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L’amour est dans le pré.

Publié le 30 juillet 2015 par Lamallette @Lamallette1
  • L’amour est dans le pré.

L’amour est dans le pré.

Par Andréanne Tenhave

Maman ouvre les yeux. Il est 5h30. Elle se lève, met du linge dans la laveuse, pendant que papa se retourne dans le lit, et plisse le front, endolori par son mal de dos (les 458 balles de foins faites hier se font ressentir). Papa et maman ont 53 et 51 ans. Et la semaine passée, ils étaient en vacances ; 6 jours de vacances au Saguenay, le plus long séjour off depuis leur voyage de noces, il y a 29 ans.

En haut, le cadran sonne. Les 2 sœurs snoozent. Pendant ce temps, mon frère est déjà en route en direction de la ferme. Les sœurs finissent par se lever, descendent les escaliers en demandant à ma mère si elle a des bas propres.

Il est 5h38, papa met ses bottes de pines (tsé celles en caoutchouc, bin chez nous, c’est des bottes de pines) et sort dehors avec son café à la main. Maman va étendre sa brassée sur la corde à linge et va le rejoindre à la ferme, suivi de mes sœurs. Mon frère arrive dans la cours, parke son char, dit salut à Marley le colley, et la porte de la laiterie se ferme.

Une journée de plus vient de commencer à la ferme de ma famille. À l’heure du déjeuner, vers 9h, les vaches et les veaux auront mangé, les œufs auront été ramassés, 58 vaches auront été traites et papa aura commencé à réparer la presse à foin qui a brisé hier. Il fait déjà 24 degrés, il annonce de la pluie ce soir et il y a encore du foin à ramasser ; watch out la grosse journée.

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À 22h30 ce soir, Papa aura fini de réparer la presse avec le frère, et les 5 ensemble auront fait un 421 balles de plus, avec la pluie sur le dos. Le tout, en mangeant des sandwichs vite faite, bin faite, entre deux voyages de foin à décharger, à 32 degrés, sous un toit de tôle. À travers ça, une vache aura eu un bébé, le camion de lait sera passé, la chaîne du monte-balles aura débarquée 2 fois et ils auront fait le train du soir.

L’amour est dans le pré.

Dans la folie des foodies et de ces chefs qui inventent et réinventent ce qu’on mange, du végétarisme/végétalisme, et de tous les troubles alimentaires, moi j’ai envie de lever mon verre de lait (mon bol de céréales, mes tomates et mon burger) à ceux et celles qui ne travailles pas que pour mettre du pain sur leur propre table, mais sur celle de tout le monde.

À ma famille, mais aussi à tous ceux qui comme eux, ignorent ce qu’est une semaine de 40h, mais qui vivent d’une passion qui prend racines dans un sol pas toujours fertile, parfois parsemé de roches et d’arbres, merci. À ces gens dévoués, qui travaillent de leurs mains, à agrémenter les paysages du Québec et du monde entier avec des cultures dont bien peu en connaissent les secrets. (genre sais-tu toi comment le riz pousse, comment on cultive les graines de lin, ou des avocats? … C’est ça que j’veux dire.)

On entend souvent que ceux qui ont des fermes sont riches. Oui, si on cumule l’inventaire de ce qu’ils possèdent en terres, machineries, animaux et tout le reste, ils sont riches. Mais rares sont ceux qui possèdent tout ça sans avoir emprunté et qui font de l’argent comme de l’eau. C’est plate, mais on a tous besoin d’outils pour travailler mais ce n’est pas avec un veston et un portable que l’agriculteur y arrivera.

La richesse, ça reste relatif. Si certains la compte en dollars, moi je la compte en moments passés avec ma famille, en connaissances (heille, je sais toujours bin conduire un tracteur, traire une vache et bien plus encore) et en valeurs. Quand tu vis sur une ferme, tu sais c’est quoi  »travailler pour avoir ce que tu veux ».

Quoiqu’en y repensant, c’est vrai qu’ils sont riches. Ils ont une richesse que certains chercheront toute leur vie, en travaillant avec acharnement à faire grossir leur compte de banque : eux, ils ont une passion, une raison d’être ou il cumule bien plus que des dollars, et le matin, ils ne se lèvent pas pour aller travailler.

Bon déjeuner/diner/souper, appréciez ce que vous mangez.

:)

AT.

P.S. Clin d'oeil à nos blogueuses Évelyne et Geneviève, qui savent de quoi je parle.

L’amour est dans le pré.


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