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Sur toutes les pages lues, sur toutes les pages blanches, pierre sang papier ou cendre, j’écris ton nom … Liberté[1]

Publié le 14 janvier 2015 par Lifeproof @CcilLifeproof

La place de la République, point de départ de la marche républicaine à Paris. Photo AFP Bertrand GUAYLa place de la République, point de départ de la marche républicaine à Paris. © Photo AFP Bertrand GUAY

Il y a tout juste une semaine, un événement, qualifié par nombreux d’entre nous, de barbare s’est produit dans le monde de la presse. Et depuis une semaine, je me demandais sur quelle exposition, quel artiste, quelle œuvre, j’allais écrire. Je n’ai trouvé aucun sujet, car pour être honnête, je n’avais pas le cœur à produire un écrit enjoué sur des œuvres colorées, empreintes de romantisme ou de beauté. Je me suis donc décidée à écrire sur le droit à la liberté d’opinion et d’expression, que tout français et notamment journalistes s’exhortent à tout prix de faire valoir.

L’appel à l’unité nationale, clamé par nombreux d’entre nous, est palpable. Jour après jour les témoignages d’une volonté commune à faire front se multiplient. Nous avons participé à des rassemblements, effectué une minute de silence, une journée de deuil national a été proclamée et une marche républicaine silencieuse fut organisée. Tout ceci dans le seul but de protéger le premier mot de la devise de notre chère nation : la Liberté. Et plus particulièrement, la liberté d’expression de chacun d’entre nous. Pour tous ceux qui font partager leurs pensées, entendre leur voix, dans les médias et dans la presse, la liberté d’expression est fondamentale. D’ailleurs, Emmanuel Kant écrivit déjà en 1786 « Certes, on dit : la liberté de parler, ou d’écrire peut nous être retirée par un pouvoir supérieur mais absolument pas celle de penser. Toutefois, quelles seraient l’ampleur et la justesse de notre pensée, si nous ne pensions pas en quelque sorte en communauté avec d’autres à qui nous communiquerions nos pensées et qui nous communiqueraient les leurs ! On peut donc dire que ce pouvoir extérieur qui dérobe aux hommes la liberté de communiquer en public leurs pensées, leur retire aussi la liberté de penser… [2] ».

C’est justement à cette époque, que des caricatures virulentes émergent en France. Dans un contexte de changements politiques et sociaux, la satire permet de bousculer les mœurs et d’engendrer des réactions, mais elle prête à controverse, qualifiée de corrosive. En effet, elle peut déplaire tout en étant un moyen humoristique de mettre en lumière des débats, des questions taboues. Il s’agit d’un art à part entière ; chaque dessin satirique est une œuvre, couverte par une liberté essentiellement d’expression artistique. Comment pouvons-nous imaginer que l’on puisse être tué pour un dessin ?

La liberté d’expression a-t-elle une limite ? L’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 donne une réponse : « Tout individu à droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expressions que ce soit ». La France est la patrie des droits de l’homme et des citoyens français ne peuvent souiller un héritage durement gagné.

Honoré Daumier, Gargantua, caricature de Louis-Philippe, 1831
Honoré Daumier, Gargantua, caricature de Louis-Philippe, 1831

Dès l’enfance, nous sommes poussés à développer notre esprit critique, à donner notre avis, à construire un argumentaire pour chaque idée que nous défendons. Mais peut-être qu’on ne nous éduque pas à respecter l’avis d’autrui ?

Nous sommes ici des critiques d’art, communiquant notre avis aux lecteurs, qui partagent notre passion. Être critique, c’est aussi savoir prendre position pour des causes ; nous faisons partie du monde des médias, de la presse. Refuser que la liberté d’expression soit entachée est nécessaire. Et nous continuerons à publier nos pensées, nos idées, sans avoir peur des représailles. Les dessins satiriques doivent continuer à exister, tout comme le journal Charlie Hebdo, tel un survivant, qui publie aujourd’hui une nouvelle édition. La presse et les médias doivent perdurer, et la communication de nos pensées également.

Caroline

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[1] ELUARD, Paul, « Liberté », Au rendez-vous allemand, 1945, Les Éditions de Minuit

[2] KANT, Emmanuel, « Que signifie s’orienter dans la pensée ? », 1786, dans le Berlinische Monatsschrift, [trad Jean-François Poirier et Françoise Proust dans Emmanuel Kant, Vers la paix perpétuelle… et autres textes, Paris, Flammarion, 1991, p.69]


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