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"Into the Woods": une promenade dans l’univers du conte

Publié le 10 février 2015 par Lifeproof @CcilLifeproof

Qui n'aimerait pas vivre dans un conte ? Moi, j'en ai toujours rêvé. Même si aujourd'hui je suis adulte, j'ai préservé mon regard émerveillé à la lecture d'un conte ou devant un film fantastique. La joie de retourner en enfance pendant quelques heures ; s'évader du quotidien et de ses préoccupations ; se retrouver dans un autre monde, dans une autre vie.

" L'appareil photo et la caméra sont des objets à caractère magique, qui dotent celui qui les possède et qui sait s'en servir de pouvoirs particuliers, que l'on peut résumer par celui de mettre en scène le monde et les êtres selon sa fantaisie [...] des moyens de rendre visible ce qui n'est pas visible à l'œil nu [...] faire surgir du visible ce qui n'est d'abord présent que dans l'imaginaire lié au visible, autrement dit, la vision du désir et le désir de vision "

Sorti le 28 janvier 2015 dans nos salles obscures, le film Into the woods (Promenons-nous dans les bois) nous plonge dans un univers, à la fois, enchanteur et menaçant. Réalisé par Rob Marshall et produit par les studios Disney, ce film est une adaptation de la comédie musicale du même nom créée par Stephen Sondheim et James Lapine en 1986.

Il s'agit d'un film choral, dans lequel les acteurs poussent la chansonnette avec brio, il faut le dire ! Ceci permet de donner une atmosphère atypique au film, qui réunit de nombreux grands acteurs au talent incroyable : Meryl Streep en sorcière tantôt affreuse tantôt sublime, Emily Blunt en boulangère amoureuse de son mari mais qui se laisse séduire par le prince charmant et minaude comme une adolescente, Johnny Depp est exceptionnel dans le rôle du loup dangereux et sournois tout en étant attirant.

D'un dynamisme exaltant, le prologue présente avec beaucoup de cadence les personnages que nous allons suivre. Les histoires des protagonistes venant de contes différents - Cendrillon, les Princes Charmants, le Petit Chaperon Rouge, Raiponce, la Sorcière, Jack et le haricot magique, les géants - sont enchevêtrées et reliées par le récit du Boulanger et de son épouse, qui fait office de fil rouge. En effet, pour lever un sortilège jeté par la Sorcière, ces derniers doivent trouver une cape rouge, un chausson doré, une vache blanche comme le lait et des cheveux aussi blonds qu'un épi de maïs.

Ils sont tous unis dans un destin commun au sein de la forêt enchantée. Celle-ci devient cauchemardesque, lorsque tout bascule, avec la venue de la géante, qui veut venger son mari, tué par Jack. Le décor féerique est détruit, le prince charmant est infidèle, la femme du boulanger meurt et tout le monde à peur. Finalement la morale de l'histoire est : " Personne n'est seul ".

James Corden et Meryl Streep dans Into the woods © Walt Disney Pictures

Les codes du conte - l'état initial, l'élément déclencheur, les péripéties, la résolution et l'état final - sont ici respectés. Cependant, les créateurs de la comédie musicale et du film ont réinterprété, de façon magistrale, les récits connus de tous, s'inspirant de l'ouvrage de Bruno Bettelheim, Psychanalyse des contes de fées, publié en 1976. Le Petit Chaperon Rouge est une peste, Raiponce est la sœur cachée du Boulanger, Cendrillon laisse délibérément sa pantoufle pour tester l'amour du prince, qui n'est finalement pas si charmant...

Destiné à un large public, le film est emprunt de magie, de tristesse et de noirceur. Néanmoins, l'humour est introduit avec subtilité. D'ailleurs, la scène des princes charmants, qui chantent au milieu de la rivière est risible. En effet, les deux frères s'affrontent à coup de vocalises à qui sera le plus charmant et le plus viril, sans être mouillé, ni décoiffé.

Les éléments surnaturels ou féeriques, les opérations magiques, les situations miraculeuses, l'irrationnel font parties des contes. Provenant du folklore, ces histoires oraux, transmises de génération en génération, ont été retranscrites à l'écrit dès le XVIIe siècle et diffusées par le biais des salons littéraires mondains. Charles Perrault, les frères Grimm - Jacob et Wilhelm - et Hans Christian Anderson sont les plus célèbres des écrivains du merveilleux.

Qu'est-ce que le merveilleux ? Le merveilleux est en quelque sorte un lieu où la créativité puise son inspiration ; un imaginaire dans lequel les songes, le mythe, le féerique, l'irrationnel se côtoient pour s'assembler dans un univers unique. En effet, " la magie n'est pas reproductible, elle n'est pas la même pour tout le monde. Elle est immensément personnelle, et parle aux vérités les plus subjectives ".

Évoluant au fil du récit, le conte existe pour rassurer les enfants. Ils accompagnent le héros, rencontrent les personnages alliés et neutralisent l'agresseur. Divertissants mais également éducatifs, les contes apprennent aux jeunes lecteurs la dichotomie du bien et du mal. Grâce à la morale de l'histoire, la compréhension de la réalité est plus facile pour les enfants ; elle répond aux angoisses des enfants et aide au développement.

Laissons le mot de la fin à Bruno Bettelheim : " Tout conte de fées est un miroir magique qui reflète certains aspects de notre univers intérieur et des démarches qu'exige notre passage de l'immaturité à la maturité ".


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