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Et si Hitler n’était pas mort…

Publié le 26 janvier 2015 par Emidreamsup @Emidreamsup

9782714456090

A Berlin, en 2011.
Soixante-six ans après sa disparition, Hitler se réveille dans un terrain vague de Berlin. Et il n’est pas content : quoi, plus personne ne fait le salut nazi ? L’Allemagne ne rayonne plus sur l’Europe ? Tous ces Turcs qui ont pignon sur rue sont venus de leur plein gré ? Et, surtout, c’est une FEMME qui dirige le pays ? Il est temps d’agir. Le Führer est de retour et va remettre le pays dans le droit chemin. Et pour ça, il lui faut une tribune. Ca tombe bien, une équipe de télé, par l’odeur du bon filon alléchée, est toute prête à la lui fournir.
La machine médiatique s’emballe et bientôt, le pays ne parle plus que de ça. Pensez-vous, cet homme ne dit pas que des âneries ! En voilà un au moins qui ne mâche pas ses mots. Et ça fait du bien, en ces temps de crise…
Hitler est ravi qui n’en demandait pas tant. Il le sent, le pays est prêt. Reste pour lui à porter l’estocade qui lui permettra d’accomplir enfin ce qu’il n’avait pu achever…

Ressusciter le Führer 66 ans après sa mort, il fallait oser.  Timur Vermes n’a pas eu peur de relever ce défi dans son premier roman, Il est de retour.

Prenez simplement le blocus de Leningrad.
Deux millions de civils coincés dans cette ville, sans ravitaillement. Il faut déjà avoir une certaine conscience de son devoir pour y envoyer chaque jour des milliers de bombes, la plupart dirigées sur les entreprises de vivres. (…) Naturellement, ces civils n’avaient aucune valeur sur le plan racial…

En 2011, dans un terrain vague à Berlin, Hitler se réveille. Il n’a pas changé contrairement au monde qui l’entoure à présent. Secrètement, il espère que son « héritage » est bel et bien présent. Les désillusions vont se succéder pour l’ancien chef du Reich. Attention, à aucun moment je ne prends cet homme en pitié. Le but du roman n’est pas là et à vrai dire comment quelqu’un pourrait avoir de la peine pour lui. Car une chose est sûre, c’est que tabou et Hitler font toujours la paire, même 66 ans après sa mort. On peut parler de Staline, Franco ou Mussolini avec légèreté, mais Hitler, c’est encore très difficile. C’est probablement pour cela que ce roman qui oscille entre récit historique, satire et humour semble toujours être sur la corde. Cependant le romancier ose. Il prend le personnage le plus haït au monde et parvient à faire une critique de la société actuelle à travers les yeux de ce-dernier. Tout au long, la question du « et si la dictature nazi reprenait le dessus ? » est sous-entendu mais malheureusement pas suffisamment traitée. Dans ce registre, le roman La Vague de Todd Strasser était beaucoup plus efficace.

Peu à peu je prenais conscience de ma situation. Si tout cela n’était pas un rêve – et cela durait depuis vraiment trop longtemps pour n’être qu’un rêve –, j’étais bel et bien en 2011. Je me retrouvais donc dans un monde complètement nouveau et il me fallait supposer que, de mon côté, j’étais aussi pour ce monde un élément complètement nouveau. Et si ce monde fonctionnait encore de façon un tant soit peu logique, il devait s’attendre à ce que j’aie cent vingt-deux ans, ou – ce qui était plus vraisemblable – à ce que je sois mort depuis longtemps.
« Vous jouez aussi d’autres rôles ? me demanda l’homme. Je vous ai déjà vu quelque part ?
— Je ne joue pas, répondis-je de façon sans doute un peu abrupte. »

Si le sujet était vraiment intriguant cela n’a malheureusement pas suffit. Il y a trop de longueurs et la plume n’est pas assez acerbe à mon goût. On a la sensation que l’auteur ne sais pas vraiment sur quel pied danser. Si parfois il fait de l’ancien Führer un être stupide, par d’autre il est un poil trop compatissant à mon goût, mais la dangerosité et la monstruosité du personnage ne sont jamais bien loin. La question du « peut-on rire de tout ?  » qui est au cœur du côté comique du récit m’a déconnecté du récit. Il faut dire qu’au vu du sujet, il est difficile de déconnecter notre affect de la manière dont on va accepter le récit. Et au vu de mon sentiment sur cette période et sur le personnage, il est certain que cela ait joué dans mon ressenti.

Il est de retour de Timur Vermes
Ed. Belfond


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