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[Interprétation] Interstellar – Analyse et éléments d’explication

Par Wolvy128 @Wolvy128

:!: Article révélant la fin du film

Affiche interstellar
Après avoir découvert le film mercredi soir, et publié ma critique le lendemain, je reviens à nouveau aujourd’hui sur le grandiose Interstellar, pour partager cette fois mon interprétation de l’histoire. Non pas que ce soit absolument nécessaire pour pouvoir apprécier le long-métrage, mais le scénario se révèle néanmoins suffisamment intelligent et profond que pour se risquer à pousser plus loin la réflexion. Il faut dire que Christopher et Jonathan Nolan se sont associés au célèbre physicien Kip Thorne, un des plus grands experts dans les applications de la théorie de la relativité générale, pour élaborer leur scénario. Il en résulte du coup une base scientifique extrêmement solide, qui donne clairement matière à réfléchir.

L’idée de l’article est donc de pouvoir aborder quelques thèmes importants du film et d’apporter des éléments d’explication aux différentes questions qui se posent à l’issue du visionnage. J’essayerais, comme d’habitude, d’argumenter au maximum mon interprétation, même si certains concepts sont tellement complexes et abstraits qu’il faudra certainement faire preuve d’ouverture d’esprit pour les assimiler. Ou au moins les accepter tels qu’ils sont présentés dans le film. N’étant pas calé en la matière, je ne me risquerais effectivement pas à contester les différentes théories, simplement à les interpréter dans le cadre du récit.

Pour rappel, Interstellar est le nouveau film de Christopher Nolan (Inception, Le Prestige, The Dark Knight Trilogy). Il raconte les aventures d’un groupe d’explorateurs qui utilisent une faille récemment découverte dans l’espace-temps afin de repousser les limites humaines et partir à la conquête des distances astronomiques dans un voyage interstellaire. On peut notamment retrouver au casting Matthew McConaughey (Cooper), Anne Hathaway (Brand), Michael Caine (Professeur Brand), Jessica Chastain (Murphy), Casey Affleck (Tom) et Mackenzie Foy (Murphy jeune).

Pour bien comprendre l’intrigue générale du film, ainsi que le dénouement final, je pense qu’il est tout d’abord indispensable d’avoir une parfaite vision chronologique des événements marquants de l’histoire. Cela peut sembler quelque peu superflu à première vue, mais étant donné que le temps fait partie intégrante du récit, et qu’il varie continuellement en fonction du lieu où les personnages se trouvent, cela me semble assez important de dresser, pour commencer, un bref résumé du voyage extraordinaire auquel on assiste pendant près de 3 heures.

Résumé
Une fois la chronologie des événements clairement assimilée, il est maintenant possible de rentrer dans le vif du sujet en abordant directement les différents concepts scientifiques exploités dans le film, et en tentant de répondre aux grandes questions qui en découlent. L’une des premières notions présentées n’est autre que le trou de ver, un objet hypothétique qui relierait deux régions distinctes de l’espace-temps, et se manifesterait d’un côté, comme un trou noir et, de l’autre, comme un trou blanc. Son fonctionnement est très bien expliqué dans le film et le concept a d’ailleurs été repris au cours du temps dans de nombreuses productions de science-fiction. Concrètement, c’est grâce à ce trou de ver que les 12 astronautes, ainsi que Cooper et son équipage par la suite, parviennent à franchir en quelques minutes une distance qui leur prendrait normalement des centaines d’années, et ainsi d’avoir accès à une nouvelle galaxie composée de planètes potentiellement habitables. En d’autres termes, ce trou de ver leur offre donc ni plus ni moins qu’une chance de sauver l’humanité, au moment critique où la Terre est justement en train d’agoniser. Néanmoins, les informations ne pouvant pas traverser le trou de ver sans en ressortir de manière complètement erratique, il est impossible de réellement communiquer avec la Terre une fois l’avoir franchi. D’où l’idée d’envoyer une simple impulsion sonore (ping) pour indiquer si une planète est colonisable ou pas. Et c’est à la suite de la réception de 3 signaux positifs que la mission de sauvetage emmenée par Cooper peut démarrer.

Une mission pas franchement compliquée à comprendre dans sa globalité, si ce n’est peut-être les deux distorsions temporelles que subissent les protagonistes. Celles-ci sont dues au trou noir, engendré par le trou de ver. Effectivement, à proximité du trou noir (dans son orbite), le temps est altéré. Et c’est justement le cas de la planète Miller, le premier site qu’ils explorent, qui est très proche du trou noir. Une heure sur place équivaut ainsi à environ 7 ans sur Terre. Dès lors, comme c’est précisé dans le film, il est fort possible que le vaisseau de l’astronaute chargée d’envoyer le ping venait en fait tout juste de sombrer. Ce qui explique la présence des débris en surface et l’émotion palpable de Brand. Quoi qu’il en soit, Cooper et Brand perdent une vingtaine d’années terrestres dans l’aventure, et le choc est rude pour Cooper lorsqu’il découvre par vidéos ses enfants à l’âge adulte. La seconde distorsion provient, quant à elle, du temps passé en vol aux abords du trou noir lorsqu’ils se dirigent vers la planète Edmunds, le dernier site à visiter. Cooper et Brand y perdent cette fois environ 70 ans. Un temps extrêmement conséquent qui explique à la fois l’âge très avancé de Murphy lorsque Cooper la rencontre dans la station spatiale à la fin du film, mais aussi la mort du fiancé de Brand sur la planète Edmunds. Cette deuxième distorsion temporelle laisse ensuite place au dernier acte du film, dans lequel Cooper s’éjecte du vaisseau, pénètre à l’intérieur du trou noir avec le robot TARS, traverse l’horizon des événements et arrive miraculeusement dans le tesseract.

Miller
Mais qu’est-ce que le tesseract au juste? Si on se réfère aux informations présentes sur la toile, il s’agirait en fait d’un cube en 4 dimensions. Autrement dit, le tesseract serait au cube ce que le cube est au carré. Dans le film, le cube (3 dimensions) est représenté par la bibliothèque donnant sur la chambre de Murphy, tandis que la quatrième dimension (le temps) permet à Cooper de voyager à différentes périodes de l’Histoire. Pour autant, le film nous rappelle à plusieurs reprises que même si le temps est modulable, il est impossible de modifier le passé. En clair, ce qui s’est passé s’est passé, et restera inchangé quoi qu’il arrive. A l’intérieur du tesseract, Cooper découvre qu’il est en fait le fantôme de sa fille car il peut communiquer avec elle grâce à la puissance de la gravité du trou noir. Cela se traduit par des petites vibrations qu’il opère sur les livres, la poussière sur le sol ou encore les aiguilles d’une montre. De cette façon, il lui transmet des messages avec en point d’orgue la résolution de l’équation obtenue grâce aux données recueillies par TARS au cœur du trou noir. Une équation qui aboutira à une technologie permettant à l’humanité de quitter la Terre pour partir s’installer dans une station spatiale aux alentours du trou noir. Comme le révèle Cooper à TARS dans le tesseract, ce qui l’anime, c’est un sentiment d’amour infini, seule puissance capable de transcender le temps et l’espace. Un amour infini qui guide également Brand vers la planète où son compagnon a atterri.

En ce qui concerne la suite des événements pour Cooper, deux interprétations du dénouement final sont possibles selon moi :

  • Soit il périt après avoir contacté Murphy (dans le trou noir ou à l’extérieur par manque d’oxygène) et ses dernières pensées vont directement à sa fille, comme le docteur Mann l’avait prédit. Son esprit compose alors une sorte de lieu idyllique dans lequel il la revoit une dernière fois avant de partir rejoindre Brand.
  • Soit il est éjecté du trou noir avec TARS et est repêché par la station spatiale construite par les humains grâce aux informations transmises à Murphy des dizaines d’années plus tôt. Il tient sa promesse et revoit sa fille une dernière fois, près de 100 ans après son départ, avant de partir rejoindre Brand, la seule personne de sa génération encore vivante.

Pour ma part, j’opte pour la deuxième solution. D’abord parce que je suis de nature plutôt optimiste et que j’aime à croire que Cooper puisse enfin vivre sa propre vie, après s’être donné tant de mal à défendre celle de l’humanité tout entière. Mais aussi, et surtout, car certains éléments du final ne collent tout simplement pas si on considère que Cooper n’est jamais sorti vivant du trou noir. En effet, s’il a vraiment péri après avoir contacté sa fille, son esprit ne devrait-il pas alors reconstituer, comme dernier endroit, un lieu connu tel que la Terre plutôt qu’une station spatiale complètement inconnue? Et ne devrait-il pas non plus rencontrer une jeune Murphy, ou une Murphy à l’âge adulte, plutôt qu’une vieille femme totalement inconnue pour lui? Autant d’éléments qui me font finalement dire que Cooper s’en est bel et bien sorti, et a une véritable chance de vivre le reste de sa vie avec Brand.

Mann
Cependant, au-delà de la situation personnelle de Cooper, la fin du film pose également pas mal de questions. La plus importante de toute étant peut-être de savoir en fin de compte qui tire les ficelles? Au fil du récit, on peut effectivement constater que certains éléments ne sont pas là par hasard, mais semblent être le fruit de forces supérieures. A commencer par l’apparition du trou de ver. Qui l’a ouvert? Car offrir un accès à une galaxie présentant 3 planètes habitables pour l’humanité, pile au moment où celle-ci en a le plus besoin, n’a vraiment rien d’une coïncidence, surtout si on considère le peu de planètes viables. L’ouverture du trou est volontaire. Tout comme le tesseract ! Qui l’a créé? Dans le film, Cooper émet l’hypothèse qu’il s’agirait d’une technologie des humains du futur, capables alors de manipuler les 5 dimensions. Maîtrisant les voyages dans le temps, ceux-ci auraient ainsi créé le trou de ver et le tesseract pour aider leurs ancêtres à sauver l’humanité, par le biais de Cooper dont ils savaient qu’il allait pénétrer dans le trou noir. Mais s’ils ont la possibilité de manipuler le temps, pourquoi alors ne pas simplement transmettre la résolution de l’équation à l’humanité plutôt que de faire cet énorme jeu de piste avec Cooper (trou de ver, planètes potentiellement habitables, trou noir, tesseract…)? Simplement car toute interaction avec le passé peut avoir des conséquences inconnues et potentiellement catastrophiques. En effet, le meilleur moyen de préserver son futur, c’est encore de ne pas déformer le passé.

Du coup, on peut imaginer que les humains du futur ont une trace précise de l’enchaînement des événements qui mènent à la survie de l’humanité, et donc à leur propre survie, et s’attachent donc à reproduire exactement les mêmes actions pour ne rien bouleverser. En d’autres termes, c’est une boucle temporelle linéaire où chacun doit faire sa part. Cooper sauve l’humanité en transmettant les données nécessaires à la résolution de l’équation à Murphy, l’humanité évolue technologiquement et crée le trou de ver (ainsi que le tesseract) dans le passé pour aider Cooper à… sauver l’humanité. Et ainsi de suite ! L’autre possibilité est que l’origine du trou de ver et du tesseract soit extra-terrestre. Lorsque Cooper communique avec TARS dans le tesseract, ce dernier évoque effectivement « les êtres du bulk » comme étant les responsables de la technologie. Une appellation qui n’invalide aucune théorie mais qui peut avoir son importance si on considère que TARS aurait certainement mentionné les humains s’ils étaient les véritables responsables. A moins qu’il ne s’agisse justement du terme désignant les humains ultra-évolués du futur. Personnellement, je n’adhère pas spécialement à la thèse extra-terrestre car, contrairement aux humains du futur, ils n’ont aucun motifs évidents pour sauver l’humanité. Mais c’est néanmoins une théorie à ne pas écarter, car tout à fait plausible, même si rien dans le film ne nous indique clairement qu’ils puissent être à l’origine du trou du ver ou du tesseract.

Terre
En définitive, vous l’aurez compris, au-delà du spectacle grandiose et émouvant qu’il propose, Interstellar est également un long-métrage qui donne énormément à réfléchir, de par les nombreux concepts scientifiques qu’il exploite. Les termes de trou de ver, anomalie gravitationnelle ou tesseract suscitent en effet immédiatement pas mal d’interrogations, dont la plupart trouvent finalement une réponse, ou tout du moins des éléments de réponse, dès lors qu’on s’implique véritablement dans le film. C’est l’une des grandes forces de Christopher Nolan : être capable d’offrir un divertissement impressionnant sur le plan formel sans pour autant négliger l’aspect réflexif du récit. Du coup, on se divertit sans être pris pour des idiots, et en nous incitant en plus à se triturer les méninges pour faire la lumière sur certaines zones d’ombre. Alors bien sûr, quelques questions subsistent tout de même (notamment sur la situation finale de Cooper ou l’origine de l’aide qu’il reçoit) mais le scénario est néanmoins assez intelligent que pour distiller suffisamment de clés d’interprétation, et ainsi pouvoir se faire sa propre opinion.

Quoi qu’il en soit, j’espère que cet article vous aura permis de mieux appréhender les événements marquants de l’histoire, et pourquoi pas d’obtenir une réponse aux questions que vous pouviez vous poser en sortant de la salle. J’espère aussi qu’il vous aura donné envie de revoir le film avec un autre regard. Je le recommande en tout cas vivement car, qu’on veuille pousser la réflexion au maximum ou simplement profiter du fantastique spectacle, Interstellar ne laisse assurément pas indifférent. Comme d’habitude, n’hésitez pas à réagir si vous avez des questions, des remarques ou même, qui sait, une interprétation différente de la mienne. C’est le but de l’article.



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