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Strasbourg et la Présidence française,: Un article du Point

Publié le 22 mai 2008 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com
Jeudi, 22 Mai 2008 23:09

La présidence française de l'Union européenne, qui débute en juillet, sera-t-elle l'occasion pour Strasbourg de renforcer son statut de capitale européenne ? Pas si sûr ! En revanche, elle pourrait contribuer à faire avancer le dossier de l'eurodistrict.


Lu dans « Le point », un article de Catherine Piettre

Au carrefour de l'Etoile, face au centre administratif, des panneaux verts indiquent des destinations lointaines, voire insolites : Saint-Pétersbourg -2 800 km ; Le Cap-8 350 km ; Vancouver et Shanghai-11 000 km... Le message véhiculé par ces pancartes pourrait faire sourire, s'il ne renvoyait à un profond malaise. Strasbourg souffre de devoir régulièrement réaffirmer son ambition de « capitale européenne ».

Pétition « anti-Strasbourg ».

Siège du Parlement élu de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe, la ville accueille également 75 représentations politiques et consulats. Sans oublier des institutions de poids comme Arte et l'Ena. Il n'empêche, Strasbourg a toutes les peines du monde à convaincre les fonctionnaires et les parlementaires européens qu'elle est la mieux à même de les accueillir.

Aujourd'hui encore, une pétition « anti-Strasbourg » circule : elle a recueilli plus de 1 million de signatures. Certes, la présence du Parlement est gravée dans le marbre des traités d'Edimbourg (1992) et d'Amsterdam (1997). Elle ne pourrait être remise en question sans l'unanimité des Etats de l'Union (dont la voix de la France). « Mais cette garantie est purement formelle », reconnaît le maire, Roland Ries. Dans les faits, les parlementaires n'ont cessé de rogner sur leur semaine mensuelle strasbourgeoise.

Aujourd'hui, l'activité dans les rutilants locaux du Parlement débute le lundi soir, avec l'arrivée des députés et le bruit caractéristique de leurs valises à roulettes, pour s'achever souvent le mercredi soir ou le jeudi matin. Le jeudi soir, seules les femmes de ménage sont encore visibles dans le temple de la démocratie européenne. Même les Verts, longtemps partisans du siège strasbourgeois au nom de leur idéal fédéraliste, ont changé de camp en découvrant ce que les mouvements de dossiers et d'archives, transportés par camions de Bruxelles à Strasbourg, coûtaient en émission de CO2...

La présidence française de l'Union européenne, en juillet, vient-elle à point nommé pour redorer le blason strasbourgeois ? « Si vous regardez le programme, hormis les visites de Sarkozy au Parlement, il n'y aura pas plus de manifestations à Strasbourg qu'ailleurs », note Daniel Riot, coauteur du livre « L'Europe, cette emmerdeuse » (City Editions, 2008).

 La nouvelle municipalité reste, elle aussi, prudente sur cette question. « Je ne suis pas de ceux qui pensent que la présidence française fera des miracles, confirme Roland Ries. Cela dit, c'est une période favorable pour faire avancer les dossiers, en premier lieu le projet d'eurodistrict. »

L'eurodistrict constitue le grand projet du nouveau maire. Cette entité administrative, qui regroupe des villes situées de part et d'autre du Rhin, a pour objectif de développer les échanges et de renforcer les liens entre les citoyens, les associations, les administrations, les établissements d'enseignement, les entreprises...

  Ricanements.

Créé en octobre 2005, l'eurodistrict Strasbourg-Ortenau commence néanmoins à faire ricaner les Strasbourgeois, qui n'ont guère vu jusqu'à présent d'évolution concrète, notamment en matière d'harmonisation des administrations des deux pays. « L'eurodistrict est un terme ambigu , analyse Roland Ries. En réalité, pour l'instant, c'est une zone de coopération transfrontalière comme il en existe à Colmar, Mulhouse, Lille ou Hendaye. Il faut aller beaucoup plus loin, créer un territoire au statut à part, à l'image de Washington DC ou de Brasilia. »

Motivé, le maire a pris personnellement en charge le projet auquel il travaille depuis longtemps. En 2001, il avait en effet rendu un rapport à Lionel Jospin sur la vocation européenne de Strasbourg. Aujourd'hui, pour plaider la cause de son eurodistrict, Roland Ries, le sénateur, multiplie les interventions au palais du Luxembourg et les appels du pied auprès du ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner- « un ami » -et du secrétaire des Affaires européennes, Jean-Pierre Jouyet.

Mais également auprès de la chancelière allemande, Angela Merkel, qui a nommé un délégué au dossier.

 Adepte de la démocratie participative à la sauce strasbourgeoise, l'édile a aussi décidé de lancer une « consultation des citoyens » sur les deux rives du Rhin pour donner un statut juridique et fiscal particulier à ce territoire qui comprend la CUS et l'Ortenau, dont cinq villes (Achern, Kehl, Lahr, Oberkirch et Offenbourg). Cela prendra la forme d'un référendum côté français. Pour organiser la consultation, les Allemands devront faire preuve d'imagination car le concept de référendum n'existe pas chez eux.

De la coopération à la codécision.

La création de l'eurodistrict ne relève pas seulement de la symbolique. « L'objectif est de passer de la coopération à la codécision », explique-t-on à la mairie. Par exemple, Roland Ries aimerait mettre en place des conseils municipaux communs avec la ville de Kehl. Dans ses « cartons » sommeille aussi le projet d'un RER transfrontalier entre Obernai et Offenbourg.

L'intérêt de donner un statut spécifique à ce territoire est également économique. « Strasbourg est une ville moyenne qui ne joue pas dans la même division que Bruxelles ou Paris. Avec l'Ortenau, nous atteignons 1 million d'habitants et pouvons prétendre jouer dans la cour des grands , explique Roland Ries. L'adoption d'un statut fiscal avantageux permettrait notamment d'attirer le siège de grandes entreprises. »

Cette idée séduit beaucoup les responsables de l'Ortenau, qui attendent désormais des mesures concrètes. « Un signe fort serait d'étendre le tram jusqu'à Kehl », indique Richard Kleinschmager, vice-président chargé de la politique européenne et des relations internationales au sein de l'université Louis-Pasteur. Une proposition alléchante pour les travailleurs transfrontaliers. Pourtant, au lendemain des élections, Jacques Bigot, élu depuis président de la CUS, déclarait vouloir préalablement étendre la liaison de tram jusqu'au centre-ville d'Illkirch, mettant celle entre Strasbourg et Kehl au second rang de ses priorités.

Dans le domaine des transports toujours, l'aéroport d'Entzheim pourrait également tirer profit d'un eurodistrict plus abouti. Entzheim survit actuellement grâce aux subventions qui lui sont accordées dans le cadre du contrat triennal signé entre l'Etat et Strasbourg (100 millions d'euros sur trois ans). Cette manne financière lui permet de garder son statut international et de maintenir des lignes déficitaires. Mais le nouveau statut juridique de l'eurodistrict lui permettrait d'attirer les compagnies low cost et de redresser la tête

Le projet Eurodom.

« Strasbourg, c'est Tombouctou » , lançaient les eurodéputés récalcitrants avant l'arrivée du TGV-Est dans la capitale alsacienne. Désormais rattachée par rail au reste du monde, la ville veut croire à son avenir européen. Les idées et les initiatives pour rester dans la course internationale ne manquent pas. Ainsi, cette école européenne à deux tutelles-administrée par l'Education nationale mais supervisée sur le plan pédagogique par l'Union européenne-qui ouvrira ses portes en septembre. La scolarisation s'y fera en trois langues : français, allemand, anglais. Un soulagement pour les fonctionnaires européens qui étaient contraints d'envoyer leurs enfants à Karlsruhe, où se trouve l'école européenne la plus proche.

Enfin, Roland Ries n'a pas abandonné son projet d'Eurodom. « Ce serait une maison de l'Europe qui retracerait l'histoire des pères fondateurs de l'Union mais aussi le fonctionnement de ses institutions. » En revanche, le projet nébuleux d'un institut de recherche européen, dont on murmure qu'il ferait office de « contrepartie » symbolique à un éventuel départ du Parlement européen, ne fait plus parler de lui. Il est vrai qu'il n'a jamais convaincu le monde universitaire, qui travaille à la fusion des trois universités de la ville en une « super-université » dont l'ambition est de devenir un pôle d'excellence international.

Reste qu'il y a urgence à agir : l'eurodistrict de Bruxelles, tout juste porté sur les fonts baptismaux, pourrait bien devenir rapidement un concurrent de taille. Une fois encore, la capitale belge, capitale de l'Europe, pourrait fort bien contrarier les ambitions strasbourgeoises

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