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14-18, deux sonnets d'Edmond Rostand

Par Pmalgachie @pmalgachie

14-18, deux sonnets d'Edmond Rostand
La Cathédrale
Ils n’ont fait que la rendre un peu plus immortelle. L’Œuvre ne périt pas, que mutile un gredin. Demande à Phidias et demande à Rodin Si, devant ses morceaux, on ne dit plus : « C’est Elle ! »
La Forteresse meurt quand on la démantèle.  Mais le Temple, brisé, vit plus noble ; et soudain Les yeux, se souvenant du toit avec dédain, Préfèrent voir le ciel dans la pierre en dentelle.
Rendons grâce – attendu qu’il nous manquait encor D’avoir ce qu’on les Grecs sur la colline d’or : Le Symbole du Beau consacré par l’insulte ! –
Rendons grâce aux pointeurs du stupide canon, Puisque de leur adresse allemande il résulte Une Honte pour eux, pour nous un Parthénon !
Magnard
Celui-là qui, rebelle à toute trahison, Et préférant la Muse à toute Walkyrie, A défendu son Art contre la Barbarie, Devait ainsi mourir défendant sa maison.
Mort pleine de clarté, de goût, et de raison ! D’une Œuvre et d’un Destin parfaite symétrie ! Qu’Il aille, aux profondeurs où se fait la Patrie ! Près des poètes fiers du disciple qu’ils ont !
Deux Ombres lui viendront parler de Bérénice. Que leur rivalité par ce Héros finisse ! Dressons-lui pour tombeau la pierre de son seuil,
Et dans le plus doux sol que ce Français sommeille, Qui, réconciliant la mesure et l’orgueil, Chanta selon Racine et meurt selon Corneille !
Edmond Rostand, de l’Académie française.
Le Figaro, 9 octobre 1914.

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