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Marion Cotillard en Jeanne d’Arc au Bûcher à Monaco

Publié le 09 février 2015 par Podcastjournal @Podcast_Journal
Rédacteurs et stagiaires: cliquez sur cette barre pour vous connecter en back-office de la rédaction! - Lecteurs et contributeurs: inscrivez-vous / connectez-vous sur les liens à droite --> "Jeanne d'Arc au Bûcher": voilà bien un chef-d’œuvre de la littérature française, un de ceux que l'on ne peut écouter sans un léger pincement pour peu que l'on soit un tant soit peu sensible à la poésie, la vraie, celle qui vient du cœur.
Puisant ses sources dans la chanson populaire voire les mystères médiévaux, cet oratorio dramatique atteint sans vergogne la grandeur du théâtre antique. Et cela, sans jamais chausser les cothurnes, avec simplicité, naïveté.
Honegger l'a proclamé haut et fort: "composer une musique d'aujourd'hui, qui touche le cœur et l'esprit du plus large public d'aujourd'hui et de partout".
Pari tenu même si le texte épique de Claudel soulève parfois l’hilarité dans sa bondieuserie images d’Épinal cul-cul la praline.

Au milieu de cette œuvre originale qui repose sur un équilibre savant entre la voix parlée, la voix chantée, l'orchestre et des chœurs omniprésents, s’avance Marion Cotillard, qui connaît parfaitement ce grand livre mystique pour l’avoir interprété tant et tant de fois.
En symbiose totale avec son héroïne, se confondant avec son personnage avec une formidable intensité, l’actrice s’abandonne à lui, physique et voix d'enfant, pantin juvénile dans les mains de Dieu, jouet pitoyable dominé par les évènements qui avancent, implacables, une aventure qui presque la dépasse.
Quittant un moment les projecteurs du cinéma pour ceux du théâtre, cette délicate artiste incarne de manière unique la célèbre lorraine qui reste en même temps une figure d'une grandeur surhumaine.
De l'incarnation grandiose du Prologue au pur sanglot extatique de la fin, en passant par ce moment ineffable de l'horreur eschatologique qui nous met tant mal à l'aise, l’actrice oscarisée, césarisée, ne cesse de nous bouleverser par sa simplicité absolue, anti-déclamatoire, un visage tantôt grave, tantôt joyeux, une gestuelle impeccable.
Inoubliable dernier quart d'heure avec cet insoutenable supplice qui nous la ferait presque imaginer en croix sur un Golgotha de braise.
Le Frère Dominique d’Éric Genovese lui donne la réplique, fervent, chaleureux, sobre mais un rien en retrait.
Les onze scènes s'enchaînent sans un temps mort, dans une théâtralité sans excès.
Pour le procès, Porcus provoque encore et toujours l'hilarité par ses propos et attitudes absurdes. La partie de Cartes (ou le pouvoir finalement appartient aux valets) restera aussi un morceau de bravoure avec ses acrobatiques circonvolutions orchestrales.
Les solistes vocaux sont tous excellents. Anne-Catherine Gillet donne des versets de la Vierge une interprétation suave et céleste, Thomas Blondelle campe un Porcus ténorisant à souhait et théâtralement très efficace, face aux interventions percutantes du narrateur Christian Gonon. Bien en voix aussi Simone Osborne, Faith Sherman et Steven Humes.
Kazuki Yamada enfin emporte la lave orchestrale distillée par notre Orchestre Philharmonique de Monte Carlo et l’imposante masse chorale (Chœur de l’Orchestre de Paris et Chœur d’enfants de l’Académie de Musique Rainier III superlatifs) dans un immense souffle de vie, de passion, de ferveur.

Très belle mise en place, très belle pâte sonore et vocale pour une partition poignante et finalement disparate, unique dans l’histoire de la musique et du lyrique.

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