé la népalaise à la sortie de la piste de Bob à la 4ème place en 1h39 de course. Mais les choses sérieuses commencent, le sentier devient plus abrupt et la népalaise prend le large… impossible de suivre, c’est trop raide pour moi. Philippe, de l’AS Aix les Bains me double, il a l’air surpris de me voir si devant. Je le laisse partir, sa foulée semble facile ! Jusqu’à Plagne-Centre, 1er ravitaillement (20ème kilomètre), je  gère la montée sans me mettre dans le rouge, donc beaucoup de marche rapide, je pousse sur les cuisses, je prends un gel. Arrivée à Plagne centre avec une autre fille (Agnès qui m’a rattrapé en haut de la piste de ski) en 2h17 environ. Une autre fille arrive juste après je crois que c’est Aline mais en fait c’est Cécile (même éqpt). Patrice remplit mon camelbak (mais pb pour reboucher donc perte de temps, ça m’énerve !!!), je récupère qqs gels, mes manchettes car je sens l’air frais…Du coup je repars à la 6ème place,  je ne vois pas même plus Agnès et Cécile devant : j’ai vraiment perdu du temps !

Je ne m’affole pas et monte à mon rythme en essayant de marcher le moins possible mais même sur le sentier balcon assez plat j’ai du mal à allonger la foulée. L’altitude commence à faire son effet, on est 2000m, le cœur palpite un peu plus vite. Enfin, je vois Agnès au loin avec ses bâtons et ça me relance. J’aborde le plan Leychoum derrière Agnès. Je perds ma veste mal accrochée à mon camelback, heureusement un gars me prévient et me la ramène. Je repars. Au lac des Blanchet je remonte sur Manu Gault, je le double, je reperds ma veste et il me rattrape pour me la redonner. Il n’est pas bien ; on discute un peu. Je remets ma veste (au moins elle ne retombera plus !) car il commence à faire froid, on ne voit pas à 50mètres, le brouillard est épais. On entend les « œufs » qui amènent les spectateurs jusqu’à la Roche de Mio mais on ne voit pas le sommet. C’est avec Manu que je vais monter là-haut… Ses encouragements me forcent à recourir dès que c’est possible : avant le sommet je double Agnès et la Népalaise et les premiers garçons du petit parcours me doublent à une belle allure. Je suis 4ème en haut en 3h22.

Beaucoup d’encouragements, c’est cool ! Patrice me ravitaille en haut, il ne peut pas aller au ravito 2 : Col de la Chiaupe. J’ai froid, un panneau indique qu’il reste 37km ! J’attaque la descente assez bien, elle n’est pas technique et j’arrive au Col de la Chiaupe (2500m d’altitude, kilomètre 26) assez vite. De plus en plus de coureurs du petit parcours reviennent sur moi mais je remonte aussi sur un groupe de coureurs de la 6000d. Qqs cris de marmotte (j’adore !) mais pas possibilité de les voir ! Je connais la descente, et je ralentis un peu pour éviter de me faire mal. Dans le vallon, il fait beaucoup moins froid et le temps s’éclaircit, c’est bcp plus agréable ! A la traversée du ruisseau nous bifurquons vers la droite pour prendre le fameux parcours de repli, le petit parcours file à gauche vers le Dérochoir et Le Carreley. Maintenant je vais vers l’inconnu, je ne connais pas cette portion !

Les hectomètres défilent, le sentier est large et peu technique. Traversée d’un ruisseau, l’eau est très froide !!! un troupeau de moutons, un petit salut au Berger. C’est typiquement savoyard ici ! J’en profite pour faire une pause pipi et m’alimenter correctement, la suite risque d’être un peu raide vers l’Arpette vu le dénivelé qu’on vient de descendre. …Pdt qqs kilomètres, on suit une piste large assez agréable en forêt très roulante mais je choisis de rester derrière le groupe de gars qui me précèdent. Plus de 4h de course déjà, j’ai mal aux jambes mais rien comparé au trail de Faverges.

Petite portion de route, je mange une barre, j’enlève ma veste puis voilà le carrefour avec le sentier qui va nous mener à la tête de l’Arpette : je lis l’inscription sur le panneau jaune : altitude 1647m ! Ouh la la, l’Arpette se trouve à 2340m. 700m de dénivelé à gravir, ça va faire mal !!! Effectivement, la première pente est assez raide. Mais j’essaie de garder le rythme , de pousser sur mes cuisses, je serre les dents…

On arrive à un contrôle + petit ravito (je saurai après que c’est Plan bois-38ème km). Ça sent la soupe mais je ne bois qu’un verre d’eau et je repars vite car j’ai vu la 3ème féminine 200m devant. Ça me donne un coup de fouet, je jette un coup d’œil à l’arrière pour voir si une fille revient sur moi. Je n’ai aucune indication de l’arrière donc je me focalise sur Cécile devant. Après la traversée de prairies et d’une portion de forêt, j’arrive sur un petit sentier monotrace bien joli avec des rhododendrons fleuris, ça zigzague, c’est très sympa ce versant. Je remonte assez facilement sur Cécile qui est à la tête d’un groupe de garçons. Je reste derrière pour récupérer et je m’alimente sérieusement. Va me falloir de la force pour la descente ! J’observe un peu Cécile et  essaie de jauger de son état mais ce n’est pas évident. Je reste derrière jusqu’à l’arrivée au sommet des pistes de ski, l’encourage en la doublant, demande si Aline est devant ; « non, non la 2ème est inconnue, Aline est derrière ». Ça me rassure un peu mais m’alarme aussi car Aline est une bonne descendeuse d’après ce que j’en ai lu. Donc va falloir se battre pour cette 3ème place !

Au loin, je vois l’Arpette et le poste de contrôle ainsi que les coureurs du petit circuit qui arrivent du Carroley. Nos routes se rejoignent là, ils sont à la queue leu leu… Dernier raidillon sur la piste de ski, je ne regarde pas derrière, je passe le poste de contrôle en 3ème place (kilomètre 42). Je bascule dans la descente herbeuse assez roulante et double beaucoup de coureurs. C’est la masse du petit circuit.

J’ai un peu mal aux cuisses mais je me sens assez bien donc je ne me pose pas de questions. Je reviens sur Philippe qui est  au plus mal, lui dit de prendre ma roue. Un autre coureur rattrapé me dit que la 2ème fille est juste devant , ça me donne des ailes et je traverse Belle-Plagne de belle façon encouragée par le speaker («  très belle foulée de Christine DENIS-BILLET qui remonte sur la 2ème »), à cet instant je n’ai plus mal et  je me dis que peut-être un podium ou une 2ème place est possible… le pied !. Il est temps d’arriver à Plagne-Bellecôte (kilomètre 45.5) car je suis à sec…j’ai soif ; le soleil est arrivé et la descente vers la plaine risque d’être chaude ! Arrêt au stand  juste derrière la 2ème. Patrice se dépêche de remplir mon camelback, me dit qu’elle est morte, me donne des gels, j’avale qqs verres de je ne sais pas quoi sur la table de ravito et je repars à quelques secondes de la 2ème au bout de 5h34 de course. Les encouragements fusent, c’est vraiment le pied !

Je sais que la descente est longue (20km) et qu’elle risque de faire mal aux jambes. Effectivement dès la sortie de Bellecôte, je sens que les jambes sont lourdes et qu’elles me font mal. A cet instant, je pense à une amie qui vient de se refaire opérer (rechute de cancer) et la souffrance est moins difficile à supporter. La 2ème est 100m devant et jusqu’au ravito de Montchavin les positions resteront comme cela. Je n’arrête pas de boire. Au ravito (6h20 de course kilomètre 54), je m’arrête pour boire de l’eau gazeuse fraîche, manger un peu de banane. La 2ème est passée sans s’arrêter, je ne la reverrai pas. Le speaker et les spectateurs m’encouragent, je repars avec le sourire aux lèvres, ça donne des forces ces encouragements !

Il reste moins de 10km, je rejoins un coureur avec qui je finirai, me contentant de ma 3ème place, je suis fatiguée, lui aussi. On traverse une jolie portion dans la forêt, c’est souple et il y a bcp de racines. Il faut éviter de tomber ! C’est sympa ici mais c’est une succession de dos d’âne, un peu casse pattes ! Je commence à avoir des renvois et mal au ventre mais c’est bientôt la  fin.
On court, on marche, on s’encourage mutuellement. 2 autres garçons nous doublent sur cette portion, à qui je demande si une fille revient de l’arrière. « Non non tu as de la marge ! ». Ouf ! J’ai hâte d’en finir…. J’ai soif et je suis à sec. Les 3 derniers kilomètres de piste cyclable et de traversée du village d’Aime me paraissent interminables, je regarde souvent derrière… Voilà c’est bientôt fini, je suis morte mais heureuse ! Je suis troisième de la 6000D, 13 ans après cette même troisième place acquise ici même sur le parcours plus court.

Podium 6000D Christine Denis-Billet

Je parcours les derniers 500m avec Philippe (1er V2) et avec les mots du speaker qui annonce mon arrivée en citant qqs beaux résultats de mon palmarès. Ça me gonfle d’émotion, je tends la main à Philippe et c’est à 2 qu’on finira cette course magnifique en 7h18 ; à 27minutes de Maud et 2minutes de Charlie.
Bises et remerciements à Philippe !

Bises à Maud et Charlie ( qui m’attendent pour le podium d’après course) pour les féliciter et  qqs mots au speaker avec le sourire et bcp de joie car je suis 1ère vieille !.Patrice m’embrasse et me félicite. Je sais qu’il est fier de moi-même s’il ne dit rien. Quel bonheur ! Et quelle émotion sur le podium ! Je ravale mes larmes, il ne faut pas pleurer ! Ce n’est pas une victoire mais c’est presque ça pour moi. Je progresse et les sensations en montagne reviennent. Ma course est loin d’être parfaite et il me manque de quoi mieux finir. Mais j’arrive à m’alimenter correctement sans avoir de douleur (par rapport aux 100km de Vendée c’est le jour et la nuit !) et à supporter un camelbak, chose quasi impossible avant.

Il me reste maintenant à travailler encore et encore, et, un jour ça finira par payer avec un beau, un grand résultat !


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