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Une promenade littéraire

Publié le 08 juin 2015 par Jacquesmercier @JacquesMercier

Alors que se profilent les deux mois d’été, une initiative vraiment originale de Guy Delhasse « Estival des Parlantes » est lancée. Des promenades littéraires dans des villes, avec un auteur qui a écrit un livre dont l’action s’y déroule. Me replongeant dans « La Francisque de Tournai », j’ai retrouvé pour vous un des passages qui a été coupé par l’éditrice, compte-tenu de la briéveté du roman « de gare » dans sa collection. C’est une scène qui se déroule dans le Collège de Tournai… Pour remettre dans le contexte, bien sûr il faudrait lire tout le roman policier ! Bonne lecture… Atmosphère ! Atmosphère !

Le photographe doit prendre les photos de classes au Collège Notre-Dame et demande à Daniel de lui servir d’assistant. Cette mission rompt la monotonie du quotidien. Arrivé de bonne humeur, il aide au chargement du matériel. La camionnette prend son virage dans la rue Floc à Brebis (Il adore l’appellation qui vient du mot néerlandais « vloc », marché ?) et entre par la grille de la pentue rue des Augustins. Le véhicule est garé dans la cour et attire la curiosité des premiers élèves arrivés, tous en chemise, cravate et veston.

– Un temps idéal, dit le préfet qui observe les préparatifs au milieu de la grande cour principale. Pas de pluie, pas de soleil !

– Vous avez raison, Dieu est avec nous ! répond le photographe qui trouve toujours les mots qu’il faut au bon moment.

Bancs et chaises sont disposés ; le photographe calcule la distance et met sur le trépied l’appareil de précision. Pendant ce temps, une cloche sonne la mise en rang et l’entrée dans les locaux.

La première classe ne tarde pas à redescendre dans la cour. Ils sont une trentaine en culottes courtes. Le photographe cadre l’ensemble, en prenant soin de laisser voir en arrière-plan la niche avec la Vierge sur la façade mangée de vigne vierge. Il y a des rires, des « souriez », des appels au calme du professeur assis tout devant. Daniel note les références.

À midi, ils reçoivent une collation dans le réfectoire, au bout d’une longue table de bois occupée par des professeurs. Il y traîne l’habituelle odeur de soupe, qu’on hume dans tous les pensionnats du monde.

Lors de la photo de classe suivante, Daniel ressent ce frémissement dont il se souviendra longtemps. Un des élèves, au troisième rang, a la main bandée. Le professeur demande qu’il la mette derrière son dos et vient expliquer que le garçon s’est blessé lors d’un récent camp scout. Alors qu’il fendait non pas une bûche mais une grosse branche mouillée, la lame de sa cognée a glissé et entaillé sa main jusqu’au muscle du petit doigt, l’auriculaire. À l’hôpital, le médecin lui a posé des agrafes ; il risque de sentir une gêne dans le mouvement jusqu’à la fin de sa vie. Encore heureux qu’il s’agisse de la main gauche et qu’il soit droitier.

Après quatre heures, le photographe libère Daniel en le remerciant des services rendus. Il se rend dans une quincaillerie, où il s’achète une cognée de bûcheron. Le marchand lui lance, alors qu’il sort du magasin :

– Ne jetez pas le manche après la cognée !

Il dit « non, non ! », mais ignore que l’expression signifie «abandonner ». Cela tombe bien puisqu’il n’est pas homme à baisser les bras. L’outil prend une place encombrante dans la collection qu’il rassemble à la rue Beyaert.

La ville semble se réveiller. Le brouhaha des conversations qui enfle dans les rues ressemble au sang qui coule dans les veines. Les couleurs se ravivent sous le soleil. Émergent d’abord les clochers et les tours. Cette renaissance se fait par strates : les bâtiments les plus anciens, puis ceux qui ont été restaurés, enfin les plus récents. Dans certains quartiers, on peut même imaginer un ancien vendeur ambulant criant : « Pieaux d’lièfe, pieaux d’lapin ! » Mais les bruits sont différents les jours de fête et l’atmosphère est remplie d’énergie. Les traditions vont se poursuivre dans un contexte qui a évolué ; le folklore ce sont les racines, elles passent par le tronc et s’épanouissent en de nouvelles branches. C’est ainsi que les Tournaisiens ressentent ce week-end de fête qui commence.

Daniel veut profiter de la foule, des perturbations, du vacarme pour réussir son défi. Il a surtout besoin de ses deux dames, Caroline et Thérèse.

Entre début juillet et fin septembre, Guy Delhasse propose un Estival des Parlantes (www.lesparlantes.be), une vingtaine de promenades littéraires. Vous trouverez sur le site les villes concernées. Pour ma part, ce sera le dimanche 29 août que je me promenerai en votre compagnie dans la ville de Tournai, sur les traces du polar qui s’y passe : « La francisque de Tournai ». L’occasion, après avoir lu le court livre « de vacances » (http://new.lucpire.eu/2014/10/30/jacques-mercier-la-francisque-de-tournai/) d’en vérifier la justesse du magnifique décor. Une excellente idée, je pense !

escaut pont des trous



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