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La crise des orchestres à radio france: tristes soubresauts

Publié le 04 avril 2015 par Wanderer

« Si elle écarte l’option d’une fusion entre les deux orchestres de Radio France — ainsi que celle d'une installation de l'Orchestre National de France au Théâtre des Champs-Elysées —, Fleur Pellerin prône leur « redimensionnement » et une « réforme de leurs modalités de travail ». Pour autant, elle n’accepte aucun « statu quo artistique et budgétaire ». En clair, Mathieu Gallet devra trouver une nouvelle ambition artistique pour ces formations qui permette de réduire, dans le même temps, la facture qu’ils représentent. »
Voilà ce qu’on lit sur Telerama.fr
Mathieu Gallet a déjà trouvé une nouvelle ambition artistique : faire jouer les orchestres dans le hall de Radio-France puisque vendredi soir encore, Daniele Gatti et l’ONF ont présenté des extraits de la Passion selon Saint Jean de Jean-Sebastien Bach vu que le plan Vigipirate, concentré sur la Maison de la Radio, imposait l’annulation de la soirée, alors que la Philharmonie, elle, affichait dans la plus grande normalité la Messe en si et que le TCE affichait une autre Passion selon Saint Jean, sans doute tout aussi subversive par Philippe Herreveghe.
On se moque du monde, et l’humiliation et de l’orchestre et du chef n’a de pendant que la médiocrité d’une direction incapable d’un minimum de sens commun. En quoi les concerts programmés représentaient-ils un danger potentiel, en quoi Gatti est-il susceptible d’agiter les terroristes : je pensais naïvement qu’il n’agitait que certains dignes-membres-de-la-critique-parisienne.
Cette décision honteuse montre à quel point on en est arrivé, et surtout en quel respect on tient public, musiciens, chef, et surtout la musique et la culture. Que certains dignes-membres-de-la-critique-parisienne publiquement en appellent à la fusion des orchestres, honte à eux, est proprement impensable : la mort d’un orchestre, c’est la mort d’une tradition, d’une histoire, d’un pan de la culture et d’un grand pan de la musique. C’est aussi traumatique que la mort d’un théâtre ou celle d’un journal. Ici cela ne semble traumatiser personne.
Je ne nie pas les problèmes, mais qui les a créés ? Pourquoi désormais le National et le Philharmonique ont la même mission et le même répertoire ? Pourquoi certains ont laissé entendre que l’un était meilleur que l’autre ? Pourquoi les mêmes en accusent le directeur musical du National ? Tout cela ne repose sur aucune donnée, sinon l’opinion et les clans. Et alors pourquoi les orchestres devraient-ils être victimes d’enjeux de clans, de coteries et d’opinions de gens qui pensent être la référence de la critique, quand ils n’expriment que leur opinion, étayée par la doxa du jour, au gré des modes et des postures.
Certes, on peut se demander pourquoi à Radio France une politique marketing aussi pauvre, pourquoi une politique de communication d’un autre âge, pourquoi pas de compte Twitter ou Facebook quand tous les orchestres similaires en ont un, et surtout toutes les stations de Radio France ?
Certes on peut se demander pourquoi une politique d’enregistrements aussi pauvre quand la Maison est pleine d’archives sonores non exploitées.
Certes on peut se demander aussi pourquoi aussi peu de tournées en France, pourquoi un seul concert par semaine alors que, je donne un seul exemple, faire un second concert hebdomadaire à Bobigny, Nanterre et Créteil en alternance porterait la musique là où elle ne va pas ou très peu, avec une régularité qui permettrait une vraie politique de diffusion.
Certes on peut enfin se demander quelle idée est sortie du management de Radio France depuis Koering, et encore plus, Pierre Vozlinsky.
C’est cette pauvreté-là que je déplore, qui aboutit à ce désastre, et les musiciens, comme le public, comme le contribuable, en sont les victimes.
Il est de bon ton d’accuser les musiciens et les chefs, mais c’est le champ managérial et les directions successives de Radio France qu’il faut accuser, qui au-delà de la nomination des directeurs musicaux (seul élément visible au niveau de la « com ») n’ont cure de la politique culturelle, de la programmation ou de l’éducation du public, alors qu’en ayant en main un outil comme une radio, ils ont plus que d’autres les moyens de réaliser quelque chose. Ils ont tout en main, mais il leur manque le courage de penser.

Au lieu de cela, on préfère les brimades minables, à l’image de l’esprit qui règne, comme cette annulation de vendredi.
La crise de la culture est là : des politiques qui sont de moins en moins cultivés : où sont les Pompidou, les Duhamel, les Lang ou les Mitterrand ? Des managers sans grandeur qui ne sont que des épiciers, voire, en l’occurrence, des bouchers. Et une presse souvent sans mémoire, et sans profondeur, qui vogue au gré des clans.
Triste période.
Tristes sires.


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