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[Critique série] HOUSE OF CARDS – Saison 1

Par Onrembobine @OnRembobinefr
[Critique série] HOUSE OF CARDS – Saison 1

Titre original : House of Cards

Note:

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Origine : États-Unis
Créateur : Beau Willimon
Réalisateurs : David Fincher, James Foley, Joel Schumacher, Charles McDougall, Carl Franklin, Allen Coulter…
Distribution : Kevin Spacey, Kate Mara, Robin Wright, Corey Stoll, Michael Kelly, Kristen Connolly, Sakina Jaffrey, Constance Zimmer, Sandrine Holt, Mahershala Ali, Gerald McRaney, Michael Gill, Rachel Brosnahan…
Genre : Thriller/Drame/Politique/Adaptation
Diffusion en France : Canal Plus
Nombre d’épisodes : 13

Le Pitch :
Frank Underwood, élu démocrate à la Chambre des représentants et chef de la majorité, attend avec impatience sa nomination au poste de Secrétaire d’État, après avoir aidé le Président Walker à gagner les élections. Ce dernier, pourtant, n’honore pas sa promesse… Plongé dans un profond désarroi, Underwood, avec l’aide de son épouse dévouée, met à profit son expérience et sa roublardise pour élaborer un plan afin d’éliminer les opposants à ses projets, et monter les échelons du pouvoir. Il se rapproche ainsi de Zoe Barnes, une ambitieuse journaliste au Washington Herald, prête à tout pour obtenir le scoop susceptible de faire décoller sa carrière…

La Critique :
Frank Underwood est prêt à tout. Y compris à briser le quatrième mur. Celui-là même qui sépare le public des acteurs. En s’adressant régulièrement à nous, au beau milieu de l’action, Underwood se confie au spectateur, au sujet de ses manigances et permet alors une immersion rare.
La principale originalité de House of Cards est là. Dans la destruction de ce quatrième mur. Dans la disparition d’une frontière, permettant une distance rassurante quand on doit frayer avec des personnages plus que malsains. Des types comme Frank Underwood…

À l’instar de Dexter, de Breaking Bad, ou encore de Game of Thrones, House of Cards se distingue par son désir de mettre au premier plan un anti-héros. En pleine crise économique, Frank Underwood apparaît comme la pire des enflures, pour la simple et bonne raison qu’il tire les ficelles, dans l’ombre d’une administration américaine confrontée aux difficultés inhérentes à un contexte socio-politique tendu. Plus encore que Dexter Morgan, au fond pas si méchant si on en juge sa volonté de ne dessouder uniquement que les sales types, Underwood s’attaque à tout le monde. À une époque où la confiance placée en nos dirigeants vacille plus que jamais, le personnage incarne une roublardise redoutée et symptomatique. Logiquement, la série met alors en scène des manigances absolument terrifiantes, car ancrées dans une réalité tangible et répondant du même coup à des doutes légitimes concernant les coulisses du pouvoir dont nous subissons tous l’influence.

Qui d’autre que Kevin Spacey pouvait incarner ce génie du mal à la fois de manière si attachante et remarquablement extrême ? Évoquant ses précédents rôles dans des long-métrages comme Swimming with Sharks (où il incarnait un patron de studio hollywoodien tyrannique), Las Vegas 21 (où il campait un prof spécialiste dans le comptage des cartes au black-jack), Margin Call (et son personnage de trader impassible) et même pourquoi pas Superman Returns (où il était Lex Luthor), son Frank Underwood est incroyable d’intensité sous-jacente et de rage contenue et canalisée. D’emblée, Spacey se présente comme le pivot d’une intrigue à tiroirs, passionnante et dense. Épaulé par la froideur clinique en voie d’effondrement d’une Robin Wright investie, et opposé à l’innocence feinte de la sublime Kate Mara, absolument parfaite dans un personnage lui permettant de mettre à profit l’étendue d’un jeu beaucoup plus vaste qu’il n’y paraît, Kevin Spacey incarne à lui seul les fondations de House of Cards. Autour de lui gravitent les scandales, qu’il absorbe tel un trou noir dénué d’émotions primaires, si ce ne sont celles qui nourrissent ses noirs desseins.

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Beau Willimon, le créateur et scénariste en chef du show, sait de quoi il parle. Ayant bossé dans l’ombre d’Hilary Clinton (entre autres personnalités publiques), il se passionne pour la politique et tient à conserver une certaine exactitude, quand bien même son travail penche évidemment vers le thriller pur et dur, avec tout ce que cela sous-entend de rebondissements propres également à la production télévisuelle.
Les connaissances de Willimon permettent à House of Cards de s’avérer parfois très complexe. En particulier pour nous français, qui ne sommes pas spécifiquement familiarisés avec le fonctionnement de la politique américaine. Ok pour le Président et le Vice Président, mais quid du Whip et des autres postes de l’administration ? Au fil des épisodes, les intrigues avancent, et peuvent s’avérer plus ardues à suivre si on s’attache à comprendre exactement qui fait quoi aux côtés du Chef du Monde libre ou en face, dans le camp de l’opposition.
En cela, la série s’inscrit dans une grande tradition américaine, visant à proposer au public une immersion dans les coulisses du pouvoir. À l’instar de À la Maison Blanche, House of Cards prend pied au sommet de la hiérarchie. La différence majeure, c’est qu’ici, tel que le suggère le titre (le Château de Cartes), c’est le côté obscur qui est souligné. Gangréné par un opportunisme sans limite et par l’instinct de survie et l’appétit de pouvoir de son maître du jeu, le château se fragilise tandis que le pouvoir se concentre entre une seule paire de mains.

Produite par David Fincher, également réalisateur des deux premiers épisodes (les bien connus James Foley et Joel Schumacher prennent ensuite le relais, parmi d’autres réalisateurs), la série phare de Netflix jouit de la même ambiance graphique que ses longs-métrages. La photographie, sublime, est aussi froide que léchée, enveloppant les architectures majestueuses de la ville de Washington D.C., alors qu’au premier plan, entre les appartements miteux et les duplex luxueux, se joue un jeu des trônes brutal, très judicieusement orchestré par le génie des atmosphères viscérales.
Le fan nage en eaux familières. On est bel et bien chez Fincher. Son style, puissant, confère à l’intégralité de cette première saison (et de la deuxième) son identité, offrant à la narration un terreau parfait pour se développer et aux personnages l’ampleur nécessaire pour tisser leurs toiles.

La grande force de House of Cards réside dans la faculté de proposer quelque chose de complexe, mixé à des codes bien connus, que la série détourne à son avantage. Ce qui lui permet de ne pas perdre des spectateurs en route. Valse de faux-semblants, habitée par des protagonistes retords, la série n’est jamais manichéenne. Elle ne plie jamais face aux conventions morales et se place en cela dans le sillage de cette nouvelle tendance télévisuelle caractérisée par son désir de mettre l’anti-héros sur le devant de la scène.
En abattant ce quatrième mur, House of Cards met le spectateur dans la confidence et renforce le malaise. La première saison met certes un petit moment pour positionner ses pions sur le grand échiquier de la politique américaine. Ensuite, les pions s’animent et l’addiction s’installe. 13 épisodes suffisent pour se rendre compte de la grandeur de l’entreprise. Sombre, le spectacle joue sur la fascination pour ces figures du mal qui osent tout. Bien plus maîtrisé que Dexter (par exemple), dont le jeu du chat et de la souris ne pouvait pas perdurer dans le temps avec la même force, House of Cards sait entretenir le suspense et renouveler ses enjeux. La course au pouvoir ne fait que commencer pour Frank Underwood…

@ Gilles Rolland

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Crédits photos : Netflix/Canal Plus

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