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Enlèvement raté à garnier

Publié le 17 octobre 2014 par Popov

ENLÈVEMENT RATÉ À GARNIER

L’Enlèvement au Sérail créé par Mozart à l’âge de 26 ans est une œuvre sublime qu’on a peu l’occasion d’entendre. A Garnier hélas, la version de l'oeuvre  mise en scène par Zabou Breitman se contente d'enfiler les poncifs orientalisants.

Il y a Osmin(Lars Woldt) qui cherche ses basses. Pedrillo (Paul Schweinester), juste mais peu audible. Konstance (Erin Morley)  ou Blonde (Anna Prohaska), toutes deux empêtrées par une "choré" si ...fragile, toutes deux au sérail enlevées. C'est le maître de ballet de Mylène Farmer qu'a choisie Zabou Breitmann pour cet enlèvement au sérail qui joue à fond l'Orient en ses clichés et en écume les lieux communs comme au 18 ème siècle. Il y a bien sûr des danses du ventre, l’humour loukhoum-café-théâtre (à la limite du préjugé), un côté dessin animé et des décors superbes de feu Stelhé le grand décorateur mort récemment. Note de mise en scène : le décorateur est présent sur scène sous la forme d’un vieillard rachitique allongé sur une paillasse à l’entrée du sérail. Ce fantôme est-il bien utile à la porte du Harem ? que diable fait-il dans cette galère ? 

Pour ne pas être en reste question Singspiel, on a brassé avec un luxe documenté nombre de poncifs du théâtre des années soixante-dix (interpellation du chef, concertino qui fait sortir de la fosse quelques musiciens, clins d'oeil vieux comme Enoch et même utilisation d'une chouette microscopique dressée au fauconisme) . Aimeront les tard-venus à l’Opéra ou ceux qui n’y viennent qu’une fois de temps en temps. Aimeront les amateurs de stand up ou les mécènes encanaillés de l’institution lyrique. Déjà vu et revu, tant pis ! Ratage, tant pis. A cela s’ajoute la déception musicale malgré quelques interprètes au top comme le ténor Bernard Richter. La direction de l'irréprochable Jordan manque de l'énergie du jeune créateur, son tempo trop ralenti frôle la baisse de tension. On y déplorera surtout le manque de brutalité nécessaire à cette oeuvre de jeunesse si prometteuse, si cinglante qu'on y entend déjà les fantômes des grandes reines de nuit. Cet Enlèvement est bien peu enlevé. Pire, on n'y  rit pas même  des anachronismes comme dans une italienne algérisée par Savary. La mise en scène est sans esprit. Le ratage sans appel, les rappels falsifiés. A l'Opéra quand un spectacle est raté, les gens du métier ou les mélomanes usent d’un euphémisme. Ils disent "ce n'est pas digne de l'Opéra de Paris". La mise en scène de Zabou n’est pas tout à fait digne de l’Opéra de Paris mais sans doute n’est-elle pas la seule responsable.

DIE ENTFÜHRUNG AUS DEM SERAIL

SINGSPIEL EN TROIS ACTES (1782)

MUSIQUE DE WOLFGANG AMADEUS MOZART (1756-1791)

LIVRET DE JOHANN GOTTLIEB STEPHANIE D’APRÈS

LA PIÈCE DE CHRISTOPH FRIEDRICH BRETZNER

MISE EN SCENE DE ZABOU BREITMAN

A l’OPÉRA GARNIER JUSQU’AU 8 NOVEMBRE


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