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Tory burch

Par Aelezig

Article de Vogue - Février 2015

Ultra féminin, chic, facile à vivre, le style en colorama de Tory Burch évoque la douceur et le piment de la réussite. Ce sont les ingrédients du rêve américain que la marque incarne, et sa meilleure ambassadrice en est la fondatrice : Tory Burch, elle-même icône de mode et déesse du business, qui ouvre au printemps un flagship à Paris.

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Burch, son nom - celui de son ex-mari - est Burch. Mais son prénom est Tory, joyeux, vigoureux, inédit pour une fille. Un prénom porte-bonheur, comme un trèfle à quatre feuille, à quoi ressemble d'ailleurs le logo de sa marque. Il lui va bien. La chance, Tory Burch sait l'attirer, l'avoir à ses côtés. Venu de tous bords, un following consistant escorte la créatrice : on la dit intelligente et drôle, gracieuse, pugnace, solidement arrimée à des valeurs vraies. Cette golden girl jouit d'une rare popularité. Et ce qu'elle représente au titre de role-model est inspirant. Une icône de style doublée d'une déesse du business. Une remarquable philanthrope. What else ? L'essentiel, peut-être, à ses yeux : une mum, investie à 100 % dans l'éducation de trois enfants. "Qui n'aimerait être Tory Burch ?" souligne judicieusement Anna Wintour, la rédactrice en chef de Vogue Etat-Unis, fidèle supporter.

Sa réussite, c'est vrai, a l'ampleur du rêve américain. Blonde aux yeux noirs, silhouette slim, la ravissante self-made entrepreneur pèserait deux milliards de dollars sur la balance en chiffre d'affaires. Depuis son lancement à New Yor l'année 2004, sa marque vit une croissance météorique. En dix ans, cette autodidacte en stylisme a bâti un empire (cent quarante quatre boutiques) dans le monde entier, de Dubaï à Pékin, de Séoul à Londres, de Rome à Istanbul. Son site de vente en ligne bat des records de performance. Au printemps, Tory Burch part à la conquête des Parisiennes avec un flagship rue du Faubourg Saint-Honoré. Un événement longuement mûri. "Paris représente un défi. C'est excitant, mais un peu intimidant d'aborder Paris pour une créatrice américaine."

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L'aventure a commencé dans sa cuisine, à l'abord de ses 40 ans. Une histoire de flair, d'intuition, l'heureux mélange d'un héritage esthétique transmis presque à son insu et d'une personnalité créative, fonceuse. La jolie Tory découvre l'univers de la mode après son diplôme en histoire de l'art à l'université de Pennsylvanie. "Sur les conseils de ma mère, qui adorait son style, j'ai appelé Zoran (créateur croate goûté par la jet-set, de Jackie O à Lauren Hutton) pour demander un job. "OK, m'a-t-il dit, soyez à New York dès la semaine prochaine. Zoran se cachait dans la salle de bains quand des clients se présentaient. C'était un peu dingue. Très amusant. Zoran avait un talent fou".  Séduite, la jeune femme poursuivra l'expérience dans la branche Relations Publiques et Marketing de marques réputées : Ralph Lauren, Vera Wang, Loewe. Jusqu'aux circonstances familiales qui font bifurquer son parcours. Le groupe LVMH, son dernier employeur, lui a offert la direction de Loewe US. "Enceinte de mon fils Sawyer, j'ai décliné. Avec trois enfants en bas âge (les aînés sont des jumeaux, Nicholas et Henry), j'aurais manqué à mon devoir de mère. J'ai choisi de me consacrer à eux. Cela m'a permis, un, de réaliser combien il m'importait d'avoir une carrière. Deux, réfléchir à un concept et amasser du courage pour me lancer".

Pendant des mois, la créatrice, secondée d'une équipe de stylistes - toujours à ses côtés -, élabore des modèles autour de la table Saarinen qu'on débarrasse pour les repas. L'inspiration jaillit spontanément du paradis de son enfance. "Mes parents, Buddy et Evan Robinson, adoraient la mode et je les adorais. Je n'ai eu qu'à puiser dans mes souvenirs d'eux dans les années 60, 70." Archives de magazines et shopping vintage complémentent sa vision. Pour la décoration, Tory fait également confiance à son patrimoine affectif. Les couleurs choc et le graphisme du Britannique David Hicks seront ses références, supervisées par l'architecte Daniel Romualdez.

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Située sur Elizabeth Street, dans le quartier de Nolita, sa première boutique est dévalisée dès le jour de l'ouverture. Un an plus tard, Oprah Winfrey, fan des tuniques de la marque, l'invite à son émission, vanant Tory Burch aux auditeurs : "She's the next big thing." Il en résulte un taux de visites record sur son site. L'année 2007, à nouveau, la société fait carton plein avec la ballerine Reva - le nom de sa mère. La success-story est en marche et ne s'arrêtera pas.

A y regarder de près, c'est en visionnaire qu'a procédé Tory. Dès le départ, elle a apposé le label "lifestyle" à sa marque, comme pour s'autoriser l'horizon le plus vaste. "Avec le recul, je dois admettre que mon discours montrait inconsciemment une ambition sans limite. En même temps, j'étais terrifiée. Et si les prêteurs ne rentraient pas dans leurs fonds ? N'investissez que les sommes que vous pouvez perdre, disais-je lors des rendez-vous." Tory veut aussi créer une fondation destinée à venir en aide aux femmes entrepreneurs américaines. On lui déconseille de mêler affaires et philanthropie, elle persiste. Au final, l'effet sera positif : "L'initiative nous a forcés a dégagés des bénéfices."

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Avec une gamme étendue d'accessoires, la marque Tory Burch reflète, à la manière de Ralph Lauren, une version de "l'American way of life". Son colorama, son style pétillant, bohemian-chic, évoquent des images savoureuses. Caftans sixties, ballerines à logo, robes de cocktail, sweaters, imprimés surtout font revivre Katharine Ross dans Le Lauréat, Peter Sellers dans The Party : une époque. Parmi ce trajet iconique dans la mémoire US, certaines pièces - dont la célèbre ballerine - restent des best-sellers. On aurait pourtant d'assimiler la marque à un style classique américain à la Grace Kelly. Foncièrement innovatrice, Tory Burch se nourrit d'influences récoltées lors d'incessants voyages en Asie ou au Moyen-Orient pour se développer. Son ADN est désormais global. C'est flagrant et très réussi dans les jeux de matières et de longueurs, le "mood arty" de la collection printemps-été 2015, inspirée par Françoise Gilot, la compagne de Picasso. Et la créatrice fourmille de projets. Dans le futur, une collection homme. L'an prochain, une ligne "active wear" - des appareils et accessoires destinés au golf, tennis ou yoga, des vêtements casual qui vous accompagnent en voyage ou passent de la salle de gym au déjeuner du dimanche. "Je remarque qu'après le sport, on a tendance à passer la journée ainsi vêtu."

Dans son livre In color, qui paraît ce mois-ci chez Abrams, Tory Burch rend une fois de plus hommage à ses parents. "Le style n'est pas une question d'argent, disaient-ils. C'est une façon de vivre." Buddy et Eva Robinson, sans doute, sont ses héros. A Valley Forge, la ferme en Pennsylvanie où Tory a grandi, coulait une sorte de dolce vita rurale. "Huckleberry Finn (roman de Mark Twain narrant les aventures d'un jeune garçon le long du fleuve Mississippi) meets Andy Warhol" : c'est ainsi que mon frère Robert décrit notre enfance. Seule fille dans la fratrie, je vagabondais dans la campagne, jouant avec les animaux de 9 heures du matin jusqu'à l'heure où sonnait la cloche du dîner. Mes parents ne s'inquiétaient pas. Ca m'a donné un esprit d'indépendance, je crois." Le livre lui, a la structure d'un arc-en-ciel. Orange, jaune, vert, bleu, rose... Outre les photos de défilés, l'illustration est composée d'images des membres de sa famille, d'amis chers, de personnalités qui ont boosté sa créativité, de lieux et d'objets qui nourrissent son imaginaire. A tourner les pages, c'est le bleu du ciel qui ressort, l'éclat des journées d'été, la joie de vivre, un incurable optimisme. Le monde de Tory.


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