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Il faut sauver le cinéaste (et acteur) Canet

Par Filou49 @blog_bazart

 canetSi il y a bien un acteur réalisateur français adoré du public et mal aimé des journalistes et  plus globalement de la presse écrite un peu intello, c'est bien Guillaume Canet, à tel point que la semaine passée, lorsque j'ai vu dans le cadre de l'opération Ciné Trafic, deux de ses films qu'il a tourné en tant que  réalisateur, je me suis dit qu'une année ou une autre, Thierry Frémeaux ( ou son successeur) lui rendra certainement hommage, pour réhabiliter son oeuvre un peu comme il l'a fait cette année pour Coluche comédien ou le cinéaste Claude Sautet, d'autres grands noms du 7ème art français maltraité par la critique institutionnelle.

Bon, je sais, certains cinéphiles crieront au scandale que j'ose comparer Canet avec des artistes aussi talentueux  et établis que Coluche ou Sautet (j'en connais qui risquent de bondir dans leurs fauteuils) , mais quand même l'acharnement à son égard alors même que le type est inconstestablement doué me parait un peu comparable.

Il faut dire que les trois ( et d'autres encore) paient surtout leur incroyable succès populaire, et on sait qu'en France un artiste qui connait un très grand succès est forcément suspect. Et Canet a rencontré surtout un énorme succès en tant que réalisateur, avec son troisième film à ce jour, « Les petits Mouchoirs »qui a eu  plus de sept millions d’entrées, un chiffre absolument énorme pour un film de potes. Le problème est qu'incontestablement, ces petits mouchoirs ne sont pas un bon film, et pour avoir désormais vu les 4 films de Canet réalisateur, c'est même à mes yeux et de loin le plus mauvais film tourné par Canet.

L'ironie de la situation est que Canet a récemment confié  ne pas avoir « aimé faire Les Petits Mouchoirs, et encore moins le promouvoir," alors même que c’est celui qui a rencontré le plus gros succès et que c'est certainement à cause de ce film là que les professionnels du cinéma qui lui en veulent, alors même que le type sait réaliser et jouer même dans de bons films. La preuve en ces deux ( ou plutôt trois) exemples :

 1. Guillaume Canet réalisateur : Ne le dis à personne + Blood Ties

 

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On le sait, à l'approche des fêtes de Noël, les éditeurs vidéo ont tendance à regrouper sous un même coffret des films qui ont parfois un relation assez étrange les uns et les autres. Pour le coffret "thrillers de Canet" édité par TF1 vidéo que j'ai donc reçu avec Cinétrafic, on imagine bien que l'éditeur profite de la sortie assez récente du dernier film de Canet "Blood Ties" qui a connu un succès plus que mitigé pour le regrouper avec l'autre film policier qu'il a réalisé, "Ne le dis à personne", qui fut lui un succès assez incroyable et inattendu, même si de portée moindre que la virée concon des potes à Arcachon.

Les deux films sont assez différents l'un de l'autre, et dans leur genre ( l'un est un thriller à suspens avec une intrigue à tiroirs, l'autre un film  noir proche d'un Scorsese ou Coppola des années 70) mais démontrent tous les deux de vraies influences chez Canet  ( surtout dans  le cinéma américain des années 70-80) et surtout une vraie maitrise de Canet pour le récit et une réalisation affirmée

 Commencons par "Ne le dis à personne", un film dont ,je dois dire, je commence à bien connaitre l'intrigue : j'avais lu le bouquin de Coben à sa sortie. et vu le film de Canet également au cinéma quelques années après.

Comme je le dis dans mon article sur cet immense ( dans tous les sens du terme) romancier américain que j'ai eu la chance d'aller interroger en mars 2013 ,   j'avais été bluffé par la qualité de ce roman que je n'avais pas laché de la nuit et qui arrivait à mélanger polar captivant au suspens très efficace et partie plus romanesque et même amoureuse assez forte.

Lors de cette itw, Coben était revenu assez longuement sur la force de persuasion de Guillaume Canet qui a coupé l'herbe sous les pieds de Michael Apted, au départ pressenti pour adapter son bouquin.

Il faut sauver le cinéaste (et acteur) Canet!!!

Le romancier fut très content du résultat, même si il aurait aimé que Canet soit moins fidèle à sa matière originelle, puisque pour lui les meilleures adaptations sont celles qui trahissent le mieux et que dans son film, certains personnages présents dans le livre disparaissent du film car semblent vraiment trop seondaires et encombrent l'intrigue,  ce qui est également aussi mon avis, à la fois lorsque je l'ai vu en 2006 et après l'avoir revu il y a quelques jours.

Mais c'est quasiment un des seuls reproches que je pourrais faire à ce Ne le dis à personne version Canet car sincèrement et même après une seconde vision et donc une intrigue qui ne me laisse plus guère de surprise, Canet fait montre d'une  réelle efficacité et dans la mise en scène et dans la conduite du récit.

On appréciera  notamment sa manière de retracer l'intrigue, entre quelques belles courses poursuites (notamment une longue et vraiment haletante sur le périphérique, alors que d'habitude je n'aime pas du tout les courses poursuites), et sur certaines de ces scènes, Canet n'a pas grand chose à envier aux maitres du cinéma américain qu'il semble particulièrement vénérer.

De plus, le casting est pour le moins impressionnant, puisque l'on retrouve pas moins de sept grands noms du cinéma français au générique, de Nathalie Baye à André Dussolier,  en plus des prestigieux Marina Hands, Gilles Lelouche, Jalil Lespert ou encore le méconnu  Phillippe Lefebvre, et on remarquera dans de tous petits rôles l'ostréiculteur Joel Dupuch ( qu'on reverra dans les petits mouchoirs) et surtout le futur incontournable Laurent Laffite.  Bref, une belle surprise qui se revoit toujours avec le même plaisir de spectateur.

B.O. NE LE DIS A PERSONNE - FOR YOUR PRECIOUS LOVE

Quant à "Blood Ties", qui constitue donc son premier vrai échec (Seulement 238 000 entrées en France et une présentation à Cannes en 2013 assez catastrophique), j'avoue que sa vision fut une très bonne surprise. A la base, Canet a décidé de faire un remake des liens du sang", un film français de Jacques Maillot qui était pas mal mais pas totalement abouti, et en choissisant d'adapter l'histoire au New York des années 70,et en se faisant aider de mon maitre incontesté, le génialJames Gray (co-scénariste), Canet conserve la  densité psychologique  qui faisait la réussite du film français tout en soignant sa mise en sène, particulièrement  inspirée, hommage direct au cinéma américain des seventies, aidé  en cela par la photographie très réussie de Christophe Offenstein.

Il faut sauver le cinéaste (et acteur) Canet!!!

Guillaume Canet parvient à peindre avec subtilité et pertinence  les errements sentimentaux et amoureux de cette famille déchirée, grâce à un casting assez épatant et vraiment impressionnant, de Clive Owen au rare Billy Cudrup en passant par Mila Kunis ou l'incroyable James Caan  ...

Bref, si le film n'arrive pas toujours à échapper au déjà vu, il n'en reste pas moins de très belle tenue, et j'ai eu un peu de mal à comprendre en le voyant la tiédeur des critiques à sa sortie ( d'autant plus qu'on voit dans les bonus que Canet a coupé énormément de scènes après la présentation du film à Cannes pour en faire un film plus resseré et bien plus intense)

Blood Ties - Bande-annonce (VOST)

 2. Guillaume Canet acteur, La Prochaine fois je viserais le cœur

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Je l'avais annoncé en début de mois pour présenter le film lors d'un billet concours,Guillaume Canet, dans le rôle principal, d'un tueur en série, qu'on a appellé " le tueur de l'oise" au coeur des années 70.  semblait être d'après l'avis de tous ceux qui avaient pu voir le film avant la sortie d'une justesse indéniable. Or, en voyant ce film, le troisième d'Anger il est évident que Guillaume Canet tient là de loin son meilleur rôle, le plus impressionnant et le plus maitrisé qui soit.

Quelques mois après l'avoir vu dans un autre film qui aborde encore une fois un fait divers de la même époque, à savoir "L'Homme qu'on aimait trop" (2014) de André Téchiné sur lequel d'ailleur Cédric Anger a officié en tant que scénariste, il est intéressant de se rendre compte que Canet joue un rôle assez similaire, mais dans un versant encore plus sombre et plus opaque que le Maurice Agnelet du Téchiné .

La particularité de ce film  glacant et parfaitement mis en scène, est que même en nous plaçant du point de vue du gendarme tueur, , on n’est guère plus avancé sur les raisons profondes de ces actes meurtriers. tant le  type parait incompréhensible  et irrationnel

C'est à la fois la qualité et le défaut du film qui nous laisse un peu extérieur parfois à cause de cette absence de clés pour l'appréhender. Mais ce qui est vraiment incontestable, c'est la remarquable performance de Guillaume Canet, qui parvient à réprimer toutes velléités de tendresse et même d'humanité par un visage et un coeur fermé à double tour. Une performance qui en appelle surement d'autres et qui montre que plus que jamais, il faut sauver le soldat Canet!!

"La prochaine fois je viserai le cœur"


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