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« Monsieur le Ministre, je vous en prie, sapere aude , osez étudier la réforme en détail »

Publié le 17 mai 2015 par Letombe

« Monsieur le Ministre, je vous en prie, sapere aude , osez étudier la réforme en détail »Jean-Christophe Cambadélis

Retrouvez la lettre ouverte de Jean-Christophe Cambadélis à Bruno Le Maire !

Monsieur le Ministre,

Vous avez pris la plume, enrôlant au passage une centaine de parlementaires, pour enjoindre le Président de la République de retirer un texte : La réforme des collèges, que vous n'avez pas traité de scélérat, mais c'est tout comme.

Plutôt adepte du conservatisme bon teint, que de l'agitation gauchiste, on s'interroge d'emblée sur les motivations profondes de votre " coup ", que vous espérez d'éclat !

Comment un ancien directeur de cabinet de Monsieur Villepin, Ministre de Messieurs Fillon et Sarkozy, n'ayant pour seul titre de gloire, lors d'une primaire interne, d'avoir perturbé le retour de l'ex-président à l'UMP, en est-il arrivé là ?

Comment un ministre, jugé conformiste de droite, a t-il pu être saisi par la " radicalité " contestataire ?

Comment peut-il rejoindre un syndicat, " corps intermédiaire ", tant vilipendé hier, au milieu d'une manifestation ? Pour tenter de la récupérer sans doute. Mais dans quel but réel ?

Nous scrutons avec attention la lettre ouverte, qui à défaut de contenu, présente un contenant. Vous en appelez à l'Histoire ! L'Histoire " retiendra " ! L'Histoire " retiendra " ! On se dit que c'est redondant, mais signifiant. On se dit aussi que le défilé du langage, ou plutôt de la plume, démontre que vous voulez être reconnu dans cette histoire.

Mais oui ! Sommes-nous bêtes ! Et nous qui croyons benoitement qu'il s'agissait de l'avenir de nos enfants. Vous vous êtes mobilisé avant tout pour la primaire de l'UMP ! Il s'agissait de démontrer que vous pouviez être soutenu par quelques parlementaires. Vous avez constaté que Nicolas Sarkozy se propose de régner sur la droite, l'extrême droite jusqu'à la République... Cherchez l'erreur !

Devant tant d'appétit, il fallait vous faire remarquer. Il vous fallait, somme toute, un peu d'oxygène, c'est ainsi. Et en appeler au Président, ça pose son homme dans une pré-présidentielle. Si on veut être remarqué dans notre système médiatique, il faut provoquer. Et puis, vous vous êtes dit : " Pas de grands hommes sans une grande cause " disait l'autre ". La votre sera... le latin.

Pas sûr que cela touche tout à fait la majorité de nos concitoyens, mais cela résume toute votre croisade.

Elle fait sens par son drapeau. Il ne s'agit pas de l'élitisme républicain, mais du conservatisme des élites. Une primaire, surtout à l'UMP, vaut bien une messe, elle sera chez vous en latin.

" Toucher au latin c'est toucher à notre identité française ", dira l'un des signataires, Monsieur Ciotti, qui vous traduit en bon français. Il est vrai qu'avec Monsieur Estrosi il a décidé de s'attaquer à la montagne du Front national par la face extrême droite.

Mais Monsieur le Ministre, je vous en prie, sapere aude , osez étudier la réforme en détail et vous verrez que votre attaque est un couteau sans lame.

Dans le nouveau collège, comme actuellement, les élèves qui en font le choix, pourront apprendre le latin de la cinquième à la troisième, et le grec en troisième avec le même nombre d'heures qu'aujourd'hui.

Pour vous, peu importe que les bruits de la ville soient faux, le recul du nombre d'heures de français, de mathématiques ou d'histoire-géo ; faux la valorisation de l'apprentissage d'une religion par rapport à une autre ; faux la réforme mettant fin à l'égalité, ou à la disparition de l'apprentissage de l'allemand.

Mais là où le brulot rejoint l'imposture, c'est l'accusation de vouloir faire des économies. Franchement ! Venant d'une formation qui a pilonné la volonté qui est la nôtre, de donner des moyens budgétaires à l'Education nationale, là où le gouvernement et le chef de l'Etat, François Hollande, ont porté l'effort de la nation à 65,02 milliards d'euros, là où vous vous proposez de réduire les postes et le budget, vous vous moquez du monde !

Reste le nivellement par le bas ! Ah ! Le vieux mot d'ordre de l'extrême droite contre l'égalité ! Et bien souffrez, Monsieur le Ministre, que ceci nous sépare. Comme la République sépare toujours les progressistes des conservateurs. Vous voulez protéger les privilèges des dominants dans la reproduction des élites.

Votre cri de guerre résume donc votre entreprise et votre camp. Ce que vous détestez dans cette réforme, qui n'est pas achevée et soutenue par des syndicats étudiants et enseignants. Ce que vous ne supportez pas, c'est que nous nous attaquions à la ségrégation scolaire, aux inégalités.

Alors maintenant c'est clair, et au bout, votre lettre aura été salutaire, elle permet de " dévoiler " le sens de votre poulet : Lutter pour l'immobilisme et le conservatisme.

Et bien pour nous, la République, c'est donner les moyens de l'émancipation. Elle rime chez nous avec progrès et égalité.

Voilà pourquoi nous allons vous combattre, nous dirons aux Français : Non au " non à l'égalité au collège ".

Nous sommes sûrs dans ce combat d'être entendus par une majorité de parents et de Français.

Recevez, Monsieur le Ministre, mes salutations républicaines.

Jean-Christophe Cambadélis

Député de la 16e circonscription de Paris

Premier secrétaire du Parti socialiste


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