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L'édition en ligne : un nouvel eldorado ?

Publié le 22 mai 2008 par Pierre Mounier

L'édition ligne nouvel eldorado

J'ai récemment été invité par l'association EnthèSe des doctorants de l'ENS LSH à venir parler dans une après-midi de réflexion consacrée aux enjeux de l'édition scientifique. Pour cette double table-ronde, s'exprimaient Yves Winkin, Catherine Volpilhac, Kim Danière de Cyberthèses, Olivier Jouslin, sur les questions de la publication de la thèse et de son rôle dans l'évaluation du jeune chercheur. De mon côté, je m'exprimais dans une seconde session consacrée plutôt aux enjeux de l'édition. J'ai eu le plaisir d'écouter l'exposé très intéressant de Jean-Luc Giribone, que je ne connaissais pas, des éditions du Seuil, et Denise Pierrot, d'ENS éditions.

Intervenant en fin de journée, je tenais le rôle de Mr Edition en ligne. Il me revenait donc d'expliquer le phénomène à une audience de doctorants en sciences humaines et sociales, dont, finalement, assez étrangers à ce qui s'apparente quand même à des discussions au sein d'un petit milieu. Voici donc l'essentiel de mon exposé auquel j'ai tenté de donner un tour relativement didactique.

En guise d'introduction, il me semble nécessaire de faire le point sur un certain nombre de questions qui ont structuré les débats sur l'édition électronique depuis 10 ans. A mon sens, ces questions sont aujourd'hui largement obsolètes :

1.La désintermédiation. C'est le terme par lequel on a pu dire que la mise en ligne des publications scientifiques revenaient à la suppression des intermédiaires (ie les éditeurs). On passerait donc à un modèle de distribution directe du producteur au consommateur. On sait aujourd'hui que cette approche n'est pas pertinente, parce que toute forme de communication est marquée par la présence d'intermédiaires, aussi discrets soient-ils. Aujourd'hui, les plate-formes où les utilisateurs sont invités à déposer leurs propres productions (les archives ouvertes par exemple), sont des intermédiaires. De par sa seule existence la plate-forme a un impact éditorial sur les contenus qu'elle héberge ; impact dont il faut tenir compte.

2. L'électronique versus le papier : faut-il publier au format électronique ou papier ? Cette question ne vaut plus la peine d'être posée ; en ces termes en tout cas. La réalité est qu'aujourd'hui, l'édition est forcément électronique ; les auteurs, les éditeurs, les chefs de fabrication et même les imprimeurs travaillent en numérique. La question du papier est donc réduite à celle du support de diffusion. Et même dans ce cas, elle ne concerne qu'un certain type de documents. Typiquement, les livres. Pour les revues, on est aujourd'hui dans une situation où il est peu imaginable qu'une revue s'abstienne d'être diffusée en ligne (ou alors elle se prépare un très mauvais avenir). La question qu'elle peut éventuellement se poser est de savoir si elle a intérêt à être diffusée AUSSI sur papier.

3. La chaîne du livre : est-elle remise en cause par l'électronique ? Ce concept de chaîne du livre me semble inopérant pour penser les mutations actuelles ; parce qu'il désigne un secteur professionnel consacré à la fabrication et la diffusion du livre comme objet matériel et non type documentaire. Bref, il écrase le concept de livre sur son actualisation physique et ne cherche pas à le penser d'abord comme objet intellectuel. Finalement, le concept même de chaîne est inopérant parce qu'il ne rend pas compte d'un mode circulaire de circulation des savoirs et pense les choses comme une transmission unilatérale.

Au bout du compte, il apparaît nécessaire, si on veut essayer de comprendre ce qui est à l'oeuvre avec l'édition électronique de remonter à un plus haut niveau de généralité, d'élargir la perspective, c'est à dire de repartir de la définition même de ce qu'est l'édition. Bref, il faut ouvrir la boîte noire.

Qu'est-ce que l'édition ?

C'est une activité hybride, bâtarde, qui se développe à partir de l'idée de mise au jour, de transmission. L'édition scientifique, et singulièrement l'édition scientifique de sciences humaines peut être approchée par trois côtés.

1. C'est d'abord une activité économique. Ce qui définit d'un point de vue fonctionnel un éditeur, c'est sa capacité à mobiliser des ressources économiques qu'un auteur ne peut ou ne veut mobiliser pour diffuser, donner à connaître son oeuvre. Depuis la deuxième moitié du XIXème siècle, l'édition est une activité industrielle ; elle appartient au secteur des industries culturelles.

2. Qui est fortement articulée au champ scientifique : Communication : the essence of science, écrivait Garvey en 1980. Autrement dit, des connaissances, des résultats de recherche qui ne sont pas connus, pas diffusés et partant, pas discutés n'existent pas dans le champ scientifique. Le moteur de l'activité scientifique, c'est la circulation interne au champ scientifique des résultats de la recherche ; l'édition joue donc un rôle essentiel dans ce champ

3. et inscrite dans la société : une particularité des connaissances produites dans le champs des sciences humaines est qu'elles impactent la société par des publications essentiellement, qui vont jouer un rôle important dans le débat public, alors que les sciences exactes impactent la société plus fréquemment par la médiation de l'ingénierie.

Au point de jonction entre ces trois dimensions, on trouve un modèle, qui s'actualise dans le mode de fonctionnement des maisons d'édition et des presses universitaires. Cette construction a fait modèle jusqu'à présent par héritage ou souvenir d'une période particulière, celle des années 60-70 que l'on qualifie d'« âge d'or des sciences humaines ». Jusqu'à présent, il me semble que tout le monde a eu cet âge d'or en tête comme un idéal régulateur. C'est idéal repose sur une conjonction miraculeuse entre les trois dimensions que j'ai évoquées. En gros, l'idée est qu'une décision de publication satisfaisait les trois dimensions alors convergentes. Editer Levi-Strauss (Lacan, Foucault, Barthes, etc.) se traduisait à la fois par une réussite économique, consacrait en même temps la valeur scientifique de l'auteur (et lui permettait du coup de progresser dans le champ – avec le Collège de France comme Pôle magnétique), et enfin impactait fortement le débat public.

Je ne me prononce pas sur le caractère réel ou mythique de cette conjoncture. Je dis simplement que nous l'avons tous en tête comme idéal lorsque nous pensons à l'édition de sciences humaines et qu'il a longtemps fonctionné comme idéal régulateur orientant le comportement de la plupart des acteurs.

Or, nous sommes tous en train de faire le constat que ce modèle ne fonctionne plus, qu'il n'est plus opérant. On assiste à une divergence entre les trois dimensions (on peut esquisser des pistes d'explication : la financiarisation du secteur de l'édition, la sur-spécialisation des sciences humaines ou les effets désastreux de la médiatisation du débat public. En tout cas, il semble bien ne plus fonctionner, et c'est ce qu'on appelle « la crise de l'édition de sciences humaines ».

Cela posé, je vais maintenant essayer de dresser une esquisse d'un nouveau contexte de publication en émergence, où, effectivement, l'édition électronique joue un rôle important.

La dimension économique d'abord

elle est caractérisée par un phénomène assez bien compris maintenant et qui est qualifié de « longue traîne », proposée par le journaliste américain Chris Anderson. Sa proposition repose toute entière sur l'analyse de la loi de distribution de la richesse, modélisée par l'économiste italien Vilfredo Pareto à la fin du siècle dernier. Appliquée au commerce, cette loi de distribution rend compte du fait que de manière générale pour tout type de produit, environ 80% des ventes sont réalisées sur 20% des produits. Pour le dire de manière moins mathématique, le succès commercial est réparti de manière très inégalitaire. Cette constatation de sens commun mais qui a fait l'objet d'une modélisation mathématique a des conséquences particulières pour la distribution des biens physiques. Elle explique en particulier que sur un catalogue total comportant plusieurs millions de livres disponibles en théorie, les libraires, qui ne peuvent en proposer à la vente qu'un nombre limité, pour des raisons de simple rationalité économique vont concentrer leur offre sur ceux qui se vendent le mieux ; les best-sellers. Dans un environnement physique, il est très coûteux d'agrandir un magasin, d'ajouter des linéaires, bref, d'augmenter son offre. Il n'est donc pas intéressant de le faire pour accueillir des produits pour lesquels la demande est trop faible. On a donc une situation classique de rareté créée par les conditions de rentabilisation des investissement dans le monde physique. La théorie de Chris Anderson repose sur l'idée intéressante que les propriétés économiques des objets numériques sont fondamentalement différentes. Ainsi, pour prendre l'exemple de la musique, s'il est très coûteux pour un disquaire classique de proposer dans ses rayonnages une très grande diversité de CD - dont la plupart seront vendus à un très faible nombre d'exemplaires, il n'est pas plus coûteux pour un disquaire en ligne de proposer sur son serveur une très grande diversité de fichiers mp3 plutôt qu'un faible nombre. Autrement dit, un CD supplémentaire dans un rayonnage physique, coûte proportionnellement beaucoup plus cher qu'un fichier mp3 supplémentaire sur un serveur. Donc, alors que dans un environnement physique, la rentabilité réside seulement dans la vente à un grand nombre d'exemplaires d'un faible nombre de produits différents - les best-sellers-, dans un environnement numérique, il devient aussi rentable, parce qu'économiquement équivalent, de vendre un grand nombre de produits différents chacun à un faible nombre d'exemplaires. C'est sur ces bases que naissent de nouveaux marchés, de niches, qui viennent compléter (et non remplacer) le marché global.

L'édition de sciences humaines, royaume des petits tirages risque d'être concernée par ce modèle.

Quelles sont donc les conséquences pour le secteur qui nous occupe ?

Première conséquence : l'explosion documentaire. C'est un constat que nous faisons tous, le développement d'Internet est synonyme d'une multiplication considérable de documents soudain rendus disponibles. On assiste à une augmentation des revues purement électroniques en création, une multiplication des sites web de chercheurs, d'équipes et de projets de recherche, une explosion documentaire sur les archives ouvertes, la diffusion des rapports, etc. Tout cela est rendu possible par l'abaissement du coût de fabrication et diffusion des documents. C'est le premier principe d'Anderson : « make everything available ».

Deuxième conséquence : cette explosion est quand même rendue possible et n'est viable économiquement, selon le même principe, que par une mise en facteur des moyens de production. Il y a 5 ou 6 ans, la plupart des revues électroniques étaient dispersées ; cela signifie une dispersion des compétences et des moyens de production. Cette situation ne s'inscrit pas du tout dans la logique de la longue traîne, pour laquelle il y a rentabilité des publications à faible usage si elles sont agrégées sur une plate-forme unique. La logique de la longue traîne est cohérente avec la montée en puissance, au cours des dernières années des grosses plate-formes de diffusion de revues : Revues.org, CAIRN, Persée, etc. Donc, l'explosion documentaire s'accompagne d'une concentration des plate-formes de publication.

Troisième conséquence : le deuxième slogan d'Anderson, qui complète immédiatement le premier, c'est : « help me find it ». C'est tout à fait logique : l'explosion documentaire signifie que tout existe. On n'a plus de décision de publication en amont. Dans ce contexte, les outils de recherche d'information deviennent stratégiques. Google l'a compris avant les autres ; on ne peut s'étonner de la position que cette entreprise occupe. Pour ce qui nous concerne, on peut dire que d'une certaine manière, dans l'ancien modèle, l'organisation éditoriale des publications reposait sur la notion de collection. Dans le nouveau contexte, le principe organisateur d'un point de vue éditorial, c'est le moteur de recherche (principalement).

Dernière conséquence : dans l'ancien modèle, seules les publications les plus rentables existent (font l'objet d'une décision de publication favorable). La rareté est donc du côté des publications. Dans le nouveau contexte, toutes les publications possibles existent. Ce sont donc les lecteurs qui deviennent rares. C'est le fondement de ce qu'on appelle l'économie de l'attention, avec une conséquence importante : si ce sont les lecteurs qui sont rares et non les publications (relativement les unes aux autres), alors les barrières d'accès aux documents (l'accès sur abonnement par exemple) deviennent contre-productives. Le principe de la restriction d'accès est contradictoire avec la logique de ce nouveau contexte. On voit donc que le mouvement de l'open access, qui s'est déployé avec une face politique et idéologique (libre accès aux résultats de la recherche) repose en fait sur une propriété très puissante de l'économie des biens numériques. Il suffit de regarder les nouvelles revues purement électroniques qui se créent. Aucune ne veut d'une barrière d'accès sur abonnement ; parce que leur principal souci est d'être lues et connues.

Passons maintenant aux relations entre l'édition électronique dans ses relations avec le fonctionnement du champ scientifique

Ici, on constate des évolutions qui ne sont pas fait des évolutions technologiques, mais plutôt de l'organisation de la recherche, des évolutions politiques et économiques, ou propres aux paradigmes scientifiques. En revanche, on voit comment l'édition électronique répond plutôt bien à ces évolutions.

Première évolution : le raccourcissement du rythme de communication. Comme la recherche est de plus en plus contractualisée et évaluée, les pressions sur les équipes de recherche pour communiquer, publier, rendre compte publiquement de l'avancée de leurs travaux vont croissant. Alors que l'édition classique avec des délais de publications qui se comptent en années ne peut pas suivre le rythme, l'édition électronique aide les chercheurs à répondre à cette pression.

Deuxième évolution : une modification de l'équilibre documentaire en faveur des formes courtes. Traditionnellement, la monographie est la forme canonique de la publication en sciences humaines. Aujourd'hui, on assiste à une montée en puissance de l'article comme forme « normale » et rémunératrice pour les carrières des chercheurs. Cette évolution a beaucoup de facteurs différents. L'influence de modèles de communication propres aux sciences exactes me semble être l'un de ces facteurs. Quoi qu'il en soit, l'édition électronique est bien positionnée pour répondre à cette évolution.

Troisième évolution : le renforcement du collectif dans le travail de recherche. Beaucoup de chercheurs le disent : la figure mythique du savant génial isolé, qui travaille dans son coin et révolutionne son domaine au bout de vingt ans d'obscurité n'existe pas (plus). La recherche scientifique, même en sciences humaines, est aujourd'hui un travail d'équipe reposant sur une collaboration forte, à tous les niveaux, entre chercheurs. Là encore, les outils numériques sont très utiles pour répondre à ces besoins croissants de coordination.

Dernière évolution : pas la plus simple à cerner, elle concerne l'évaluation de la recherche. Dans le modèle idéal, comme il y a convergence entre les 3 dimensions, la décision de publication sanctionne la valeur scientifique qui est consacrée par le succès. Il ne me semble pas tout à fait juste de dire que la communauté scientifique délègue aux éditeurs l'activité d'évaluation car, dans les maisons d'édition, les directeurs de collection et les referees sont bien des collègues ; ils font partie du monde universitaire. Le problème est qu'il y a une divergence de plus en plus importante entre l'évaluation de la qualité scientifique d'un travail et la décision de publication. Dans le nouveau contexte, il n'y a pas de véritable décision de publication. Toute publication possible existe. L'évaluation est donc nécessaire déplacée ailleurs. Il me semble qu'on se retrouve alors dans des situations documentaires assez connues en sciences dures qui vivent depuis longtemps des situations d'économie de l'attention avec une abondance relative de publication (ce qui n'était pas le cas des sciences humaines jusqu'à aujourd'hui). Des systèmes bibliométriques du type ISI, des systèmes de classement des revues que l'on voit arriver en sciences humaines constituent des mécanismes d'évaluation différents. Il faudrait compléter l'analyse.

Je voudrais pour finir sur cet aspect, poser une question qui me semble importante : cette évolution du mode de fonctionnement du champ scientifique doit avoir des conséquences épistémologiques importantes. Quelles sont-elle ? Je me garderai bien de répondre à cette question maintenant. Je renvoie la question aux différentes communautés scientifiques qui, me semble-t-il, doivent en débattre sérieusement.

L'édition électronique et l'inscription sociale de la recherche scientifique

Sur cet aspect, il y a une bonne nouvelle et une mauvais nouvelle pour les chercheurs.

La bonne nouvelle, c'est que les réseaux numériques leur donnent de nouveau la possibilité d'intervenir directement dans le débat public sans devoir passer sous les fourches caudines du formatage médiatique. Les blogs de chercheurs (ceux de Jean Véronis, André Gunthert, Baptiste Coulmont, parmi d'autres, les revues intellectuelles en ligne, La Vie des idées, Telos, Sens Public) sont un moyen pour eux de prendre position dans le débat public et de perpétuer d'une certaine manière la position de l'intellectuel.

La mauvaise nouvelle (pour les chercheurs) maintenant, c'est que si les chercheurs peuvent de nouveau intervenir directement dans le débat public, ils ne sont pas les seuls à pouvoir le faire. Il sont même plutôt mis en concurrence avec....tout le monde ! Pire encore, la position de prééminence par l'expertise dont ils pouvaient se prévaloir (et sur laquelle ils comptent) est de moins en moins reconnue a priori...La manifestation de cela, c'est Wikipedia qui est une épine dans le pied de la communauté scientifique. La question qui est derrière ce phénomène est la suivante : quelle est désormais la place, quelle reconnaissance pour la spécificité des connaissances scientifiques, c'est-à-dire de connaissances produites selon des normes professionnelles particulières, dans la sociaté de l'information.

Dernier phénomène intéressant : ce sont les usages non-contrôlés des publications scientifiques. Dans un contexte d'accès ouvert aux publications, avec la particularité des sciences humaines que les connaissances produites sont communiquées en langage naturel (pas de rupture linguistique comme ailleurs), on voit des articles pointus, publiés dans des revues qui n'étaient jusqu'à récemment consultables qu'en bibliothèque universitaires, être cités dans des forums de discussion, sur des sites personnels, bref, dans des discussions courantes, sans être passées par le filtre de la vulgarisation patentée. C'est un phénomène mal connu à mon avis, et pourtant assez passionnant.

Conclusion

Tout au long de l'exposé, j'ai essayé de dépasser le phénomène Eldorado ; de me situer au delà des visions idylliques ou infernales, pour tenter de jeter un éclairage sur un nouveau contexte de publication en émergence. Ce que j'ai décrit n'est évidemment pas un instantané de la situation actuelle. Dans cet instantané, j'ai choisi de braquer le projecteur uniquement sur des éléments encore peu visible, encore en émergence, et tenté de montrer qu'ils étaient la manifestation d'une logique assez puissante en cours de constitution à l'intérieur des cadres hérités dans lesquels nous agissons.

PS : Un grand merci très amical à Yann Calbérac et Vanessa Obry qui ont eu la gentillesse de m'inviter à m'exprimer au cours de cette après-midi et à qui revient la paternité du titre de mon intervention !


Crédit photo : « OMG MACRO ! », par Don solo, en CC by-nc-sa 2.0, sur Flickr


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