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La pollution de l'air tue plus que le sida et le paludisme cumulés

Publié le 27 septembre 2015 par Blanchemanche
#pollutionatmosphérique


26 SEPTEMBRE 2015 |  PAR MICHEL DE PRACONTAL

La pollution de l'air tue plus que le sida et le paludisme cumulésSmog à Beijing © DRLe scandale Volkswagen va inévitablement accentuer la dénonciation de l’automobile polluante. Coïncidence, quelques jours avant que le scandale n’éclate, la revue scientifique Nature a publié l’étude la plus détaillée jamais réalisée sur la pollution atmosphérique.Dirigée par le chimiste Johannes Lelieveld, du Max-Planck Institut de Mayence, cette étude estime à 3,3 millions le nombre de morts provoquées chaque année par la pollution de l’air extérieur, dont les trois quarts en Asie. Les maladies mortelles dues à la pollution atmosphérique sont pour les trois quarts des pathologies cardiovasculaires, et pour un quart des maladies respiratoires ou des cancers du poumon.Cela représente environ 6% du total des morts annuelles, et plus que le sida et le paludisme cumulés. D’après Lelieveld et ses collègues, si les tendances actuelles ne changent pas, le bilan sera deux fois plus élevé en 2050. Cette estimation élevée recouvre d’énormes contrastes entre les régions et de grosses surprises. Les chercheurs s’attendaient à ce que la circulation automobile et les centrales thermiques soient les deux principales sources de suies et de smog meurtriers. A l’échelle planétaire, ce n’est pas le cas, loin de là. Si l’étude montre que la pollution due aux véhicules tue deux fois plus de personnes en Allemagne que les accidents de la route, le tableau d’ensemble qui se dégage relativise l’impact de l’automobile.Ainsi, dans les pays industrialisés, il apparaît que la cause majeure de pollution est l’agriculture, par un effet indirect : les engrais chimiques utilisés dans l’agriculture intensive libèrent de l’ammoniac qui se transforme en nitrate et sulphate d’ammonium. Ces derniers jouent un rôle majeur dans la formation de petites particules dangereuses. Au total, l’agriculture cause un cinquième des décès dus à la pollution de l’air, et la proportion atteint 40% en Allemagne, en Russie ou en Ukraine. Par comparaison, les émissions des véhicules provoquent quatre fois moins de décès à l’échelle planétaire, même si leur impact est d’environ 20% en Allemagne, aux États-Unis et en Grande-Bretagne.Mais si préoccupante que soit la situation de l’Allemagne ou des États-Unis, elle est sans commune mesure avec celles de la Chine, où la pollution atmosphérique tue 1,4 millions de personnes par an, et de l’Inde, où le nombre de morts est estimé à 650 000. En Chine, l’air toxique tue dix fois plus que le transport routier ou que le VIH.Carte montrant l'intensité de la pollution de l'air (échelle du vert clair au rouge foncé)Carte montrant l'intensité de la pollution de l'air (échelle du vert clair au rouge foncé) © NatureLà encore, l’industrie et le transport ne sont pas les facteurs majeurs : le premier responsable de la pollution de l’air en Asie est causée par l’usage très répandu des petits feux domestiques pour se chauffer et faire cuire les aliments. Leur effet est d’autant plus important que les particules carbonées issues des feux de bois et de charbon sont potentiellement plus toxiques que celles qui ne sont pas à base de carbone, mais ce point n’est pas tranché.Dans l’Union européenne l’exposition aux particules fines et à l’ozone tue 180000 personnes par an, dont 35 000 en Allemagne, le pays le plus touché. Les chercheurs estiment que la situation géographique de l’Allemagne au centre de l’Europe l’expose à la pollution venue d’autres pays, ce qui est aggravé par la densité de la population, l’industrialisation, l’agriculture intensive et un trafic automobile intense. Par comparaison, la France compte deux fois moins de décès dus à la pollution de l’air, pour une population équivalente aux quatre cinquièmes de celle de l’Allemagne.Les chercheurs ont calculé que 17 mégalopoles et conurbations en Asie se classent parmi les 30 villes les plus touchées par la pollution de l’air, la première étant la région du delta de la rivière des Perles, au sud de la Chine, où se trouvent les villes de Canton et Shenzhen. Pékin et Tianjin sont aussi très concernées. Si les tendances actuelles se maintiennent, la mortalité due à la l’air pollué, déjà très élevée dans les mégalopoles chinoises, risque d’atteindre un niveau stratosphérique. Sans minimiser l’importance de la pollution automobile, l’étude montre qu’un effort important doit être mené, en Asie, pour réduire les émissions dues à l’énergie résidentielle – chauffage, cuisson, etc – ainsi que celles dues à l’agriculture.http://blogs.mediapart.fr/blog/michel-de-pracontal/260915/samedi-sciences-185-la-pollution-de-lair-tue-plus-que-le-sida-et-le-paludisme-cumules

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