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#Manger sans hashtaguer, c’est gâcher?

Par Jsbg @JSBGblog

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Vous êtes tranquillement au restaurant et vous remarquez cette fille qui s’agite, ordonne les coussins sur la banquette, enlève le set de table, replace les couverts et se met debout sur sa chaise afin d’avoir une vue plongeante sur son assiette… qu’elle ne savourera peut-être même pas mais partagera surement sur le net. Importunante ou amusante? Pour ma part, tant qu’elle s’occupe de ses oignons, ça m’est égal, mais les « food-porn stars » peuvent gêner.

Ils sont des « digital native » hyperactifs, exposés aux émissions telles que Top-Chef, aux publicités affriolantes (comme celle ci). Pour les non-initiés à ce phénomène, la définition de food-porn n’est pas encore dans le petit Robert, mais ça ne saurait tarder car c’est un des hashtags les plus utilisés sur les réseaux sociaux. Ce phénomène consiste à photographier ce qui se consomme et qui provoque le désir et l’envie, parfois jusqu’au food-gasm (rien que ça!).

Ces obsédés de nourriture, de « design d’assiette », de mixage de couleurs et spécialistes des filtres Instagram viennent de toutes classes sociales, ils sont partout, aussi bien dans les fast-food que dans les restaurants étoilés. C’est un peu comme hésiter entre un rösti au lard et « Le Saint-Pierre côtier cuit à la vapeur douce d’algues wakamé, crémeux de chou-fleur, émulsion aromatisée à la fleur de jasmin » alors que l’on n’aime pas le poisson, mais que celui-ci à l’air bien plus photogénique.

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Chacun y met de son grain de sel, cadrage, effets, filtres et propose sa propre vision esthétique et de ce fait, participe à cette déferlante de nourriture sur le web, bizarre paradoxe d’un monde affamé, involontairement par pauvreté ou volontairement par régime. Glamouriser et théâtraliser nos carottes râpées de midi, c’est l’équivalence du story-telling de la bouffe. Ce n’est pas si grave, ce n’est pas une maladie (quoique quotidiennement cela rentrerait presque dans la catégorie trouble du comportement ou trouble alimentaire pour certains nutritionnistes).

On aurait pu croire que cette mode, qui existe depuis quelques années, allait vite s’essouffler, mais il n’en est rien.

Des marques internationales surfent sur la tendance et utilisent ce phénomène food-porn comme un réel instrument marketing. On peut citer McCain, qui a proposé la semaine dernière à Paris une exposition, alléchante, dédiée à la pomme de terre photographiée sous toutes les coutures.

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Mais les restaurateurs s’y mettent aussi! Le restaurant israélien Foodography est l’un des premiers à se lancer dans l’expérience culinaire ET photographique. Il propose un repas dans des assiettes spécialement conçues pour servir de support à votre smartphone, et va jusqu’à vous fournir un éclairage spécifique. Vraiment, si vous y ratez votre photo avec ça, on ne peut plus rien pour vous!

Si ce nouveau concept de restaurant est en train de faire un carton à Tel Aviv, d’autres chefs cuisiniers refusent à leurs clients de prendre en photo leur plats, revendiquant leurs « oeuvres » comme propriété intellectuelle. Un sujet épineux, qui n’a pas fini de faire des vagues… Manquerait plus que les producteurs de légumes réclament des droits d’image et que les muffins soient censurés car complices d’une société en surpoids.

Christine Rambaud

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« L’expo qui va vous faire saliver » par McCain

Exposition de photographies de Germain Bourré et ateliers culinaires

Foodography

Nahalat Binyamin St 57, Tel Aviv, Israël

155$ / personne


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