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La sélection de la semaine : KZ Dora, Dad, Revenge classroom, Prison d’ébène, Bjorn le morphir, L’homme montagne, Canardo, Les nouveaux mystères, Le confesseur sauvage, Chimo, Les collectionneurs, Moses Rose, Mort de lol et Foot 2 rue

Par Casedepart @_NicolasAlbert

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L’homme montagne, Séverine Gauthier et Amélie Fléchais (Delcourt)

Pour ce troisième week-end du mois de mars, Case Départ vous propose sa belle sélection de la semaine. En vous ouvrant sa bibliothèque, le blog met en lumière de très bonnes bandes dessinées. Nous passons au crible, les albums suivants : La réédition en intégrale de KZ Dora : un magnifique album de Robin Walter fondé sur l’histoire de son grand-père, la nouvelle série jeunesse de Nob : Dad, le premier volume de l’excellent manga Revenge Classroom, Prison d’ébène : premier album de Sylvain Combrouze sur la Traite des Noirs à Nantes, le quatrième volet de Bjorn le morphir, le très joli conte pour enfant L’homme montagne, la nouvelle enquête de Canardo, Les nouveaux mystères : un album pour dégommer les impostures et les mythes urbains, le nouvel album de Foerster : Le confesseur sauvage, Chimo : un carnet de David Collier en Afghanistan, un recueil proposé par les éditions Long Bec : Les collectionneurs, Moses Rose : un album sur le célèbre déserteur de la bataille de Fort Alamo, Mort de lol : une compilation de strips de Loïc Sécheresse sur l’adolescence et un nouvel album de Foot 2 rue. Bonnes lectures.

KZ Dora

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Les éditions Des ronds dans l’o publient de nouveau KZ Dora, un album de Robin Walter. Elles proposent cette réédition sous la forme d’une intégrale. En effet, le récit fut édité en deux tomes entre 2010 et 2011.
Résumé de l’éditeur :
KZ Dora : Camp de concentration basé en Allemagne, destiné à la fabrication d’armes secrètes, les missiles V1 et V2, en fonctionnement de 1943 à 1945.
Au matin du 1er septembre 1939, l’Allemagne d’Hitler attaque la Pologne. Cinq personnages, Paul, élève officier français, Émile, jeune résistant insouciant, Hans, SS issu des jeunesses Hitlériennes, Bastian, officier SS d’expérience, et Michael, ambitieux scientifique allemand travaillant sur les missiles V2, armes secrètes d’Hitler, voient leur destin se croiser au camp de concentration de Dora.

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Des Ronds dans l’o a profité de la célébration du 70e anniversaire de la Libération pour rééditer le très bel album de Robin Walter, sublime hommage à son grand-père, Pierre. Dans cette intégrale, l’auteur parisien, dont c’était la première bande dessinée publiée, s’inspirait de la vie de son aïeul pour délivrer un ouvrage mémoriel empreint d’un profond respect pour celui qui rentrera de Dora, un camp très particulier du 3e Reich. Camp de concentration à proximité de Buchenwald, il est destiné à la fabrication des missiles V1 et V2 entre 1943 et 1945. Lieu symbolique, place stratégique centrale et programme phare dans la poursuite de la guerre par les Allemands. Hitler et les hauts-dignitaires nazis fondaient de nombreux espoirs dans ces armes secrètes.

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Pour cela, de grands spécialistes et des ingénieurs furent détachés sur la camp, habitant dans une cité construite à proximité. Pour creuser les galeries souterraines, un grand nombre de prisonniers furent internés à Dora. Comme le montre l’album, beaucoup mourraient d’épuisement voire du sadisme des officiers. Il n’y avait pas de place pour les plus faibles ou les malades. En effet, si Robin Walter livre une récit quasi réel, il n’épargne rien à ses lecteurs, ni la dureté, ni les humiliations, ni les châtiments donnés aux prisonniers ; c’est en cela que l’ouvrage est poignant et qu’il fait office de document historique majeur. Très documenté, il se fonde aussi sur les Notes sur mes années d’internement et de déportations (aux éditions Tensing, 2013), des écrits des son grand-père (croquis et notes) reproduits intégralement en fin d’album.

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Pour incarner au mieux son histoire, l’auteur de Prolongations (Des ronds dans l’o, 2014-2015), imagine les destins de deux français Paul et Emile et ceux de trois allemands Hans, Bastian et Michael ; tous liés par un seul lieu.

Le trait en noir et blanc et aux feutres de Robin Walter imprime un sentiment de frayeur pareil à celui que les prisonniers ont pu éprouver. Les décors extrêmement soignés et détaillés participent à cette ambiance très bien restituée.
Hymne à la résistance, cette bande dessinée est un véritable message d’amour et de profond respect d’un petit-fils à son grand-père.

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KZ Dora : Récit de mémoire, pour ne pas oublier les prisonniers, pour les victimes de la barbarie nazie et pour la liberté, symbole fort des luttes passées et présentes.

  • KZ Dora, l’intégrale
  • Auteur : Robin Walter
  • Editeur : Des ronds dans l’o
  • Prix : 24€
  • Sortie : 19 mars 2015

Dad

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Mon ami Grompf et Mamette (chez Glénat) sont les deux séries qui ont fait découvrir au grand public, le talentueux Nob. Ce mois-ci, les éditions Dupuis proposent Dad, le nouvel univers de l’auteur tourangeau.

Résumé de l’éditeur :
Père célibataire au foyer, c’est un boulot à plein temps, et ce n’est pas Dad qui va prétendre le contraire ! Surtout avec quatre filles au caractère bien trempé, et pas vraiment du genre à s’écraser devant leur éternel ado de père…
Entre Pandora l’intello, Ondine la volcanique, Roxane l’espiègle et Bébérenice la petite dernière, ce comédien au chômage a trouvé le rôle de sa vie : celui de s’occuper de sa famille sans rien perdre de sa propre jeunesse.

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Comme pour la formidable série Mamette, Nob décline un nouvel univers jeunesse empli de tendresse, de folie-douce et d’humour. Autour de Dad, ancien acteur célèbre, papillonnent ses 4 filles qu’il a eu avec 4 femmes différentes. Entre quelques publicités pour un slip, sa vie se résume à maintenir un semblant d’unité dans cette famille recomposée.

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Papa poule, parfois perdu voire dépassé, pas trop sportif mais tellement humain et aimant, il doit faire face seul aux difficultés du quotidien engendrées par ses 4 sympathiques enfants. Pandora, dite Panda, en Terminale S, geek et tête pensante de la famille ; Ondine, adolescente charmeuse et attirée par de nombreux garçons ; Roxane, casse-cou, sportive et véritable tourbillon et enfin Bébérénice, a peine un an.
Nob propose des gags en une planche d’excellente qualité à l’humour tendre, agréable et jamais méchant ; idéal pour les jeunes lecteurs. Ils observent alors la vie joyeuse et parfois dure de cette belle famille. L’auteur de Mamette distille parfois quelques petites pastilles racontant le passé des jeunes filles, ce qui permet de prendre une tournure nostalgique bienvenue. De nouveau, le trait tout en rondeur de Nob est de grand qualité, très chaleureux grâce à des couleurs d’une belle vivacité.

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Force est de constater que Nob est le digne héritier de Geerts (Jojo, chez Dupuis) et est l’un des meilleurs auteurs jeunesse de la bande dessinée européenne. L’intelligence des scénarios et la force du graphisme en font un auteur de grand talent.

  • Dad, tome 1 : Filles à papa
  • Auteur : Nob
  • Editeur : Dupuis
  • Prix : 9.90€
  • Sortie : 20 mars 2015

Revenge classroom

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Les éditions Doki Doki ont réussi le tour de force de lever la licence pour la France de Revenge Classroom, un formidable manga de Karasu Yamazaki et Ryu Kaname.

Résumé de l’éditeur :
Ayana est élève en troisième dans un collège comme les autres. Violences, menaces, racket… les élèves de sa classe font de sa vie un véritable cauchemar. Mais après une grave agression, elle décide de prendre sa revanche : ils doivent subir le même enfer ! Elle ne tarde pas à découvrir qu’un meneur inconnu est à l’origine de ses mauvais traitements : s’agirait-il d’une de ses anciennes amies ? Ayana se lance dans une croisade vengeresse implacable qui risque de déraper à tout moment…

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Prévu en quatre tomes, le premier volume de Revenge Classroom est haletant et très accrocheur. A l’instar de Gewalt (de Kogi Kônô) qui mettait en scène la rébellion d’un lycéen harcelé, cette série mise sur l’angoisse et la peur.
Le lecteur prend quasiment du plaisir en observant les différentes vengeances d’Ayana. Son sadisme décuplé nous enchante et flatte nos plus bas instincts, comme une sorte de bonheur interdit. Aux humiliations subies (violences verbales et surtout violences physiques), elle se montre d’une grande intelligence pour échafauder des plans machiavéliques en étant dans l’ombre, se découvrant l’âme d’une manipulatrice mentale, utilisant les uns pour rabaisser les autres. Et l’on se complait dans ce cynisme et ces vengeances. Il faut dire que son regard, par son œil qui frise, est désarmant mais tellement salvateur. La jeune lycéenne ne fait fait preuve d’aucune pitié, aucun pardon car sa rancune est tenace.

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Si le scénario de Karasu Yamazaki est excellent, la partie graphique de Ryu Kaname l’est aussi. Le trait classique de mangaka est composé de hachures et de tramages qui lui permettent de renforcer les mouvements mais aussi augmenter les expressions de peur sur les visages des personnages.

  • Revenge classroom, volume 1
  • Scénariste : Karasu Yamazaki
  •  Dessinateur : Ryu Kaname
  • Editeur : Doki Doki
  • Prix : 7.50€
  • Sortie : 11 mars 2015
http://www.dailymotion.com/video/x2epdgz

Prison d’ébène

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Quels liens peuvent avoir la ville de Nantes au 21e siècle et l’Ile de Gorée au 18e siècle ? Comment des rites vaudous de l’époque de Louis XV peuvent-ils avoir une relation avec la capitale ligérienne actuelle ? C’est le projet ambitieux qu’a voulu développé Sylvain Combrouze dans son album Prison d’ébène, édité par La Boîte à Bulles.
Résumé de l’éditeur :
Deux histoires, deux époques. Nantes, au XXIe siècle. À la limite du vagabondage, Lucien débarque en ville, sans argent ni repères. Le hasard lui fait croiser le chemin d’Ernest, un vieil homme paisible. Ernest… Est-il vraiment ce qu’il paraît être ? Un petit vieillard solitaire, doux et sans histoires ? Petit à petit, son passé remonte à la surface… Un passé étonnant…

Ile de Gorée, au XVIIIe siècle. Un sorcier vaudou négocie avec un capitaine négrier la libération de son « stock » de marchandises… Un marché au prix inestimable.

Au fil des chapitres, le lien entre ces deux époques se dessine et donne à voir furtivement un pan peu glorieux de l’histoire de Nantes…

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A l’instar d’Un amour d’océan (Panaccione et Lupano chez Delcourt), Prison d’ébène est vierge de tout dialogue, d’où les difficultés de compréhension à surmonter et une grand lisibilité dans le découpage et le dessin à entretenir. C’est ce qu’a tenté et assez bien réussi Sylvain Combrouze ; ce qui permet au lecteur de laisser libre son interprétation de l’album.

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Il faut dire que le sujet permet de laisser libre court à son imagination. D’un côté, l’Ile de Gorée, tristement célèbre pour être le point central du Commerce Triangulaire mis en place au 15e siècle et élevé au rang de normalité par Louis XIV à travers son infâme Code Noir. C’est de ce lieu que partaient les navires remplis d’esclaves jusqu’aux Amériques et qui par la suite revenaient les cales remplies de marchandises de grandes valeurs jusqu’en France et particulièrement à Nantes, au Havre ou à La Rochelle. Un intrigant sorcier vaudou tente alors de négocier la libération de ses compatriotes à un capitaine de négrier.

De l’autre, Lucien, néo-nantais, qui croise Ernest, un vieil homme qui lui offre le gîte. Nantes, à l’histoire sombre par son port négrier va donc revenir au centre de la vie des deux hommes.

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Au fil des pages, Sylvain Combrouze alterne les deux récits qui s’entremêlent. Très documentée, son histoire évoque pudiquement et subtilement la Traite des Noirs et le passé trouble d’Ernest.

Le jeune auteur, dont c’est la première bande dessinée publiée, propose des pages d’une grande qualité, grâce à un trait en noir et blanc, réhaussé d’une teinte d’ocre pour les scènes contemporaines, d’une belle originalité. Vif, il est composé de hachures et de grattages qui permettent un travail intéressant sur les ombres et les lumières.

Prison d’ébène : un premier album encourageant et prometteur de Sylvain Combrouze, sur une thématique forte, appréhendée d’une manière originale.

  • Prison d’ébène
  • Auteur : Sylvain Combrouze
  • Editeur : La Boîte à Bulles
  • Prix : 17€
  • Sortie : 18 mars 2015

Bjorn le morphir

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Après les trois premiers tomes réédités par Rue de Sèvres, Thomas Lavachery et Thomas Gilbert proposent le quatrième volume inédit de la saga d’héroïc-fantasy jeunesse Bjorn le morphir.
Résumé de l’éditeur :
Le repos n’aura été que de courte durée pour Bjorn. Les ennemis attaquent le royaume de toutes parts. Le roi, blessé, rappelle Bjorn a ses côtés. Le jeune morphir saura-t-il faire face au plus grand des défis, la guerre ? Le roi survivra-t-il à ses blessures pour mener le royaume face aux complots intérieurs et dangers extérieurs ?

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La maison d’édition Rue de Sèvres, qui a fêté ses un an d’existence il y a peu, a eu l’excellente idée de rééditer les trois premiers volumes, initialement parus chez Casterman. Comme pour les précédents tomes, l’histoire est une adaptation des romans éponymes de Thomas Lavachery qu’il a lui même réécrit pour cette version dessinée. Cette très belle saga d’héroïc fantasy conjugue tous les ingrédients du genre : batailles, intrigues, fantastique, rebondissements, personnages bien cernés et à la psychologie intéressante. Bien exploités ces différents composants permettent de passer un excellent moment de lecture. Ciblé pour les adolescent, ce récit ravira aussi les plus âgés, amateurs du genre.

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Alors que Bjorn pensait goûter à un repos bien mérité, Thomas Lavachery lui fait de nouveau subir des tas d’avaries et une nouvelle quête à démêler. Accompagné de Dizir et Inge, le héros s’apprête à déjouer une guerre et devient même Jarlal, sorte de gouverneur intérimaire à la place du souverain qui vient de subir un attentat quasi meurtrier.
Pour accompagner le romancier, la partie graphique est de nouveau assurée par Thomas Gilbert. Le trait vif et enlevé de l’auteur de l’excellent Vénéneuses (chez Sarbacane) a lui aussi évolué depuis les précédents tomes parus entre 2009 et 2013. Son dessin est plus rond et il utilise néanmoins avec beaucoup de talent un palette de couleurs variées.

Bientôt une suite ? Nous l’attendons avec plaisir.

  • Bjorn le morphir, tome 4 : Les armées du roi
  • Scénariste : Thomas Lavachery
  •  Dessinateur : Thomas Gilbert
  • Editeur : Rue de Sèvres
  • Prix : 14€
  • Sortie : 18 mars 2015

L’homme montagne

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Séverine Gauthier et Amélie Fléchais plongent les jeunes lecteurs dans une très jolie fable publiée par Delcourt et s’intitulant L’homme montagne. Entre fantaisie, fantastique et quête personnelle, elles proposent un très beau conte initiatique.

Résumé de l’éditeur :
Grand-père ne peut plus voyager. Les montagnes qui ont poussé sur son dos tout au long de sa vie sont devenues trop lourdes. L’heure est venue pour lui de penser à son dernier voyage, mais c’est un voyage qu’il doit faire seul. L’enfant lui fait alors promettre de ne pas partir tout de suite. Il va aller chercher pour lui le vent le plus puissant qui soit, celui qui peut soulever les montagnes.

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Ce très beau récit fantastique de Séverine Gauthier est construit comme une fable où la quête initiatique personnelle du jeune héros est au centre de l’histoire. Le petit garçon décide d’aider son grand-père proche de la mort : ses montagnes sur son dos sont de plus en plus lourdes pour lui et il souhaite effectuer son dernier voyage, celui vers l’au-delà. Comme le vent peut déplacer des montagnes, le garçonnet se met en quête de trouver le plus grand vent qui existe près de chez lui, en haut d’une immense montagne. L’histoire aborde donc avec une belle émotion, le thème de la disparition d’un être cher.

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Au fil des pages, il va croiser de nombreux personnages, de nombreux animaux, le vent et même des pierres qui roulent sur le flanc de la montagne. Ces différentes rencontres vont l’interpeller, vont le faire réfléchir et le faire grandir. Cette quête de soi, personnelle se fonde sur des choses simples, qui suffisent dans une vie; des petits bonheurs simples. Une thématique sombre (la mort) es traitée mais à aucun moment, du pathos, plutôt de la joie et de l’optimisme.

Amélie Fléchais livre de nouveau, une fabuleuse partition, comme elle l’a démontrée dans Chemin perdu (Soleil) et Le petit loup rouge (Ankama). Son trait aérien est d’une très belle composition, agrémenté par des couleurs magiques laissant passer la lumière. Celle qui a travaillé sur des films d’animation comme Shrek et Kung Fu Panda, mais surtout les merveilleux Brendan et le secret de Kells et Le chant de la mer, prouve encore ici son immense talent d’illustratrice.

  • L’homme montagne
  • Scénariste : Séverine Gauthier
  •  Dessinatrice : Amélie Fléchais
  • Editeur : Delcourt, collection Jeunesse
  • Prix : 10.95€
  • Sortie : 18 mars 2015
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 Canardo

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Mort sur le lac est la vingt-troisième enquête de Canardo, publiée par Casterman et signée Sokal. Entre cadavres gisants dans l’eau, immigration clandestine et Garreni, l’ex-inspecteur doit faire marcher ses méninges pour démêler le vrai du faux.

Résumé de l’éditeur :
Branle-bas de combat au conseil des ministres du Belgambourg ! De nouvelles populations d’origine étrangère ont récemment fait leur apparition sur le territoire national, perturbant la tranquillité du Duché qui pour l’essentiel n’attirait jusqu’alors, en fait d’étrangers, que d’inoffensifs exilés fiscaux… Venues de la Belgique toute proche, via le lac Belga qu’elles traversent clandestinement à la faveur du brouillard et des nuits sans lune, des bataillons de chômeuses wallonnes déferlent sur le Duché, où elles alimentent travail au noir et réseaux de prostitution. Qui plus est, la présence massive de ces boat people d’un nouveau genre menace l’image du lac Belga, principal attrait touristique du Belgambourg. Bref, il faut agir ! D’où l’entrée en scène de l’ex-commissaire Garenni, retraité de la police belge bombardé nouveau patron de la police du lac. Qui, au bar du port, retrouve son vieux complice Canardo. Celui-ci enquête pour le compte d’une jeune femme amnésique à la recherche de son identité. Sauvée de la noyade dans le lac par un pêcheur qui l’a recueillie, elle a tout oublié de son passé et ne possède rien qui pourrait permettre de l’identifier.

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Prévu en diptyque, ce nouveau récit de Benoît et Hugo Sokal met de nouveau en scène Canardo au Belgambourg. Peut-être que le duo père-fils pourrait faire changer d’air, l’enquêteur puisque cela fait plusieurs tomes qu’il se retrouve dans ce petit pays ressemblant à la Belgique. Même si le personnage de La Duchesse est truculent (dialogues crus, relations aux autres, méthodes peu légales…), peut-être qu’ils ont trop tiré sur la corde ; la magie des précédents volumes opère moins.

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Malgré ce bémol, le lecteur retrouve avec plaisir le placide et débonnaire Canardo, trimballé d’une rive à l’autre, sans forcer le destin de son enquête, comme à son habitude. La solution tombera comme par miracle. Attiré par la boisson et les belles femmes, cette fois-ci l’héroïne est amnésique et est recueillie par une famille de tenanciers de bar, qui la surprotège. L’inspecteur retrouve aussi son vieux complice Garreni, sorti de sa retraite par la Duchesse pour sécuriser la région du lac, frontière-passoire pour les immigrés clandestins. L’histoire se fonde donc sur une thématique très actuelle (comme souvent dans les albums de Canardo) et cela est bienvenue.

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Pour mettre en image cette bonne enquête de Canardo, le duo de scénaristes fait de nouveau confiance à Pascal Regnauld, qui aide Sokal sur la série depuis 1995. Le dessinateur est parfait pour suivre les traces de Benoît Sokal. Son trait est dans la veine du créateur. Les couleurs de Benoit et Hugo sont, quant à elles, parfois très (trop?) sombres.

Une bonne enquête qui nous l’espérons prendra son véritable envol dans le second volet de Mort sur le lac.

  • Canardo, tome 23 : Mort sur le lac
  • Scénaristes : Benoît et Hugo Sokal
  •  Dessinateur : Pascal Regnauld
  • Editeur : Casterman
  • Prix : 11.50€
  • Sortie : 25 mars 2015

 Les nouveaux mystères

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Les éditons Fluide Glacial dévoilent le nouvel album de Jack Raynal, Les nouveaux mystères, un recueil d’histoires qui abordent les légendes urbaines et les théories du complot.

A travers les 64 pages et les 16 mini-récits, Jack Raynal démystifie les mythes, déjoue les complots et remet les pendules à l’heure concernant les légendes urbaines ; comme le montre l’œil (la main mise de puissances obscures sur la société) sur la couverture.

Tout y passe : les mythes de la route (la dame blanche…), la vérité sur la crise, le mythe de l’obsolescence programmée, le secret du masque de fer, le complot des maîtres du monde, la fin du monde et l’apocalypse.

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Parfois légères, parfois plus sombres, parfois oniriques et fantasmées, les histoires s’ancrent dans le quotidien des lecteurs. Toujours amusantes, elles font preuve d’un bel humour, entre cynisme, décalage et noirceur. C’est souvent fin et d’une belle intelligence. Cela peut même bousculer un peu le lecteur dans ses avis tranchés.

Le trait de l’auteur de Francis Blaireau Farceur (avec Claire Bouilhac, Cornélius) fait la part belle aux grands aplats de couleurs numériques.

  • Les nouveaux mystères
  • Auteur : Jack Raynal
  • Editeur : Fluide Glacial
  • Prix : 14€
  • Sortie : 18 mars 2015

Le confesseur sauvage

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Des fragments de lune tombent sur la centrale nucléaire de Tchernobourg, ce qui entraîne des pluies acides qui font muter les habitants de la ville. Transformés, les mutants viennent se confier à un poulpe empathique. Philippe Foerster livre chez Glénat, Le confesseur sauvage, un drôle de recueil d’histoires.

Résumé de l’éditeur :
Dans la ville de Tchernobourg, suite à une catastrophe nucléaire, une partie de la population se retrouve transformée en d’effroyables mutants. Résultat : des limaces géantes, hommes-araignées et toutes autres sortes de monstruosités côtoient à présent les citoyens lambda. L’un de ces mutants, un poulpe empathique, remarque un fait étrange : lorsqu’il s’assoit près de quelqu’un, l’un de ses tentacules se met inéluctablement à venir tapoter amicalement l’épaule de son voisin qui se met aussitôt à se confesser. C’est ainsi que notre ami poulpe va s’improviser prêtre et venir à la rencontre des habitants de Tchernobourg recueillir des témoignages tous plus délirants les uns que les autres.

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Philippe Foerster est un pilier de la revue Fluide Glacial depuis plus de 20 ans. Dans toutes les histoires qu’il propose, il aime la noirceur, l’humour grinçant et dénoncer les excès de nos sociétés contemporaines. Pour Le confesseur sauvage, il met en scène des anonymes, défigurés par ces pluies acides, mal dans leur peau et qui viennent se confier au Père Irradieu, cet être mi-homme mi-poulpe qui reçoit cela lorsqu’un de ses tentacules touche le confessé. Les histoires contées à ce prêtre qui n’en ai pas réellement un, sont dérangeantes, parfois glaçantes, mais tellement humaines finalement, comme une sorte d’appel à l’aide. Entre fantastique et poésie noire, l’auteur de Silex Files (Le Lombard) décline des mini-récits forts et c’est dans ce style d’écriture qu’il est le meilleur.

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Chacune des histoires possède sa charte de couleur qui permet d’unifier le récit et de le distinguer des autres confessions (une histoire, une couleur dominante). Le trait en noir et blanc est finalement très soigné malgré la difformité des personnages et le côté sombre des récits. Une belle réussite.

  • Le confesseur sauvage
  • Auteur : Philippe Foerster
  • Editeur : Glénat, collection 1000 feuilles
  • Prix : 22€
  • Sortie : 04 mars 2015

 Chimo

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Les éditions Cambourakis dévoilent Chimo, un très beau roman graphique de David Collier. Dans cet ouvrage, l’auteur canadien raconte son intégration dans le programme d’art des forces canadiennes se situant en Afghanistan, théâtre d’opérations militaires après les attentats du 11 septembre 2001.
Résumé de l’éditeur :
S’enrôler dans l’armée à 42 ans bien tassés, voilà le défi que s’est promis de relever, en dépit du bon sens, David Collier. L’objectif ? Intégrer le Programme d’arts des forces canadiennes pour se carapater en Afghanistan, et croquer la vie militaire dans la plus pure tradition des artistes de guerre qu’il admire tant, Alex Colville en premier. Avec le mordant du gonzo journalism, David Collier capte le quotidien des futurs soldats, entrecoupé d’éreintantes séances de corde à sauter et de réflexions décalées sur l’art, l’armée, le déclin du corps et ses inévitables corollaires. Au-delà du simple document sur la vie militaire, Chimo conte les déboires d’un homme maladroit et attachant, embarqué de son propre gré dans les arcanes d’un univers qui n’est plus le sien.

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David Collier et l’armée, c’est une très longue histoire. Il commence à publier ses premiers strips alors qu’il effectue son engagement de conscrit puis professionnel dans les années 80. Mais en 1986, il travaille pour la première fois pour la revue Weirdo, que vient de créer Robert Crumb. Digne héritier du talentueux auteur underground américain, son travail paraît dans de nombreuses autres revues spécialisées (Drawn and quarterly ou Zero Zero). Après avoir quitté l’armée une première fois en 1990, il se lance vraiment dans l’illustration et publie sa série dénommée tout simplement Collier, ainsi que The Frank Ritza Papers.

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Mais voilà, son envie irrésistible de retrouver l’institution militaire le titille et à 42 ans entre de nouveau dans l’armée. Il intègre alors le Programme d’art des forces canadiennes et part pour l’Afghanistan. Ses péripéties, il lui narre dans le formidable Chimo, qu’il a commencé sur les lieux de guerre et qu’il a achevé par la suite grâce à de nombreux croquis et recherches qu’il a ramené de là-bas. Cet album en noir et blanc répond à de nombreuses questions que le lecteur peut se poser sur une immersion au cœur d’un théâtre de conflits : entraînements, cours de stratégie et camarades de chambrée.

De cet ouvrage, Chris Ware, dithyrambique, dira : « Chimo est une bande dessinée originale, captivante, hilarante et méditative – je n’ai pas pu la lâcher. David Collier a l’oeil pour reproduire les détails les plus prosaïques, et cet élan de peur animale qui court à travers tout le récit est tout à la fois bouleversant et rafraîchissant. Je n’ai jamais rien lu de tel. J’ai adoré. »

  • Chimo
  • Auteur : David Collier
  • Editeur : Cambourakis
  • Prix : 19€
  • Sortie : 11 février 2015

Les collectionneurs

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Quatorze auteurs de bande dessinée sont réunis par les éditions Long Bec autour d’un projet commun, Les collectionneurs. Scénarisés par Baloo, les histoires ont pour thématique les collections sous toutes les formes.

Résumé de l’éditeur :
L’album est constitué de onze histoires courtes de 4 pages sur le thème des collections et des collectionneurs. Le ton est satirique : généralement ces collections sont des « malédictions » pour ceux qui les ont élaborées, et ça se termine souvent mal ! Le scénariste admet que ces histoires sont imaginaires mais le pire, constate-t-il, c’est qu’en se documentant, il s’est rendu compte que tout se collectionne et que la réalité dépasse parfois la fiction !! Certaines des collections abordées dans l’ouvrage sont constituées d’objets (des tabatières, des dédicaces de bandes dessinées, des voitures, des téléphones,… ), mais pas seulement, nous croiserons dans cette BD un collectionneur « d’emmerdes » ou encore de « conquêtes » féminines…

les collectionneurs (3)
- Dans Tête de pipe, Aris propose une variation sombre sur un collectionneur de tabatière.
– Thosy revisite le mythe de l’homme invisible.
– Olivier Supiot livre une histoire muette sur un chasseur de papillons.
La poisse aux trousses conte les mésaventures de Phu Nguyen, un homme qui n’a vraiment pas de chance.
– Jurg dessine l’histoire d’un passionné de dédicaces.
– Marcel a ouvert un musée du téléphone dans sa maison. Di Martino nous raconte les malheurs de cet homme écoutant tout le temps une célèbre émission de radio.
– Bessadi dévoile l’histoire d’un homme à femmes qui avait déjà collectionné 1000 à 20 ans.
– Une émission télé Collectionnez collectionneurs revient sur l’impressionnante passion de Dick, un ancien membre de groupe célèbre, pour les voitures.
– Mig raconte la vie de Patrick qui fabrique des objets en sucre.
Un conte de Léon met en scène un admirateur de jouets sous les pinceaux de Trass’bill.
– Les collectionneurs anonymes se réunissent pour parler de leurs addictions.

les collectionneurs (1)
Pour leur douzième album, les éditions du Long Bec ont innové en publiant un recueil d’histoires autour d’une thématique : les collections. Sous la houlette d’Eric Poelaert dit Baloo, les mini-récits proposent des variations sur ce thème. Tantôt amusantes, tantôt sombres, la plupart d’entre-elles possèdent un fond d’humour très noir proche de celui de Fluide Glacial. A noter que la couverture est signée du talentueux Jean Solé.

  • Les collectionneurs
  • Scénariste : Baloo
  •  Dessinateurs : Collectif
  • Editeur : Long Bec
  • Prix : 13€
  • Sortie : 27 février 2015

Moses Rose

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Moses Rose est accusé d’être un déserteur de la fameuse bataille de Fort Alamo. Seul survivant, il s’allie avec le shérif de la ville pour prouver qu’il a vraiment résisté à l’assaut des mexicains. Publiée par Grand Angle, cette version dessinée est signée Patrice Ordas, Patrick Cothias et mise en image par Christelle Galland.
Résumé de l’éditeur :
Accusé d’avoir été le seul déserteur de la bataille du Fort Alamo, Louis « Moses » Rose espère prouver qu’il a combattu avec ses camarades. Pour échapper à la prison, il n’a d’autre choix que d’aider le shérif Millsaps à retrouver de l’argent et des documents cachés dans les ruines du fort. Mais il s’agit d’un voyage de 900 kilomètres, au travers des contrées hostiles où les Comanches ont repris les armes…

moses rose (2)
Patrice Ordas et Patrick Cothias s’attaquent à l’une des plus mythiques batailles américaines : Fort Alamo. Pour incarner cet événement, ils ont décidé de s’inspirer d’un fait historique réel : celui de Louis Moses Rose et donc raconter l’histoire par le petit bout de la lorgnette. Ce français est un ancien soldat de l’armée napoléonienne. Il faut dire qu’il fut accusé de désertion dans ce moment terrible où 200 hommes, femmes et enfants furent tués par les 2000 soldats mexicains de Santa-Anna. Recherché pour être traduit dans une cour martiale, il aurait du être exécuté.
Mais, il aurait passé l’assaut dans une baignoire. Pour prouver sa bonne foi, il cherche tous les témoins qui l’auraient vu là-bas. Il se met alors en quête, aidé par un Shérif dont le frère, Isaac fut un compagnon de Rose là-bas. Cet homme a gagné au jeu une moitié de mine d’or. Décédé, le shérif serait donc un homme riche.

moses rose (3)
Après L’ambulance 13 et L’oeil des dobermans (chez Grand Angle), le duo de scénaristes revient avec un récit cette fois-ci trop classique, qui n’accroche que partiellement le lecteur. Pourtant la thématique historique était une excellente idée. Mais l’intrigue trop complexe perd rapidement le lecteur. Du côté graphique, Christelle Galland propose un trait réaliste assez abouti, même s’il existe des erreurs de proportions des corps ou la tenue des armes souvent ratée. Les recherches sur les décors ou les costumes permettent néanmoins une belle plus-value. Prévue en deux volume, l’histoire devra s’alléger pour être plus accrocheuse.

  • Moses Rose, tome 1/2 : La balade de l’Alamo
  • Scénaristes : Patrice Ordas et Patrick Cothias
  •  Dessinatrice : Christelle Galland
  • Editeur : Grand Angle
  • Prix : 13.90€
  • Sortie : 25 février 2015

Et pour quelques pages de plus…

Pour compléter notre sélection de la semaine, Case Départ vous conseille aussi les albums suivants :

Mort de lol

mort de lol (1)
Loïc Sécheresse pose son regard d’amuseur public sur une catégorie qui prête à tous les excès : l’adolescence. Jungle publie ce mois-ci l’album Mort de lol, un recueil de strips sur cette tranche d’âge, coincée entre l’enfance et l’âge adulte.
Résumé de l’éditeur :
Mort de LoL est la nouvelle BD sur les ados à se procurer d’urgence ! Loïc Sécheresse met en scène des ados dans des situations que nous avons tous vécues un jour.

mort de lol (2)
Fin observateur des mœurs adolescentes, Loïc Sécheresse nous enchante et nous amuse dans Mort de lol. Mettant en scène des adolescents ordinaires, il n’y a pas d’histoire à suivre, mais une petite succession de pastilles, des tranches de vie humoristique. Les personnages, anti-héros, ne sont visibles que dans un seul mini-récit. La grande qualité de cet album réside dans la force comique des strips ; très peu ne font pas mouche.

  • Mort de lol
  • Auteur : Loîc Sécheresse
  • Editeur : Jungle
  • Prix : 10.45€
  • Sortie : 11 mars 2015

Foot 2 Rue extrême

foot de rue (1)
Série télévisée à succès, Foot 2 rue connaît une déclinaison dessinée signée Mathieu Mariolle et Marc Malloy. Publiée par les éditions Soleil, elle met en scène une bande de copains férus de football en pleine partie de ballon rond dans le Grand Tournoi.
Résumé de l’éditeur :
Le grand tournoi mettant aux prises les meilleurs équipes de Foot 2 Rue Extrême bat son plein ! La Team de Samy, Greg, Inès, Louna et Joey, s’est à chaque fois surpassée pour gagner la compétition, soutenue par Tag, à la fois coach et grand frère. Mais des défis encore plus intenses se dressent devant eux. Des challenges qui vont mettre à mal leur belle unité et leur faire risquer plus gros que la défaite : rien moins que la séparation de la Team !

foot de rue (2)
Série d’animation télévisée franco-italienne, Foot 2 rue est diffusée sur France 3 depuis 2005 (80 épisodes de 26 minutes) et réalisée par Marco Beretta et Serge Rosenzweig. Son succès auprès des enfants a amené les éditions Soleil à la décliner en bande dessinée. Pour effectuer son adaptation, elles ont fait appel à Mathieu Mariolle et Marc Malloy.

foot de rue (3)
Le scénariste parisien emmène ses jeunes héros au travers de la ville pour leur faire disputer des matchs de football, aussi uniques qu’originaux : esplanades mais surtout labyrinthe. Pour incarner aux mieux ses parties, il met en scène une ribambelle de jeunes joueurs : tous les styles sont représentés (les beaux gosses, les intellos, les casse-cous, les acrobates…), garçons et filles se mélangent. L’universalisme de ballon rond est aussi mis en scène par le biais d’ethnies différentes. Pour pimenter un récit parfois un peu classique, il introduit une véritable peste du nom de Fat, qui ridiculise les héros de la Team et les défie sur tous les terrains.

Le trait cartoon de Marc Malloy permet aux jeunes lecteurs de retrouver les héros de la série télé. Son graphisme simple et d’une belle rondeur est efficace.

  • Foot 2 rue extrême, tome 2 : Capitaine d’un jour
  • Scénariste : Mathieu Mariolle
  •  Dessinateur : Marc Malloy
  • Editeur : Soleil
  • Prix : 10.50€
  • Sortie : 18 février 2015

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