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David Krakauer Ancestral Groove renverse le Duc des Lombards

Publié le 30 juin 2015 par Assurbanipal

David Krakauer Ancestral Groove

Le Duc des Lombards

Paris. Lundi 29 juin 2015. 21h30.

En concert au Duc des Lombards le mardi 30 juin et le mercredi 1er juillet 2015 à 19h30 et 21h30.

David Krakauer: clarinettes

Sheryl Bailey: guitare électrique

Jerome Harris: guitare basse électrique

Michael Sarin: batterie

Keepalive: ordinateur, échantillonneur

" On va commencer avec un morceau pour vous. Ca s'appell e Kickin'it for You ". D'abord un sample de musique klezmer des années 20. Puis le groove hypnotique de la rythmique et au dessus la clarinette qui swingue la mémoire yiddish.Solo de guitare Blues Rock. Ce son de clarinette, c'est la joie-souffrance, l'âme juive d'Europe de l'Est. Un sépharade ne pourrait pas jouer cela.

David Krakauer parle bien français avec un délicieux accent new yorkais. Il nous explique la recherche de ses origines lorsqu'il a pris conscience de l'accent russe de sa grand mère. En 1992, il a pu jouer à Cracovie car le rideau de fer était tombé (David Krakauer est né en 1956). Il s'est senti chez lui. " Krakowski Boulevard ". La batterie entre en résonance avec des bruitages électroniques et funky. Il y a de l'agitation sur ce boulevard. Soldats allemands et russes sont partis. C'est la joie des jeunes filles dansant en liberté. David Krakauer n'est pas un américain moyen regardant des séries télé et faisant 2,5 enfants comme il le dit si bien. Sa culture est bien plus riche. Dans cette musique, il y a 2 sources essentielles: l e klezmer (musique blanche) et le funk ( musique noire). C'est toujours du Jazz, musique métisse. La rythmique est vraiment très funky. Je retrouve Prince dans le feeling. D'ailleurs, c'est une femme à la guitare. Ca aussi, c'est Princier. Sacrée attaque à la clarinette et ce son aigu du klezmer, comme le vinaigre pour le molossol. Là, c'est carrément la chevauchée dans la steppe ou le bal nuptial.

Un hommage de David Krakauer au professeur qu'il n'a jamais rencontré, Sidney Bechet. " Klezmer à la Bechet ". Démarrage bien funky. Le son de la clarinette est lui tiut à fait klezmer. Bechet, lui même, joua " My yiddishe Mama ". La clarinette fend les murs. Le groove se fait plus subtil, plus discret mais toujours puissant. Le groupe repart plus rock, plus brutal.

" Offering " (David Krakauer et non John Coltrane). Un morceau commencé après le 11 septembre 2001, en hommage aux victimes, suite à une création avec un danseur japonais. Clarinette basse. Son grave, respectueux. Pas un chant funèbre mais de souvenir. Effets planants de la guitare mais de bon goût. C'est émouvant, nom de Zeus! Ca accélère doucement, souplement. Il monte dans l'aigu de l'instrument. Il y a du Eric Dolphy là dedans.

Puisqu'il s'agit d'un groupe new yorkais qui inaugure le festival " Nous n'irons pas à New York " au Duc des Lombards, le groupe va nous jouer un morceau de John Zorn, typique du Lower East Side. Le quartier juif, des artistes, des hippies, des punks. Un rap en hommage à ceux qui avaient raison de dénoncer la pollution. En anglais et en français, par David Krakauer, s'il vous plaît. La clarinette crie sa colère et sa rage de vive. Ca attaque ferme. Il manque une piste de danse dans la salle pour une musique aussi énergique.

Un morceau appris à Kichinev en 1989 d'un maître moldave, Emil Kroitor (accordéon). " Moldavian Voyage ". Comme certains musiciens noirs américains ( Dizzy Gillespie, Art Blakey, Louis Armstrong, Duke Ellington) voyagèrent en Afrique à la recherche de leurs racines, David Krakauer a voyagé en Europe de l'Est à la rencontre des siennes. Il joue ce voyage à Paris, non loin du Marais, quartier important pour la communauté juive en Europe. Un chant traditionnel en boucle. Après quelques improvisations vocales, David Krakauer se remet à la clarinette. Une douce complainte. Ca groove toujours. Le tempo s'accélère. Le batteur hache le tempo. C'est la fête yiddish. Retour à la complainte. Enchaînement sur un beau solo de clarinette. David Krakauer fait tournoyer son instrument afin de déplacer le son. C'est la transe yiddish qui vient des chants et danses sacrés juifs. Le roi David dansa devant le Seigneur dit la Bible. La note est tenue grâce à un souffle continu. David Krakauer a t-il appris la technique du souffle continu auprès des maîtres du yoga en Inde comme Sonny Rollins? Le groupe le rejoint pour un air funky, dansant. La joie triomphe de la peine. Enchaînement sur une musique de danse qui pour moi, Français moyen, rappelle irrésistiblement Louis de Funès dansant dans " Rabbi Jacob ".

RAPPEL

" Moskovitz ", une autre chanson festive. Ca pulse. Les samples se fondent bien dans la musique, deviennent un instrument. La basse slappe avec un son énorme. Non seulement, c'est la canicule dehors mais, en plus, ces gars et cette fille chauffent la salle alors que leur musique vaincrait le Général Hiver, le meilleur défenseur de la Sainte Russie. Solo de guitare. Ca, c'est Prince! Mais Prince ne joue pas avec un clarinettiste klezmer.

Le public en veut encore. Ca tombe bien. Le groupe aussi. Un morceau de l'autre projet de David Krakauer " The Big Picture " dédié aux films qui ont marqué sa vie. Titre " La voix de ma mère ". A ce propos, quelle est la différence entre une mère juive et un terroriste irlandais? Avec un terroriste irlandais, tu peux négocier.

Merci à David Krakauer pour sa musique, son empathie avec le public et son excellent français mâtiné d'un délicieux accent new yorkais. Certains spectateurs américains se sont même plaints de ne pas comprendre ses propos. Tant pis pour eux. Nous n'étions pas à New York mais bien à Paris. Il a chauffé le public blasé du Duc des Lombards. Même mon compère, le flegmatique Mr Q, en perdit son calme légendaire.

La photographie de David Krakauer est l'oeuvre de l'Illustre Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de cette oeuvre sans l'autorisation de son auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.


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