Magazine Culture

Le profit ou l'être humain et la planète

Par Alaindependant

 « Aussi longtemps, disent les auteurs, que les pays et les entreprises continueront à penser dans la logique capitaliste du « profit d’abord », il n’y aura pas de vraies solutions. Les réformes écologiques impliquent en général d’investir dans des solutions rentables seulement à long terme. Ce qui n’est pas dans la logique des Etats et des entreprises, où il faut en permanence générer du bénéfice à court terme sous peine d’être balayé par la concurrence, le profit potentiel s’évaporant par la même occasion. Et, là où le profit est l’entière priorité, l’être humain et la planète passent à l’arrière-plan. »

Suivons l'exposé des faits.

Michel Peyret


1 octobre 2013, PTB

Changer le système, pas le climat

Chaque année, l’élite politique du monde entier se réunit pour traiter le problème croissant du réchauffement climatique. Un fameux obstacle paralyse cependant toute vraie solution : la logique capitaliste du « profit d’abord ».

Jos D’Haese et Brecht Vanacker

Depuis 1995 se tient chaque année un sommet international sur le climat. Et chaque année se rejoue la même pièce, celle que nous reverrons probablement à Varsovie : les discussions et chamailleries pour établir qui doit supporter la plus grande part de responsabilité dans le réchauffement de la planète.

L’Occident s’oppose constamment aux pays en développement, les Etats-Unis désignant toujours la Chine, l’Inde, le Brésil et les autres pays émergents à l’économie en rapide croissance qui émettent de plus en plus de CO2. La Chine et d’autres pays épinglent, eux, la pollution atmosphérique historique des pays industrialisés.

L’Union européenne et les Etats-Unis affirment régulièrement qu’ils ne sont pas les plus grands pollueurs. En 2011, ils étaient responsables respectivement de 11% et 16% des émissions mondiales des gaz à effet de serre1. La même année, pour la Chine, c’était 29%. Des chiffres qui semblent certes convaincants mais qui, seuls, sont loin de dresser un tableau complet de la situation. Le taux d’émissions par habitant donne une tout autre vision. En 2011, la Chine a émis 7,2 tonnes de CO2 par habitant2. L’Union européenne, 7,5 tonnes, et les Etats-Unis… 17,3 tonnes. 

Production sous-traitée

Il importe en outre d’établir une différence entre production et consommation. Plus de 27% des émissions en Chine sont la conséquence de la production pour les marchés étrangers3. Alors que ces produits sont importés par l’Occident, les émissions de CO2 engendrées par leur fabrication sont portées au compte de la Chine. Dan l’Union européenne, l’émission de CO2 par habitant résultant de la production intérieure de l’UE est ainsi de 7,5 tonnes, mais ce chiffre monte à 8,9 tonnes si le même calcul est effectué d’après la consommation par habitant4. Par le fait que l’Occident a sous-traité sa production principalement en Chine, celui-ci semble donc vivre de manière moins polluante. Mais rien n’est moins vrai.

Indépendamment de cela, l’Occident porte aussi une grande responsabilité dans l’émission historique des gaz à effet de serre. Depuis la révolution industrielle, les économies occidentales ont pu se développer sans tenir compte du climat, personne ne se souciant alors du réchauffement de la planète. Au 20e siècle, les Etats-Unis ont émis trois fois plus de gaz à effet de serre que la Chine. Il serait donc incorrect de ne pas tenir compte de ces 200 ans de pollution excessive dans la rédaction d’un accord sur le climat.

Conséquences inéquitablement réparties

Mais l’injustice sociale du climat ne réside pas seulement dans le fait que l’Occident porte une grande responsabilité dans l’émission de gaz à effet de serre. Les conséquences du réchauffement climatique sont elles aussi inéquitablement réparties. Là où, comme chez nous, celles-ci se limitent à des étés très chauds et à des hivers humides, le Sud subit déjà de grands problèmes dus la sécheresse, aux inondations, aux violentes tempêtes… Cette situation engendre un important afflux de réfugiés climatiques. Plus de 32 millions de personnes ont déjà fui face les conséquences du changement climatique et, d’ici 2050, selon le GIEC, ce serait 150 millions. 

Un accord sur le climat doit donc non seulement faire en sorte de réduire nos émissions de gaz à effet de serre, mais il doit aussi être socialement juste : en tenant compte de l’émission historique et de la répartition de la production, et en donnant la possibilité aux pays en développement de réaliser leur indispensable croissance. Cela signifie que l’Occident doit accepter de supporter les plus gros efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais qu’il accorde de l’aide financière et technologique au reste du monde pour faire face aux conséquences du changement climatique et réduire là aussi les émissions. 

Investir dans le long terme

Les chances d’un tel accord restent cependant minimes. Aussi longtemps que les pays et les entreprises continueront à penser dans la logique capitaliste du « profit d’abord », il n’y aura pas de vraies solutions. Les réformes écologiques impliquent en général d’investir dans des solutions rentables seulement à long terme. Ce qui n’est pas dans la logique des Etats et des entreprises, où il faut en permanence générer du bénéfice à court terme sous peine d’être balayé par la concurrence, le profit potentiel s’évaporant par la même occasion. Et, là où le profit est l’entière priorité, l’être humain et la planète passent à l’arrière-plan.

Remédier au changement climatique nécessite un système totalement différent. Un système où la production est aux mains de la société et peut ainsi être planifiée de manière démocratique. Un système où nous pouvons chercher des solutions collectives aux problèmes. Un système de « la planète d’abord, le profit après ». Un socialisme 2.0. 

1 A. Kenis, & M. Lievens, De mythe van de groene economie, 2012, Uitg. Epo. • 2 Idem. • 3 www.ipsnews.be/artikel/steeds-meer-co2-uitstoot-door-europese-consumptie • 4 Eurostat (novembre 2011)


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Alaindependant 70792 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Dossier Paperblog