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note d'atelier

Publié le 23 décembre 2012 par Lironjeremy

L’épuisant là-dedans c’est de ne jamais voir vraiment ni ce que l’on fait ni ce que l’on a fait. Le morceau, aussi modeste soit-il désespère le regard, l’excède. Tourne, vire, piétine à droite, à gauche et d’avant en arrière en prenant des postures, plisse les yeux, repousse des mains une parti parasite du champ visuel, l’œil travaille, et la tête, à juger sans certitude. Puisque ce n’est rien encore d’établi ou quelque chose qui essaie d’établir un rapport neuf. Même dans sa nudité là-devant -dans sa nudité surtout, peut-être- l’objet se voile. Je me souviens d’un relief de Paul Bury se présentant comme un tableau monochrome noir ou gris sur la surface duquel émergeaient de petites tiges semblables à des épingles. Derrière le châssis, une mécanique faisait trembler aléatoirement sur la surface une de ces épingles une fraction de seconde à peine de sorte que l’on ne voyait jamais le mouvement. Ne pouvant l’observer, n’en percevant que la possibilité discrète, furtive, quelque part dans le champ visuel l’existence de ce petit soubresaut peinait à s’établir clairement, restait douteuse, illusoire peut-être. On visait les tiges, l'oeil toujours en retard, jamais au bon endroit, sans jamais atteindre. Il me semble chaque fois me confronter à une semblable difficulté à tenir dans l’œil chacune des parties du tableau pour en observer minutieusement la réalité totale. L’œil s’épuise à parcourir la surface comme une mouche à la vitre, avec cette façon désespérée et chaotique. Le bouquet efface la fleur comme dirait Mallarmé. Difficulté pour qui s’essaie à le composer patiemment. 

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